Venezuela : Vers un Tribunal public

Où en est le Venezuela, entre rumeurs de coup d’Etat, arrestation du maire de Caracas, tentatives diverses de museler l’opposition à gauche de Maduro ? Situation chaotique de laquelle l’Impérialisme US voudrait bien tirer les marrons du feu… Extraits d’un entretien avec Carlos Carcione, dirigeant de Marea socialista du Venezuela, publié le 9 avril dans Alternativa Socialista, quinzomadaire du MST d’Argentine.

Carlos Carcione

Que penses-tu de l’escalade d’Obama contre le Venezuela ?

Les 10 et 11 avril se réunira à Panama le sommet des Amériques. Nous pensons que le gouvernement bolivarien doit demander que le premier point du sommet soit l’exigence présentée au gouvernement nord-américain que cesse son ingérence au Venezuela en retirant immédiatement le décret exécutif d’Obama. Le gouvernement du président Maduro est accompagné d’une action diplomatique avec le soutien des pays organisés dans l’Unasur et la Celac. Il compte avec le soutien de son peuple, exprimé par les 6 millions de compatriotes qui se sont prononcés contre le décret exécutif et une réponse internationale favorable au Venezuela, de tous les gouvernements latino-américains, du Mouvement des non alignés, qui, à ce jour, sont 127 plus la Chine.

L’opposition insiste beaucoup sur la détérioration économique et la pénurie d’approvisionnement ?

L’opposition n’a pas de programme pour sortir de la crise. La crise est très forte et elle n’est pas loin de la tourmente. Elle est aggravée par la chute du prix du pétrole. C’est une guerre économique : pénurie programmé, marché noir sur les produits essentiels, contrebande…Mais le centre du processus économique, c’est la crise à cause du virage pris.

Une chose était le modèle de Chavez, le modèle d’économie mixte que nous critiquions alors, mais qui tenait des mécanismes de réassurances qui évitaient cette situation chaotique(…) Mais la réaction du gouvernement de Maduro fut d’appeler à des réunions économiques de paix à négocier, à concéder des augmentations de prix chaque fois que le demandait le secteur privé. Ceci n’a résolu aucun problème, au contraire cela n’a fait que les aiguiser en découvrant la faiblesse du gouvernement. Y compris certaines des dernières lois, des lois prises pour que le Président puisse gouverner par décret sur différents sujets, sont préjudiciables pour la souveraineté du pays, par exemple la loi sur les zones économiques spéciales, ou l’élargissement des niveaux de participation des multinationales pétrolières dans les champs pétrolifères à l’embouchure de l’Orénoque.

Pourquoi dans les années de prospérité, le Venezuela n’a-t-il pas changé du modèle consistant à vivre exclusivement de la rente pétrolière ?

Il y a eu beaucoup de tentatives. En premier lieu s’est constitué un fond d’investissement pour les infrastructures. Dans ce grand pays, tout se transporte par camions. On commença par la construction gigantesque de réseaux ferrés, certains pour le transport des voyageurs sont terminés. Depuis les années 60 on ne construisait pas de nouveaux barrages pour alimenter en énergie électrique et aujourd’hui on en termine un commencé sous Chavez, un barrage très important. (…)

En ces années de prix extraordinaires du pétrole ce sont près de 800 milliards de dollars qui entrèrent dans le pays. Si une partie importante fut investie dans les « missions » et dans les importations, le reste fut dilapidé par des entreprises fantômes facturant des importations fictives pour obtenir des devises, ou par des manœuvres spéculatives avec la dette souveraine etc.

Que devrait-il se faire ?

Le 29 mai nous organisons un « Tribunal public »sur les détournements de fonds de la Nation. Nous mettons en son centre la lutte contre les privilèges, le recensement et les liens entre la bureaucratie et les secteurs privés. Et nous mettrons au grand jour le réseau maffieux qui couvre toute la société vénézuélienne au travers d’un processus de mobilisation pour un Audit Public et Citoyen de tous les comptes de la Nation. A partir de là, on verra qui sont les fonctionnaires qui se sont enrichis avec les détournements de fonds, spécifiquement liés aux importations, qui sont les banquiers qui ont escroqué avec la dette. Une dette illégitime en dollars et que la Banque Centrale vend en bolivars avec un différentiel spéculatif de 100%. De 1998 à 2013 un total de 259 milliards de dollars. !

La récupération du contrôle sur les finances nationales, sur le patrimoine national, sur les comptes publics, le mécanisme de l’audit public, renforcera la lutte contre la crise et pourrait la résoudre positivement face aux capitalistes.

Traduction assurée par Paul Dumas, 14 avril 2015.

Modifié le lundi 04 mai 2015
Voir aussi dans la catégorie Venezuela
Chavez et Maduro en 2011Contre l’interventionnisme et les menaces militaires impérialistes

Nous reproduisons des extraits du texte publié sur le site apporea.org par nos camarades vénézuéliens de Marea Socialista.

La crise au Venezuela atteint un niveau sans précédentLa crise au Venezuela atteint un niveau sans précédent

Contre la faim, la répression, la mort et la décadence sociale, le mécontentement se voit partout. Tous les jours, les mobilisations dans les rues sont énormes. Le phénomène n’a rien à voir...

Où va le Venezuela ?Où va le Venezuela ?

Pour comprendre la situation et lever le voile sur les informations qui sont diffusées dans le monde, inutile d'écouter la coalition de droite (MUD) pro-impérialiste ni la version du président...

Nicolas MaduroAu cœur du marasme, un pôle anticapitaliste de masse prend corps

Le Venezuela traverse une crise économique et politique majeure : le pays miné par la chute du cours du pétrole, dans la mesure où 90 % de ses revenus proviennent de la vente de l’or noir, a...

Dilma Rousseff et Michel TemerL’Amérique latine et les défis de la gauche

L’Amérique latine entre dans une phase de changements, avec de nouveaux processus, de nouveaux gouvernements, l'échec de projets antérieurs et une nouvelle politique des USA vis à vis de la...

Pour un nouveau pôlePour un nouveau pôle

Nous reproduisons ici un article paru dans le numéro 663 de la revue Alternativa Socialista, sur les derniers développements au Venezuela.



HAUT