La Semaine sanglante, 21-28 mai 1871

La Semaine sanglante, 21-28 mai 1871

La Semaine sanglante est le nom des derniers jours de la Commune de Paris, de la répression du premier gouvernement ouvrier et de toutes celles et ceux qui l'ont défendue contre les troupes du gouvernement versaillais. Cette appellation en dit long sur la violence des Versaillais et sur le massacre subi par les communard.e.s. Sa caractérisation tout comme le nombre de mort.e.s sont fréquemment remis.e.s en cause. La Commune fait le point grâce à l'ouvrage de Michèle Audin, La semaine Sanglante. 1871. Légendes et comptes, paru en 2021.

Petit rappel chronologique :

Le 21 mai : les troupes de Versailles entrent dans Paris par la porte de Saint Cloud.

Le 22 mai : les troupes progressent dans l'Ouest parisien.

Le 23 mai : elles prennent Montmartre.

Le 24 mai : les Versaillais investissent le quartier latin.

Le 25 mai : la dernière séance de la Commune se tient à la mairie du 11e arrondissement.

Le 26 mai : les Versaillais s'emparent du faubourg Saint Antoine.

Le 27 mai : l'armée versaillaise entre dans Belleville et Ménilmontant. Au Père-Lachaise, suite à de rudes combats, 147 prisonniers sont exécutés au mur, appelé désormais « mur des Fédérés ».

Le 28 mai : Belleville est investie par les Versaillais ; dernières barricades rue Ramponneau et rue de la Fontaine-au-roi.

Louise Michel évoque cette dernière journée :

« Versailles étend sur Paris un immense linceul rouge de sang ; un seul angle n'est pas encore rabattu sur le cadavre.

Les mitrailleuses moulent dans les casernes. On tue comme à la chasse ; c'est une boucherie humaine : ceux qui, mal tués, restent debout ou courent contre les murs, sont abattus à loisir.

(…) La Commune n'a plus de munitions, elle ira jusqu'à la dernière cartouche.

(…)La Commune était morte, ensevelissant avec elle des milliers de héros inconnus ».

Comptes et décomptes

En 1898, Louise Michel évoque la première bataille des chiffres : « Alors on se souvient des otages, des prêtres ; trente-quatre agents de Versailles et de l'Empire sont fusillés. Il y a dans l'autre poids de la balance des montagnes de cadavres ».

Durant la Semaine sanglante, 100 000 soldats commandés par Versailles investissent Paris et seuls 877 (toutes les sources sont unanimes) décèdent dans les combats.

Pour les morts de la Commune, Lissagaray les estime à peu près à 20 000 morts, Louise Michel à 30 000 quand l'anticommunard Maxime Du Camp n'en dénombre que 6 667 ...

Dans son livre La Guerre contre Paris, paru en 1981, l'historien anglais Robert Tombs, spécialiste de l'armée versaillaise, a revu les décomptes. Si son appréciation de la répression est assez intéressante (il documente le sentiment de la troupe, des soldats fort peu enclins à la répression qui n'aurait été violente et massive qu'en raison des ordres des généraux versaillais), son estimation du nombre de morts est beaucoup plus contestable : entre 10 ou 15 000 morts, qu'il a encore révisé dans les années 2000, pour ne pas dépasser 6 500 !

Fort heureusement, la mathématicienne et historienne de la Commune, Michèle Audin, a fait récemment un énorme travail pour recompter mais aussi retrouver des sources pour s'approcher au plus près du nombre de morts de la Commune. Grâce à une recherche rigoureuse, elle arrive à des chiffres assez proches de ceux de Lissagaray, soit 20 000 morts : 10 000 inhumés dans les cimetières parisiens, à peu près 5 000 dans les cimetères environnants, et environ 5 000 disparus. En effet, la manière dont les communard.e.s ont été tué.e.s fait qu'on ne pourra jamais arriver à les décompter : noyé.e.s dans la Seine ou dans le canal Saint-Martin, enterré.e.s à la va-vite sur le chemin des prisons de Versailles, brûlé.e.s dans les maisons ou laissé.e.s à l’état de « débris humains » ...

Ce massacre empêchant tout décompte des morts, toute histoire documentée, a été décrit par un contemporain engagé, Élisée Reclus, dans La Commune de Paris au jour le jour, à la date du 27 mai 1871 :

« Les gens du quartier commencent à sortir, ils vont prendre connaissance de ce qui se passe au dehors. Ils reviennent avec des récits épouvantables. La berge du fleuve est parsemée de cadavres, les rues aussi. Dans certaines cours, des corps morts sont amoncelés. On emporte des carcasses par charretées pour les enfouir dans des fosses profondes qu’on recouvre de chaux vive ; ailleurs on les asperge de pétrole puis on les brûle ; on a vu un convoi de dix à douze omnibus remplis de débris humains.

Un ami qui nous apporte des renseignements montre les semelles de ses bottines imprégnées de sang…

Des deux côtés de la Seine un filet rouge coule le long des berges. »

Sur le caractère volontairement exemplaire de la répression, aucun doute … le criminel qui l'a commandité, Adolphe Tiers, l'ayant télégraphié aux préfets le 25 mai 1871 :

« Le sol de Paris est jonché de leurs cadavres. Ce spectacle affreux servira de leçon, il faut l’espérer, aux insurgés qui osaient se déclarer partisans de la Commune ».

Si la Commune de Paris a été massacrée, occultée, jamais enseignée dans les livres d'histoire, si les communard.e.s ont été assassiné.e.s et déporté.e.s, l'idée d'un gouvernement ouvrier, d'un gouvernement par les ouvrier.e.s, pour les ouvrier.e.s n'est pas morte et est bien vivante !

Vive la Commune de Paris et vive le socialisme !

28 mai 2021

Modifié le mercredi 30 juin 2021
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