Faillites sur toute la ligne

Chronique d'une fin de Régime" Nous craignons d'atteindre la barre des 3000 dépôts de bilan en 2008 " s'alarme un certain Deneuville, délégué général de la Fédération nationale des transports routiers. Au même moment, le nombre de wagons de marchandises " débranchés " à Villeneuve St Georges qui est l'une des plus grandes gares de triage d'Europe, passe brutalement de 3600 par jour en juillet à 840 en octobre. Retour sur une hémorragie économique.Le secteur de l'automobile est lui aussi emporté dans la tourmente : des milliers de suppressions d'emplois chez Renault, chômage partiel chez Peugeot. Puis, c'est au tour de l'immobilier avec les premières vagues de suppressions d'emplois annoncées chez Kaufmann and Broad et Natixis qui laissent présager du marasme dans tout le secteur du bâtiment où les professionnels prévoient 180000 suppressions d'emplois. Tous ceux qui claironnaient " vive la crise " il y a vingt-cinq ans se trouvent maintenant face à leur cynisme. La crise se retourne à présent contre ceux qui en ont profité, dans l'ivresse de la spéculation sans fin. Tous ceux qui ont voulu croire en l'âge d'or du libéralisme économique sont glacés d'effroi, tels des apprentis sorciers.

" Vive la crise !"

Dans la population, l'effondrement financier à l'oeuvre ne provoque pas de réelles surprises : les gens voyaient leur pouvoir d'achat s'amenuiser plus rapidement qu'à l'accoutumée, contrairement à la courbe trompeuse des chiffres du chômage, des départements entiers étaient sinistrés par ce fléau. 25 ans après les " nouveaux pauvres ", les travailleurs pauvres faisaient brusquement irruption sur le plateau des émissions tardives, tandis que les charrettes de licenciements n'en finissaient pas.

Les capitalistes financiers procédaient aux fermetures d'usines même si celles-ci étaient viables parce qu'il était beaucoup plus intéressant d'acheter des titres que d'acheter des machines. Les bénéfices arrachés par les gains de productivité extorqués aux salariés en leur garantissant que cette productivité accrue allait sauver l'Entreprise avec un grand E n'étaient donc pas réinvestis dans l'outil de travail ni même la quête de nouveaux marchés mais s'échappaient dans les circuits financiers, dans la libre circulation des capitaux vantée de part et d'autre. C'est de cette façon - spéculer plus pour gagner plus- que les capitalistes palliaient à la baisse des taux de profits, due à la crise de surproduction à l'échelle mondiale.

CAC 40 : -22% en 7 jours !

Il fallait alors s'infuser tous les discours sur la compétitivité, la concurrence libre et non faussée et tous les sacrifices que cela impose. D'un seul coup, tout cet édifice idéologique vole en éclat. Le sacro-saint CAC40 vient de s'effondrer de 22% en cette première semaine d'octobre. Pour comparaison, " En octobre 1987, lors de la fameuse semaine du krach de Wall Street, le baromètre de la Bourse de Paris n'avait dévissé " que " de 11,28%. Et c'est une chute à peu près équivalente, -11,42%, qu'avait enregistré le marché parisien en septembre 2001, après les attaques terroristes aux Etats-Unis. Quant aux corrections de 1998 (krach russe et chute du fonds LTCM), 2000 (explosion de la bulle internet) ou encore de 2002 (faillite d'Enron), elles semblent presque anecdotiques (-9% en juillet 2002, -8,4% en septembre 2002, -5,18% en janvier 2003...) au regard de l'effondrement de ces derniers jours " (article du journal " investir " - investir.fr)

Mais les idéologues de la classe dominante ne tombent pas en rade pour autant. Ils puisent dans le bric-à-brac " théorique " de la social-démocratie les thèmes du capitalisme humanisé, régulé, moralisé. Sarkozy a été le premier à sortir cette vieille rengaine des caciques du PS. Devant l'ONU, le 24 septembre, le chef de l'Etat français se lance dans une diatribe contre les responsable du " désastre " et " ceux qui mettent en danger l'argent des épargnants ", demandant des sanctions, appelant de ses voeux à un capitalisme moralisé, avec des règles du jeu et tout le toutim. Sarkozy se leurre t-il lui-même ? La spéculation, " l'argent roi " comme disait Mitterrand, n'est pas une dérive menée par des aventuriers de la finance. C'est la seule façon pour les capitalistes de tenir...pour un temps, en échappant au laborieux processus de la production, processus dont l'inconvénient majeur au regard des capitalistes est d'aboutir à une baisse continuelle du taux de profit sous le coup des contradictions inhérentes au système, et d'abord et avant tout celles d'une surproduction à l'échelle de la planète.

Balladur " dédramatise "

Dans le film de Denis Robert sur Clearstream, un ancien banquier, Bernard Monod faisait cette réflexion : Le jour où les gens font la relation directe entre leur situation précaire et la finance internationale, ce jour là la finance internationale ne fait plus le poids, elle n'est plus crédible

C'est précisément ce qui est en train de se produire. Le capital financier et ses ressorts sont mis à nu, dépouillés de leurs parures " libérales ". Il n'existe plus aucune fatalité économique pour faire avaler les sacrifices aux salariés, à la petite bourgeoisie et à la population en difficulté.

Alors, les mêmes vont tâcher de monter au créneau. D'un côté Balladur, on l'a vu. Pour " dé dramatiser " " l'économie est aussi fondée sur la psychologie et actuellement la psychologie est dominée par la crainte que telle ou telle banque ne soit mise en difficulté et que les Etats ne puissent lui venir en aide. Cette crainte entraîne la raréfaction du crédit. Il faut donc rétablir la confiance afin que le crédit puisse continuer à irriguer l'économie. Toutes les mesures prises vont dans ce sens. Je pense qu'elles porteront leurs effets ; je constate qu'hier à la Bourse de Paris la situation a commencé à se redresser. ". Nous sommes alors le 8 octobre. Le lendemain, le " redressement " de la bourse est déjà un vieux souvenir. Nouveau plongeon du CAC 40 !

Quand Martine Aubry soutient Sarkozy

Avant même que Balladur ne joue à l'homme providentiel dans les colonnes du Parisien, Martine Aubry, plus royaliste que le roi, claironne : "Les réponses" apportées par le chef de l'Etat "pour garantir les dépôts des Français et pour agir chaque fois qu'une banque est en difficulté sont les bonnes réponses", Pour elle, "lorsqu'il y a crise comme c'est le cas aujourd'hui, le Président de la République agit. Il agit dans l'urgence". Le PS, en tant que "parti républicain responsable", doit alors "l'accompagner dans cette action". Ce faisant, elle émet un voeu pieux ? Elle souhaiterait "que les banques à qui on prête beaucoup d'argent aujourd'hui, qui sont celles qui ont utilisé ce système, puissent rembourser quand ça ira mieux".

Cette socialiste qui brigue le poste de numéro 1 de son parti trouve normal que l'Etat renfloue les banques, pendant que celles-ci continuent, entre autres, à percevoir les intérêts de la dette publique. Dette publique ? Selon Balladur : " le service de la dette dépasse 60 milliards d'euros, c'est-à-dire le montant du produit de l'impôt sur le revenu, et dépasse également 3 % du PIB français. Ce qui veut dire que s'il n'y avait pas le service de la dette, notre budget serait à l'équilibre". Aussi bien, s'il s'agit de défendre les " dépôts des Français ", il faut alors nécessairement recourir aux solutions ouvrières, à commencer par la nationalisation à 100% de toutes les banques, sans indemnités, ni rachat. Pas un sous pour les requins de la finance ! Confiscation des milliards de profits issus de la spéculation. Mais, pour que triomphe cette mesure d'ordre, il faut chasser Sarkozy et non l'accompagner dans son action pour sauver l'oligarchie financière sur le sol français.

Qu'est ce qu' un parti ouvrier anticapitaliste ?

Dans cette action désespérée à bien des égards, il faut s'attendre à toutes sortes d'idées tordues. Dans ce registre, la proposition du Président de l'Assemblée nationale mérite le détour. Amnistie fiscale. Sarkozy désapprouve face au tollé général : Amnistier les grands fraudeurs fiscaux risquerait de donner prise à de toutes autres doléances : annulation des dettes des salariés et des habitants en difficulté auprès des organismes de crédit du genre COFINOGA, levée des interdits bancaires qui frappent les familles aux prises avec la crise économique.

On a peine à imaginer que dans une telle situation, tellement grave, les directions syndicales aient pu concevoir une " journée d'action pour le travail décent " le 7 octobre qui est passée presque inaperçue. Ne leur déplaise, les salariés de l'automobile, des transports et de la construction n'ont vraiment pas besoin, par les temps qui courent, de ces temps faibles de fausse action. Le but de toute grève digne de ce nom est d'arracher les revendications.

Les revendications sont plus simples que jamais : SMIC à 1500 euros net. 400 euros d'augmentation générale pour tous et tout de suite. Echelle mobile de salaires et des prix, pas une seule suppression de poste, pas un seul licenciement, pas une seule fermeture d'usine, d'entreprise, de service.

Pour les satisfaire, un seul moyen : la grève générale ! Si certains connaissent une autre méthode, qu'ils n'hésitent pas à le faire savoir...
Dans cette voie, un nouveau parti ouvrier est nécessaire. Ce parti, bâti sur un plan d'urgence de solutions ouvrières à la crise, se construisant dans la lutte quotidienne, ne peut qu'être anticapitaliste et internationaliste.
Modifié le mardi 14 octobre 2008
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