20 août 1940, Staline assassine Trotsky...
Le 20 Aout 1940, Léon Trotsky tombait sous les coups de Ramon Mercader à Mexico. Cette date marquait la fin d'une longue traque menée par Staline et ses agents du G.P.U.
La défaite de la Révolution allemande en 1923 - à laquelle ont contribué les erreurs de la direction de Staline - et l'obligation de recourir à la Nouvelle Politique Économique (NEP) ont renforcé l'isolement de l'État Soviétique et accéléré la cristallisation d'une caste bureaucratique qui a de plus en plus mis en avant la défense de ses privilèges.
En Staline elle a trouvé très rapidement la chair de sa chair. L'opposition de Gauche et Trotsky devinrent, eux qui défendaient les véritables idées du marxisme et de Lénine, la cible à détruire. La bureaucratie mena si bien son sale travail que Trotsky fut contraint à son dernier exil en Janvier 1938 (lui qui en avait déjà subi deux sous le règne du Tsar). Il fut d'abord déporté à Alma-Ata au Kazakhstan, près de la frontière chinoise et, à partir de là, il a été expulsé en Turquie, où il a élu domicile sur l'île de Prinkipo, sur la mer de Marmara, près d'Istanbul.
Planète sans visa
Dans le premier temps de son exil turc, Trotsky écrit sa monumentale Histoire de la Révolution russe et entretient une abondante correspondance avec les opposants d'autres pays et en particulier à travers le Bulletin de l'Opposition de Gauche publié à partir de l'automne 1929. Trotsky a commencé à rassembler le noyau d'une Opposition internationale de Bolchéviks authentiques. La perspective de Trotsky selon laquelle Staline allait utiliser le GPU pour détruire son travail a été rapidement confirmée.
C'est vers la fin de son exil turc que Trotsky apprend le suicide de sa fille Zinalda. Son mari, Platon Volkov, un jeune militant de l'Opposition, avait été arrêté et a disparu à jamais. La première femme de Trotsky, Alexandra Sokolovskaya, est envoyée dans un camp de concentration où elle décèdera. Plus tard, un autre fils de Trotsky, Serge, mourra en prison.
La pression de Staline conduit le gouvernement Daladier à ordonner son expulsion de France. Il trouve refuge en Norvège, en 1935. Là, il écrira La Révolution Trahie en 1936. Il va y demeurer 18 mois. Contre lui se dressent deux minorités bruyantes: le petit parti communiste norvégien et le rassemblement national, autrement dit, le parti nazi du major Quisling. Le 5 août 1936, un commando nazi pénètre par effraction à son domicile et y vole des lettres publiées dans le journal Fritt Folk, articles relayés par la presse nazie, l'opération étant de démontrer que Trotsky ne respecte pas ses engagements de non-ingérence dans la vie politique de la Norvège. L'Humanité qui relatera le cambriolage du 5 août parlera « d'une visite des nazis à Trotsky » ! À Moscou, le procureur Andréi Vychinsky dépeint Trotsky et son fils Sedov comme les responsables de l'assassinat de Kirov, préparant celui de Staline, sous la houlette d’Hitler et de sa Gestapo. S'en suivront les procès de Moscou, où Staline mettra à mort les anciens compagnons de Lénine.
L'exil mexicain
La situation de Trotsky en Norvège devient intenable. Les amis de Trotsky, après un long travail, lui trouvent refuge au Mexique. Le gouvernement Cardenas accorde un visa de séjour à Trotsky le 6 décembre 1936. Dès son arrivée au Mexique, Trotsky suscite les attaques répétées du Parti communiste mexicain, relayées par la la droite américaine qui voit en Trotsky l'arrivée d'un « nouveau volcan sur le territoire mexicain ».
Le « boucher de Moscou » continue son œuvre de destruction en semant la terreur et la mort chez les anarchistes, trotskystes et militants de gauche en Espagne.
Mais il lui reste à détruire le centre de l'Opposition de Gauche Internationale basé à Paris sous la direction de Léon Sedov. Staline va faire assassiner Sedov par un agent du GPU infiltré au sein de l'opposition de Gauche, un dénommé Etienne, en fait Mark Zborowski, qui s'était déjà fait la main en France et en Espagne.
Sedov, le fils assassiné à Paris
La perte de Sedov pour Trotsky est un coup sévère porté par Staline. Trotsky parlant pour lui et Natalia : « Pour cent raisons, nos pensées et nos sentiments allaient chaque jour vers lui, à Paris. Avec notre garçon est mort ce qui demeurait en nous de jeune.»
Trotsky, Natalia Sedova et une poignée de proches collaborateurs arrivent au Mexique en janvier 1937. Ils vont séjourner à Coyoacan, dans la banlieue de Mexico, après avoir été reçus officiellement.
Dès l'arrivée de Trotsky, le Parti communiste mexicain a commencé à faire de l'agitation pour que des restrictions frappent Trotsky, afin de l'empêcher de répondre aux accusations portées contre lui lors des procès-spectacle qui se déroulaient à Moscou.
Du pacte germano-sovétique à Ramon Mercader
En 1939, le pacte germano-soviétique va rendre l'assassinat de Trotsky encore plus nécessaire. Cela lui vaut un court sursis car il faut aux « communistes » mexicains et aux agents de Staline dans le syndicat de la Confédération des Travailleurs Mexicains le temps d'expliquer et de répéter que Trotsky, accusé la veille d'être un agent d'Hitler et de la Gestapo, doit être dénoncé désormais d'être un agent de Roosevelt et de la commission Dies (ancêtre du maccarthysme).
Le répit est de courte durée. Le 19 mai 1940, dans La Voz de Mexico, organe central du Parti communiste mexicain paraissait un article qui était en lui-même la préparation politique du meurtre de Trotsky. « Trotsky, le « vieux traitre » comme l'a appelé un jour le camarade Lombardo Toledano, nous fait chaque fois qu'il le peut la démonstration que, plus il vieillit, et plus il devient cynique. Espion sur la feuille de paie des forces réactionnaires, agent de la commission Dies au Mexique(...), Trotsky doit répondre devant les autorités du pays de ses actes anti prolétariens et anti mexicains (,,,) il n'y pas longtemps ce traître, rêvant peut-être du temps où il pouvait organiser son propre procès, jugé par ses propres amis, dans la maison de Diego Rivera, a lancé un défi, qu'un tribunal examine les accusations lancées contre lui d'être un agent de la commission Dies, ce qu'il a lui-même avoué dans ses déclarations politiques. Il est clair que Trotsky cherche une tribune pour continuer son activité nuisible contre les travailleurs du Mexique. Mais le peuple ne lui donnera pas de tribune. En ce qui concerne Trotsky, les travailleurs ont déjà prononcé leur verdict : il faut le chasser de ce pays ! »
À la date où ces lignes sont écrites, le premier commando de tueurs, dirigé par le peintre stalinien David Alfaro Siqueiros, prépare l'attentat du 24 mai 1940.
Dans la nuit du 24, le commando fait irruption dans la maison de Trotsky, tire à la mitraillette sur Trotsky, Natalia et son petit-fils Sieva. Ils ont heureusement le temps d'échapper à leurs assaillants, seul Sieva sera blessé légèrement.
« La vie est belle... »
Après cet échec, la bureaucratie stalinienne ne désarme pas, même si le Parti communiste mexicain nie toute implication dans l'attentat du 25 mai. Un agent infiltré du GPU, connu sous le nom de Frank Jacson (en fait Ramon Mercader), tue Léon Trotsky d'un coup de pic à glace dans la soirée du 20 août 1940. Il sera jugé, condamné à 20 années de réclusion (qu'il purgera) et sera décoré de l'ordre de Lénine dès son retour à Moscou par les staliniens, ses maîtres.
Staline en tuant Trotsky pensait en avoir fini avec celles et ceux qui combattaient pour défendre les acquis de la Révolution d’Octobre. Grave erreur, la preuve en est qu'il continua sa soif exterminatrice jusque dans les camps de la mort nazis et dans les rangs même de la résistance en France. L'acharnement de la bureaucratie stalinienne n'y a rien fait et n'y fera rien. Les héritiers de Trotsky et de l'Opposition de Gauche continuent inlassablement leur lutte contre le capitalisme et ses valets, les résidus du stalinisme et les sociaux-démocrates traitres à la classe ouvrière...
Nous, militants trotskistes, rejoints par des camarades d'autres courants antistaliniens du mouvement ouvrier, continuerons à nous battre pour la Révolution. Nous reprenons à notre compte les derniers mots de Trotsky : « La vie est belle. Que les générations futures la nettoient de tout mal, de toute oppression, de toute violence, et en jouissent pleinement ».
Vive le socialisme ! Vive la révolution d'Octobre !
Vive la Quatrième Internationale !
Francis Charpentier, le 1er septembre 2014
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