Hôpitaux : il y a urgence

Grève des médecins urgentistes" On voit en France des gens mourir faute de soins ", a déclaré Patrick Pelloux, président de l'AMUHF (Association des Médecins Urgentistes Hospitaliers de France), qui a lancé l'appel à la grève illimitée le 4 avril afin de dénoncer l'engorgement des services d'urgences dans les hôpitaux, les fermetures de lits, les restrictions budgétaires et d'exiger des moyens supplémentaires, dont 12 000 postes d'urgentistes, suite à la grève entamée dès le 17 mars par les urgentistes bretons.A l'origine de ce mouvement, le ras-le-bol des urgentistes face à l'engorgement chronique des urgences, débordées 365 jours par an, au point qu'on n'ose imaginer ce qu'il adviendrait en cas de brutale épidémie. Depuis des années, dans la santé comme ailleurs, le désengagement financier de l'État fait des ravages : réduction du budget des hôpitaux, fermetures de lits, quotas d'interventions, les hôpitaux ne savent plus où donner de la tête.

Résultat, le SAMU met parfois plus d'une heure à trouver un lit à certains, comme ce patient atteint d'une hémorragie interne pour qui l'hôpital voisin n'avait pas de place. Un médecin, cité par le Canard enchaîné du 13 avril, explique : " C'est ce qu'on appelle pudiquement la perte de chance. Au lieu de faire cinq jours en réanimation, il en fera dix. Et dans les dix ans à venir, il aura plus de complications ". Et une fois les malades admis à l'hôpital, on les renvoie chez eux le plus vite possible. S'ils rechutent, ils vont aux urgences, faute de rendez-vous avant plusieurs mois.

En outre, pour toute une frange de la population, avancer les frais de santé est impossible, et les urgences sont le seul recours, même pour une bronchite.

85 ans, en gynécologie

Ajoutons les difficultés posées par l'accueil des personnes âgées : seul un hôpital sur quatre dispose de lits en gériatrie, et l'État a baissé l'Allocation Personnalisée d'Autonomie, qui permettait à de nombreux vieux de continuer à vivre à domicile avec des soins adaptés. Bilan : le troisième âge représente 40 % des admissions aux urgences, qui, faute de place, envoient des grands-mères en gynécologie ou forment un partenariat avec les maisons de retraite médicalisées locales pour accueillir les patients.

115 médecins de garde en Île-de-France

Enfin, depuis septembre 2003, cadeau de Mattei aux médecins libéraux après la canicule, les tours de garde, jusque là obligatoires (ainsi que le prévoit le Code de déontologie médicale), sont facultatifs. Concrètement, la majorité des généralistes refuse d'assurer des gardes de nuit ou le week-end : en région parisienne (11 millions d'habitants), seuls 115 généralistes prennent aujourd'hui des gardes. Vous avez besoin d'un médecin après 17 heures ou le week-end ou êtes si mal en point que vous ne pouvez aller jusqu'au cabinet ? Si vous habitez une grande ville, SOS Médecins viendra chez vous. Mais si vous vivez à la campagne ou dans une cité " chaude " où SOS Médecins ne s'aventure pas, appelez le SAMU.

Pour assurer la permanence des soins, les urgences sont donc forcées de traiter des cas qui ne relèvent pas de l'urgence médicale. Le SAMU est même appelé pour des certificats de décès !

Dans une interview, Pelloux explique : " Il y a des nuits où on finit avec 40 malades qui dorment sur des brancards par manque de place ". Là où l'AMUHF estime qu'on ne peut fermer l'été que 5 % des lits, tous les ans on en ferme entre 30 et 50 %.

À l'heure actuelle, sur les 480 millions d'euros promis par Mattei après la canicule de 2003, seuls 150 ont été débloqués, soit, selon le Canard enchaîné, l'équivalent d'un demi-poste de médecin urgentiste par service d'urgences ...
Le très attendu décret ministériel du 8 avril ne revient pas sur le principe du volontariat pour les gardes, mais élargit le recours possible aux réquisitions par les préfets. Douste-Blazy a promis d'être " extrêmement ferme " sur les gardes dans les six prochains mois ...

Le SAMU, secrétaire bénévole des médecins de ville

La CNAM a débloqué 60 millions pour revaloriser les astreintes : la nuit d'astreinte rapporte désormais 100 € au lieu de 50. De plus, le décret généralise le filtrage téléphonique par le SAMU : en appelant le médecin de garde entre 20 h et 8 h, on tombe sur un message qui conseille d'appeler le 15, et le SAMU rappelle le portable du médecin. Un secrétariat aux frais de l'hôpital, donc, qui rapporte ... 60 € de l'heure aux médecins qui acceptent l'astreinte !

Un accord au goût amer

Douste-Blazy a annoncé une rallonge budgétaire de 15 millions pour 2005, somme destinée non aux seules urgences mais notamment à la gériatrie, la pédiatrie et l'hospitalisation à domicile. Le budget des urgences pour 2005 devrait donc atteindre 175 millions, à la répartition encore incertaine.

l'AMUHF a appelé à suspendre la grève suite à la signature au ministère, le 20 avril, d'un accord sur un relevé de conclusions prévoyant notamment l'accueil des personnes âgées dès cet été et le maintien du nombre de lits, ainsi que la " réflexion commune " sur le financement des urgences. On est loin des 12 000 postes d'urgentistes réclamés au départ par l'AMUHF, et les urgentistes bretons, premiers lancés dans la bataille, poursuivent la grève.
Modifié le mardi 21 juin 2005
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