Les plus mauvais jours
Bolivie : l'origine d'une crise politiqueEvo Morales a gagné les élections présidentielles de décembre 2005 avec 54 % des voix. Avec ce score, il écrasait sans appel l'ensemble des partis des anciens Présidents, Sánchez de Losada et Carlos Mesa, chassés par les insurrections populaires de 2003 et 2005. Le processus révolutionnaire en cours se concentre sur trois points d'une importance capitale pour la population : la nationalisation des hydrocarbures et des mines, la réforme agraire, l'Assemblée constituante souveraine.Dix-neuf morts et plus de quatre-vingts blessés parmi les mineurs et la population, tel est le bilan des affrontements qui ont eu lieu les 5 et 6 octobre entre les mineurs " coopérativistes " et ceux de la mine nationalisée de Huanuni. Evo Morales a déclaré que c'était là ses " plus mauvais jours ". Durant ces deux dernières semaines, une vague de rumeurs de coup d'État militaire s'est soudainement déclenchée ; l'oligarchie de Santa Cruz a menacé de se séparer de la Bolivie ; une grève des transports a eu lieu, ainsi qu'une importante manifestation convoquée par la Centrale Ouvrière Bolivienne et réclamant la nationalisation des mines.Cela fait longtemps que les mineurs du privé, appelés " cooperativistas ", tentent de récupérer ce qui reste de la Comibol,La Comibol (Corporation minière de Bolivie) a été créée le 31 octobre 1952 dans le cadre du décret de nationalisation des mines pour leur exploitation. En 1985, de nombreux sites miniers ont été fermés et tout le reste privatisé par le gouvernement aux ordres du FMI. La Comibol était morte. Le gouvernement a alors poussé les mineurs à exploiter individuellement les puits abandonnés. Ils sont devenus des " cooperativistas ". Morales vient d'annoncer la reconstitution de la Comibol. la grande entreprise minière de l'État bolivien. Depuis les années 1990, leur nombre a augmenté et ils se sont diversifiés. Beaucoup de coopératives sont devenues des sociétés capitalistes, avec des salariés et une haute rentabilité.
Pour la nationalisation totale des mines
Mais ces dernières années, les mines de l'État, que l'augmentation du prix de l'étain a rendues très rentables, ont été aussi relancées. Entre 2002 et 2006, Huanuni a produit 76 millions d'euros, avec un bénéfice net de 21 millions d'euros. Cette richesse a conduit au conflit avec les " cooperativistas " privés à qui l'on a fait croire qu'ils allaient devenir propriétaires de cette mine. Walter Villaroel, dirigeant des " cooperativistas " et nommé ministre des Mines par Evo Morales dès sa prise de fonction, les a appuyés et encouragés. C'est la raison de ce sanglant affrontement entre mineurs privés et mineurs de l'État défendant leur emploi et la richesse de la nation. La COB, les mineurs et les enseignants ont organisé une mobilisation à La Paz pour exiger la nationalisation intégrale de l'industrie minière. Evo Morales a été contraint de démettre son ministre, instigateur des affrontements.
Cette très grave crise n'est que le reflet de ce qui se prépare sur tous les terrains.
En mai, avec les décrets de nationalisation partielle du pétrole et la réforme agraire, le gouvernement a obtenu sa cote maximale de popularité. Mais depuis, le processus pour la Constituante est quasiment paralysé, l'oligarchie lui impose la règle des deux tiers (pour qu'une loi soit adoptée elle doit obtenir deux tiers des suffrages). La nationalisation du pétrole et du gaz est en crise. Le décret du 1er mai établissait que l'État conserverait 80 % du pétrole produit. Mais même ça n'a pas été obtenu, car les multinationales ont tout verrouillé en dépit de la volonté de négociation du gouvernement. La réforme agraire n'a pas beaucoup avancé non plus. Le mois dernier, le gouvernement s'est heurté aux paysans " cocaleros " parce qu'il voulait limiter les cultures de coca, comme l'exigent les États-Unis. À Santa Cruz, Tarija, Beni et Pando, les quatre départements où est condensée la richesse pétrolière, de sérieux plans séparatistes existent. On y parle de " République de l'Orient ".
" Capitalisme andin " ?
Alors que l'oligarchie redresse la tête, le projet de " capitalisme andin " d'Evo Morales est totalement incompatible avec ce qu'exigent les masses : la mise en oeuvre de " l'agenda d'octobre ", nationalisations, réforme agraire et Assemblée constituante souveraine.
l'occupation des terres de l'oligarchie par les paysans pauvres, l'exigence de nationalisation totale portée par la COB, les mineurs et les enseignants, par l'occupation des gisements et le contrôle ouvrier sur les mines comme à Huanuni, par le rejet de la règle des deux tiers et pour une Assemblée constituante souveraine, telle est la voie sur laquelle mineurs et paysans de Bolivie s'engagent avec leurs organisations.
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