« Non à Poutine, oui à l'Ukraine ! »
oui à l'Ukraine ! » | UkraineAprès le 2èmetour des élections présidentielles, le peuple ukrainien a, de toute évidence, voté massivement pour faire partir les bureaucrates de vieille souche, anciens apparatchiks du PC comme Koutchma, l'ancien président, ou Ianoukovitch, son premier ministre. Occupation de la place de l'Indépendance, blocus des édifices publics par la vague orange, électeurs de Iouchtchenko et du mouvement de jeunesse Pora ont fait la une des média durant quinze jours. La Cour suprême a dû se résoudre à se prononcer pour la convocation d'un nouveau second tour pour départager les candidats. Précisions.Tout d'abord, il convient de rappeler qu'en 1991, le peuple d'Ukraine a, lors de l'éclatement de l'URSS, voté à 82 % pour l'indépendance, en dépit d'une indéniable pression des partisans de l'union avec la Russie.l'Ukraine, c'est un pays intégré huit siècles durant dans l'Empire russe, qui a été brièvement indépendant en 1918, avant que Petlioura, le président de la Verkhova Rada (Assemblée nationale) soit chassé en même temps que les Blancs et les Noirs (l'armée anarchiste de Makhno) par l'Armée Rouge. Le peuple ukrainien a été durement traité par la politique stalinienne (au moins 3 millions de morts dans les famines des années 30) et, après la seconde guerre mondiale, il a été tenu en défiance, accusé injustement d'avoir accueilli les nazis à bras ouverts (ce fut le cas de la seule division Vlassov en 1941). En 1954, le stalinien Krouchtchev, ukrainien, cède la Crimée russophone à l'Ukraine sans que quiconque le lui demande. En 1991, l'URSS éclate et les 17 % de russes vivant en Ukraine y restent, bon gré mal gré. Par la suite, on n'entendra pas parler de force centrifuge avant le 2èmetour falsifié de novembre 2004. En revanche, l'Ukraine a récupéré les territoires de l'Ouest pris à la Pologne en 1945 (et novembre1939) par Staline, ainsi que les districts ruthènes et slovaques d'Uzgorod et Mukachevo, à l'extrême Ouest du pays.
Aujourd'hui, le peuple ukrainien a un des plus bas PIB d'Europe et fournit la majeure partie de la main-d'oeuvre immigrée (travaillant généralement au noir) des ex-républiques satellites de l'URSS intégrées à l'UE, comme la Pologne, la république tchèque ou la Slovaquie.
Battre le candidat soutenu par Poutine
La misère et le chômage grandissants (seules les mines n'ont pas été privatisées) expliquent largement le ras-le-bol signifié aux urnes. À présent, les vieux staliniens reconvertis (quoique Iouchtchenko ne soit pas un jeune démocrate) jouent, pour certains d'entre eux seulement, la menace de la sécession du Donbass, la première région industrielle du pays, première région houillère d'Europe, bastion de la classe ouvrière d'Ukraine. À ce sujet, une remarque : les séparatistes sont ultra minoritaires, même chez les russes d'Ukraine, selon un sondage, et même en Crimée, où pourtant la question peut se poser. En fait, Poutine agite une main de moins en moins invisible : le chauvinisme grand russe qu'il flatte exige que la flotte russe de la Mer Noire, qui loue en Crimée le port de Sébastopol pour dix ans, puisse s'y installer de façon pérenne et que l'" étranger proche ", à savoir l'Ukraine, reste dans la mouvance du Kremlin, comme la Biélorussie. Mais l'impérialisme US veut, lui, que les réformes s'accélèrent et que l'Ukraine devienne l'arrière-cour de l'UE à des conditions économiques plus favorables au " marché ". De même, la classe ouvrière a déjà éprouvé la " gestion Iouchtchenko " sous la présidence de Koutchma il y a cinq ans (1999-2001) Qui a vu une différence entre les deux candidats ? Pourtant, il y en a une, et de taille. Elle ne tient pas aux programmes qui se ressemblent de fait comme deux gouttes d'eau. En effet, comment ne pas voir que les masses d'Ukraine ont majoritairement le sentiment qu'en se débarrassant de l'actuel premier ministre pro-russe Ianoukovitch, elles infligeraient une défaite cuisante à leur ennemi principal, Poutine, quitte à voir ensuite. Là encore s'exerce une loi de l'Histoire selon laquelle les masses, n'en déplaise aux idéologues, procédent toujours par éliminations successives. Ce sentiment s'est exprimé avec force dans les manifestations de ces dernières semaines et dans leur principal mot d'ordre : " Poutine, non, Ukraine, oui ! " En ce sens, l'élan révolutionnaire qui monte est incontestable. À suivre attentivement.
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