Sale temps pour les droits de l'Homme

L’année 2015 est sans doute l’année de la xénophobie au sommet. Pendant que le pays s’enfonce dans le marasme, la pauvreté et la souffrance, les hommes politiques institutionnels rivalisent dans le registre chauvin, anti-étranger, antimusulman. Chacun selon sa partition.
Morano, la groupie de Sarkozy, exultant contre la « lâcheté » et la « saleté » des migrants. Mélenchon tâchant d’exceller sur le créneau «  A chacun son boche »… Ce tapage hystérique cachant mal la fracture politique en France et ses fissures dans toutes les formations politiques sans exception.

La xénophobie des hauts fonds atteint des degrés de crétinisme toujours plus poussés. Et, il semble que Nadine Morano soit la synthèse vivante de ce crétinisme qui n’a, au demeurant, rien d’innocent. Faisant un parallèle saisissant entre les Français de 1940 qui n’ont pas fui leur pays natal et les migrants syriens qui désertent leur patrie meurtrie, la bécassine de la droite française aurait mieux fait « de la fermer avant de l’ouvrir » pour reprendre un mot de Pierre Dac. Si ce n’était pas consternant, on en rirait. La population française a cessé de fuir … quand l’armistice a été signé, le 22 juin 1940, au prix de la livraison à l’Etat nazi des réfugiés allemands. Belle page d’histoire, en effet ! Sans même parler de la suite collaborationniste et antijuive !

A qui sert la germanophobie ?

A l’autre pôle de scène politique, Mélenchon reprend donc l’antienne de la germanophobie en s’exclamant, à propos de la Grèce : « pour la troisième fois, l’Allemagne détruit l’Europe. La première fois en 1914, la seconde en 1940 et la troisième fois, en 2015, à propos de la Grèce ». Nous savions, depuis 1992, que Mélenchon était un preux défenseur de « L’Europe ». Il avait alors brillé dans la défense passionnée du Traité de Maastricht. Et, ne nous y trompons pas, face aux teutons, c’est toujours l’Europe de Maastricht qu’il défend, avec le fiel qu’on lui connaît.

Sous la plage, les pavés

Dans un registre assez comparable, Madame le maire de Paris s’est lancée dans la très, très provocatrice opération « Tel-Aviv sur-Seine » au moment où les crimes sionistes se multiplient, dans un style proche de « la nuit de cristal » ( nuit de pogroms anti-juif en Allemagne, en 1938, organisée par les nazis), un an après le massacre génocidaire de Gaza. Cette opération dédiée à l’Etat raciste d’Israël a tourné au fiasco. En l’espace de 24 heures, des centaines de manifestants, sollicités par les réseaux sociaux ont fait face à la plage sioniste, pour Gaza, le 13 août dernier. Danielle Simonnet, conseillère municipale du PG, avait émis de véhémente protestation et, à sa suite, le PCF…Mais ce beau monde s’est illustré par son absence à cette manifestation spontanée.

L’honneur perdu de François Hollande

Toujours dans la même veine exécrable, la lettre de soutien de François Hollande au moment où Erdogan bombarde les positions du PKK dans sa lutte contre les exterminateurs barbares de l’EI… qu’Erdogan feint de combattre : une bombinette sur l’EI, cent vraies bombes contre le PKK ! L’insipide Hollande écrit au boucher Erdogan qu’il souscrit à « la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes ». En renvoyant dos à dos, combattants du PKK et hordes barbares de l’EI, Hollande fait bien plus que d’y laisser tout amour-propre, tout honneur, y compris le sacro-saint « Honneur de la France ». Si Hollande doit laisser une trace dans l’Histoire, ce sera celle d’un chef d’Etat servile, bouffi de morgue, au service des pires dictateurs et assassins : le roi Salmane ben Abdelaziz Al Saoud d’Arabie (en faveur duquel, il privatise une plage), Netanyahu, Erdogan… C’est dire qu’Hollande combat le terrorisme sous toutes ses formes …Sauf le terrorisme d’Etat. Sa définition du terrorisme est propice à tous les amalgames : la lutte armée du PKK, adossée sur la population, protégeant les civils des menées atroces de Daesh, pour le droit du peuple Kurde à disposer de lui-même, est assimilée à du terrorisme…Comme le fut, autrefois, la Résistance à l’occupation nazie en France. L’idéologie au rabais de Hollande suffit à honorer les ventes d’armes.

Mauvais samaritains

La politique extérieure d’un pays n’est jamais déconnectée de sa politique intérieure. En règle générale, la politique extérieure en est le prolongement. Et, a bien sûr, ses répercussions sur la politique intérieure. Autant dire : sale temps pour les droits de l’Homme. Sale temps pour les considérations humaines les plus simples. Même à La Courneuve où le maire PCF Gilles Poux a décidé d’en finir avec le bidonville qui abrite 300 personnes soit 80 familles depuis de nombreuses années. Ces 80 familles ont finalement été expulsées manu militari du « Samaritain » (nom que les habitants ont donné à leur village). La municipalité ne veut rien entendre. Pas même les propositions de la Fondation l’Abbé Pierre et de Médecins du Monde (nettoyer le bidonville, y installer l'eau courante et le sécuriser avant d'entamer un travail suivi pour que les habitants puissent scolariser les enfants, travailler, et, petit à petit quitter le bidonville).

Ces gens qui se sont fait élire sous le logo « l’Humain d’abord », mais si, mais si, n’ont qu’un seul message à délivrer aux habitants : « la seule solution, c’est l’évacuation ». [Sources : Pétition en ligne sur Change.Org – Le Parisien – Seine saint Denis du 16-08-2015]. Le PCF renouerait-il avec la sinistre tradition qui incita le maire de Vitry-sur-Seine à raser un foyer malien en 1981 ? Plus à gauche que le PS, le PCF et le Front de gauche ? On peut en douter. ! De bien mauvais samaritains en tout cas.

Quand les juges arbitrent la crise du FN

Sur un tout autre plan, le feuilleton Jean Marie Le Pen contre l’actuelle direction du « parti » qu’il a fondé en 1972, se poursuit. (Voir plus loin, notre article sur la crise du FN). Avec ses accents pathétiques, ses phrases assassines, ses procédures interminables. Force est de constater que l’institution judiciaire a un faible pour le vieil et infâme nostalgique de Pétain. En effet, indépendamment du jugement que nous pouvons porter sur ce panier de crabes qu’est le FN, nous nous demandons comment la justice bourgeoise peut prétendre « arbitrer » des conflits internes à un parti, comment un tribunal peut se déclarer compétent pour démêler ce genre d’intrigues au sein d’un parti, quel qu’il soit. A tout le moins, cette intervention de la Justice montre à quel point le FN est un parti institutionnel, intégré à l’échiquier politique et, rappelons-le, subventionné par l’Etat à l’instar de tous les partis « agréés ». Exclu, Le Pen exulte « je suis tombé dans un guet-apens » et se prépare à former d’autres recours en justice, qui feront durer le plaisir. De cette façon, il continuera à exister et les medias pourront encore, à volonté, faire sortir le diable de sa boîte au moment opportun. Jusqu’à ce que mort s’ensuive.

Le bloc lambertiste s’est brisé

Tous les méfaits et tiraillements que nous venons de citer ne manqueront pas de nourrir ce que les analystes grassement subventionnés appellent « la désaffection des français pour la politique ». Pour ne pas avoir à dire sans langue de bois que l’immense majorité de la population rejette ce gouvernement. Pour ne pas avoir à avoir à reconnaître la fracture politique entre les sommets, les appareils et la société. Cette fracture politique, prémisse d’une crise révolutionnaire, explique cette tendance à la dislocation, à l’implosion de tous les partis, grands et petits. Même le POI en est frappé (ne parlons pas du NPA qui poursuit inexorablement sa décomposition). Le bloc lambertiste que l’on croyait monolithique et de granit vient de se briser, « par le haut ». Gardons- nous d’extrapoler sur les motifs excipés par les deux factions en lice. Le POI (ex Parti des travailleurs, vertébré par le CCI - ex PCI-OCI) n’est certes pas un parti institutionnel, ce n’est pas non plus une des composantes de l’extrême-gauche domestiquée (NPA, LO), mais son appareil est inextricablement lié et imbriqué à l’appareil de FO et à son sort , lequel appareil « se couche » devant le gouvernement et ne donne plus l’illusion d’incarner « le syndicalisme orthodoxe ayant « la force de l’indépendance » face aux « réformes »). Ce qui bride toute initiative de ce parti (sans compter son régime interne étouffant toute libre discussion, vouant aux pires calomnies et « excommunications » ceux « qui l’ouvrent ») et le met en porte-à-faux par rapport au cours réel de la radicalisation des masses (dont l’abstentionnisme conscient est l’expression la plus élevée, à cette étape). Tout parti qui a un fil à la patte avec les appareils social-démocrates (comme FO) ou staliniens (Front de gauche, NPA) est voué à l’immobilisme, à la sclérose et à la cristallisation de cliques au sein de sa direction, de son appareil technique et politique. Dernier exemple en date : EELV sur lequel on reviendra.

Pour un véritable parti ouvrier libre de toute attache

Or, elle existe bel et bien l’aspiration à un véritable parti ouvrier indépendant, digne de ce nom, c’est-à-dire indépendant politiquement et organisationnellement de tout appareil destiné à défendre l’ordre établi quoi qu’il coûte, libre de toute attache. Nous nous assignons comme tâche d’aider les travailleurs, les chômeurs et les jeunes les plus déterminés à se regrouper pour créer les premiers détachements d’un tel parti. Un parti autour d’un plan d’urgence en défense des travailleurs, des chômeurs, des jeunes et de leurs familles. Un parti qui trace la perspective de la grève générale pour porter un coup d’arrêt ferme et définitif à toutes les « réformes » destinées à liquider les conquêtes sociales qui nous permettent de vivre. Un parti internationaliste, antibureaucratique, anticapitaliste ; un parti des travailleurs. Pour vaincre et vivre.

Daniel Petri, 22 août 2015

Modifié le jeudi 03 septembre 2015
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