Un spectre hante l’Argentine

Du 18 au 20 juillet s’est tenu un congrès extraordinaire du Mouvement Socialiste des Travailleurs, notre parti frère en Argentine. Ce congrès a eu lieu à un moment très particulier qui voit une crise économique et sociale profonde  ravager à nouveau le pays et une Présidente, Cristina Kirchner engagée dans le paiement des dettes dites  «vautours» qui étranglent et asphyxient le pays. Pour les lecteurs de  «La Commune» voici l’analyse de la situation politique issue de ce congrès et  telle que l’a rapportée un de ses responsables :  Guillermo Pacagnini.

Le débat sur l’actualité et le futur du pays prend de plus en plus d’importance.  Toute discussion qui part d’un problème syndical, de quartier, d’environnement, se développe jusqu’à la question de savoir quelle en sera l’issue. Il y a de nombreuses manifestations, de barrages routiers, de durs affrontements avec les forces de police, des revendications qui englobent  un large spectre de besoins insatisfaits. Il suffit de mentionner les conflits en cours dans la Santé et l’Education, les revendications sur la terre et le logement, pour l’augmentation des aides sociales ou les luttes ouvrières dans les entreprises EMFER-TATSA, Lear et Gestamp.

Kirchner paie la dette au vautours

Alors que la crise mondiale de l’économie capitaliste ébranle l’Argentine, Cristina Kirchner a décidé de continuer sur la voie de l’austérité et du paiement de la dette aux vautours de la finance. Elle veut terminer son mandat en aplanissant le chemin du futur président et ainsi assurer la continuité de la dépendance de l’Argentine par rapport à l’impérialisme, aux usuriers et aux multinationales.
Mais la tâche n’est pas si facile pour ceux d’en haut, car le nombre de luttes ouvrières et populaires ne cesse d’augmenter, et bien qu’il en appelle à la répression contre les manifestations, le front pro-gouvernemental des patrons et des bureaucrates syndicaux, avec le soutien de l’opposition traditionnelle, n’arrive pas à freiner la colère et la volonté de combat.

Une économie gravement malade

La crise est globale : politique, économique et sociale. Alors que Cristina Kirchner,  les gouverneurs et les députés kirchneristes  disent que tout va bien, le gouvernement va de plus en plus mal. Son double discours est de moins en moins crédible.  Le soutien populaire s’effondre. Les mesures économiques, tout d’abord la dévaluation suivie de l’augmentation des prix et des impôts, le plafonnement des salaires, aggravés par le chômage technique, les licenciements et le paiement de la dette au Club de Paris et aux vautours, n’ont fait qu’aggraver la situation entrainant la rupture de larges secteurs qui avaient cru que le kichnerisme était un projet national incarnant un changement face au néolibéralisme.

Collaboration étroite de la bureaucratie syndicale

Récession et inflation sont à la base du conflit social et menace la stabilité que tous ceux d’en haut veulent maintenir. Le spectre d’un nouveau 2001, face à l’affaiblissement du modèle Kirchneristes, pousse ceux d’en haut à promouvoir des solutions de rechange, mais jusqu’à aujourd’hui aucune n’a démontré être un pôle alternatif. C’est pour cela que le Parti Justicialiste, l’Union Civique radicale et tous les partis de droite se gardent de faire des vagues. L’étroite collaboration de la bureaucratie syndicale est indispensable pour freiner  brutalement tous les conflits. C’est ainsi qu’elle tourne le dos aux besoins des travailleurs qui luttent pour les salaires, contre le chômage technique et les licenciements. Mais  un tel échafaudage ne pourra tenir longtemps.

Inflation galopante

La crise sociale est due à l’inflation qui  progresse et  qui pourrait atteindre un chiffre supérieur à 40%. Elle a déjà englouti  les augmentations salariales du premier trimestre. La seconde cause de cette crise c’est l’arrêt de l’industrie, qui frappe l’appareil productif, spécialement dans le secteur automobile, et qui fait place au chômage technique, aux licenciements, et aux baisses des salaires.  Volkswagen vient de mettre au chômage 4000 travailleurs et il y a d’autres cas similaires à Cordoba, Santa Fe et le Nord de Buenos Aires. Au total dans ce secteur 10 000 travailleurs ont été mis au chômage technique et 2000 licenciés.

Les supplétifs

La faiblesse du gouvernement, la nécessité d’approfondir l’austérité et l’impossibilité de freiner les conflits le poussent  aux mesures répressives qui s’expriment dans la loi contre les piquets de grève et dans l’action de la gendarmerie.  La vague de conflits dans le secteur privé en défense de l’emploi et celle qui a débuté chez les enseignants et les fonctionnaires pour l’augmentation des salaires sont une alerte pour le gouvernement.
Il est difficile aux bureaucrates de contrôler ce mouvement en raison de la détérioration de leur  image dans la base.  Mais ils doivent annoncer qu’ils vont se mettre dans la bagarre.  Pour autant aucun ne présente un programme de revendications urgentes du peuple travailleur. Ce qui les préoccupe ce sont les nouveaux dirigeants qui sont en tête des différents conflits, dans un processus qui s’élargit à de nouveaux secteurs du mouvement ouvrier.

Les tâches politiques

Il  est indispensable de préparer en urgence la grève générale et un plan de lutte. Cette grève il faut la préparer d’en bas, avec des réunions de militants et la convocation d’assemblées pour débattre et préparer les actions. Cette grève pour les revendications les plus urgentes, l’interdiction par la loi des licenciements, la nationalisation de toutes les entreprises qui licencient, la répartition des heures de travail sans baisse de salaire, pour un plan économique d’urgence ouvrier, pour  qu’enfin les capitalistes  paient la crise.
A côté des questions soulevées plus haut, les résolutions approuvées dans le congrès du MST montrent les principales tâches que les militants ont devant eux dans la prochaine période : Solidarité internationaliste avec la Palestine, soutien à EMFER et aux autres luttes, aux nouveaux militants combattifs,  embryon d’une nouvelle direction syndicale, impulsion de toutes initiatives contre la dette et son paiement aux vautours de la finance.

Bodart et Ripoll, candidats aux présidentielles de 2015

Dans ces temps de crise et de luttes, de vastes secteurs cherchent une alternative et se tournent vers la gauche, c’est dans ce cadre que le débat sur les élections prend son importance. La présentation de Bodart et Ripoll aux élections présidentielles de 2015 et toutes les candidatures du MST-Nouvelle Gauche vont dans ce sens.


Paul DUMAS, le 30août 2014

Modifié le mercredi 17 septembre 2014
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