Le PCF peut-il survivre ?

Le PCF n’est plus que l’ombre de lui-même. On a peine à imaginer qu’il y a quarante ans, il était doté de milliers de cellules d’entreprise, d’une armée de permanents, était à la tête de nombreuses villes et villages et obtenait des scores supérieurs à 20%. Son déclin s’amorçait déjà mais pouvait sembler passager. Le premier choc fut celui du 26 avril 1981 quand son candidat, Georges Marchais, n’obtint que 16% des voix au premier tour des présidentielles. Retour sur cette « spirale du déclin ».

Le PCF peut-il survivre ?

En 1988, le PCF obtint moins de 7% des suffrages aux présidentielles. Mais, en 1995, il sembla qu’il remontait la pente : Robert Hue obtenant 9% des voix.

De 1981 à 1984, le PCF a donc participé au gouvernement Mitterrand Mauroy et s’est associé aux mesures d’austérité et de déréglementation de ce gouvernement. Quelques années plus tard, ses dirigeants jurèrent que l’on ne les y reprendrait plus. A l’Est, les régimes staliniens s’effondraient.

Les chutes électorales

Mais en 1997, le PCF participa au gouvernement de cohabitation Chirac-Jospin. Privatisations en chaîne, déréglementation du temps de travail, inertie face aux plans de licenciements. Cinq ans plus tard, Robert Hue chutait avec 3% des voix, un score inférieur aux deux candidats qui se réclamaient du trotskysme, Laguiller et Besancenot. La cure d’opposition ne lui permit pas de « se refaire ». Aux présidentielles de 2007, sa candidate, Marie Georges Buffet, ne parvint pas à atteindre le seuil des 2% ; un score aussi groupusculaire que crépusculaire.

Front de gauche : tremplin vers l’abîme

Le PCF trouva alors un raccourci : le Front de gauche avec Mélenchon qui venait de quitter le PS en 2008. Mélenchon fut le candidat du Front de gauche et sous cette nouvelle étiquette, obtint 11% en 2012. Mélenchon dut aux militants du PCF sa dynamique de campagne, ses grands rassemblements. Il s’avéra que les dirigeants du PCF avaient joué à l’apprenti sorcier : Mélenchon leur échappa des mains. Nous connaissons la suite et la fin : après avoir été relégué au rôle de figurant dans la dernière campagne de Mélenchon, placé sous l’éteignoir de la FI, le PCF se voit exclu de tout accord électoral en vue des législatives par la FI. Le PCF a pris sur lui de mener campagne entre les deux tours pour le vote Macron.

Suicide ? Non, collaboration de classes

Nous pourrions dire que la direction du PCF a mené une politique suicidaire. Ce serait un peu court. L’appareil central du PCF s’est attaché depuis des décennies à défendre l’ordre établi, c’est-à-dire l’ordre bourgeois. Sans en refaire l’historique, il faut rappeler entre autres méfaits : le vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, chef « socialiste » du gouvernement, en 1956 qui donna le feu vert à la torture et aux camps de concentration en Algérie, mais aussi à la guillotine. Tout un arsenal qui fut « employé » contre les militants du PCF. Il faudrait évoquer le « sale boulot » des ministres PCF des années 80 ou 90 : forfait et budget global hospitalier, acceptation du Plan acier de Mitterrand qui détruisit des dizaines de milliers d’emplois dans la sidérurgie, acceptation de la désindexation des salaires sur les prix qui en dix ans se solda par la perte de 20% du pouvoir d’achat salarié. A la fin des années 90, ce fut J.-C. Gayssot, ministre des Transports qui entérina la séparation de la SNCF en RFF et SNCF, s’opposa à l’interdiction des camions au tunnel du Mont Blanc, imposa avec l’aide de la CFDT l’annualisation du temps de travail des camionneurs, détacha le SERNAM de la SNCF, et privatisa Air France. Dans le même temps, son secrétaire général s’ingénia à gommer toute référence au marxisme et à la lutte des classes, sous couleur de « mutation ». En 1993, un congrès du PCF bannit totalement toute idée « d’abolition de la propriété privée » et lança un nouveau produit « théorique » : la société mixte à dominante sociale.

Victimes de Mélenchon ?

Contrairement à ce qu’avancent les historiens du jour, les chefs du PCF et les présentateurs télé, ce ne sont pas Mitterrand puis Mélenchon qui ont laminé ce parti mais son propre appareil central. En propulsant Mélenchon, ces gens-là n’ignoraient pas à quoi ils s’exposaient. Mélenchon n’a pas grand mérite à avoir utilisé le PCF comme tremplin pour la poursuite de sa carrière : la direction du PCF lui a apporté ce « tremplin » sur un plateau.

Les militants du PCF, dans leur grande majorité, estimaient que leur parti était le « plus à gauche », le plus lié à la vie syndicale dans les entreprises. Ceux sont eux qui, par leur dévouement et leurs réflexes de classe, ont permis au PCF de survivre. La direction du « parti » perd leur confiance. Ils l’ont vue voter l’état d’urgence. Ils l’ont vue leur imposer la « campagne Mélenchon » au travers d’un référendum où les adhérents occasionnels pouvaient voter au même titre qu’eux. En revanche, pour appeler à voter Macron au second tour, la direction du PCF n’a consulté personne.



Luciano Menzi,
10 mai 2017

Modifié le mardi 23 mai 2017
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