Le terrorisme barbare des États

Les peuples sont pris en otage et bombardés, massacrés de toutes parts dans une guerre qui n’est pas la leur. L’objet de la guerre : le partage de ce qu’ils appellent une « région » entre rapaces impérialistes et gendarmes locaux. Comme toujours en pareil cas, les bellicistes invoquent ce « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », qu’ils piétinent du talon de leur botte. « Ils » n’ont que le mot paix à la bouche mais leur « paix » est la paix des cimetières. Notre premier mot est : halte à la guerre, halte à tous les bombardements et massacres.

Le terrorisme barbare des États

Les tout derniers événements survenus, tant en Syrie qu’en Irak, se dressent contre l’idée même une paix juste et durable, c’est le moins que l’on puisse en dire. Pour ce qui nous concerne ici, ils montrent que l’impérialisme français, « nouveau tigre des exportations d’armes » 1 , compte parmi les grands « va-t-en-guerre ». Leur but n’est pas de « libérer la Syrie » de la férule barbare de Bachar al Assad ou de Daesh, mais de dresser de nouveaux barbelés, de nouvelles zones d’influence, en préservant le régime en place dans ce qu’il restera de la Syrie. Ce qui vient de se produire nous le confirme.

Trump - Hollande - Hamon,
fauteurs de guerre

Le 4 avril 2017, la ville de Khan Sheikhoun, au nord-ouest de la Syrie a subi un raid aérien qui aurait largué du gaz (sarin et chlore) sur la population, faisant 86 morts, parmi lesquels 30 enfants, et plus de 160 blessés [Source AFP,le 06/04/2017 à 05:58]. Le caractère chimique de l’attaque sera confirmé par Médecins Sans Frontières sur le terrain, qui évoque des « symptômes concordants » 2 . Bachar El Assad est alors immédiatement désigné responsable par les puissances impérialistes et leurs médias.

Poutine et le régime syrien nient alors farouchement avoir perpétré l’attaque chimique, arguant qu’il s’agirait d’un dépôt d’armes chimiques des « rebelles » qui aurait explosé. Mais pour les États Unis, la France et l’Occident, il n’y a pas l’ombre d’un doute, il s’agit bien, selon eux, d’un crime de guerre de Bachar al Assad.

Les États unis « ripostent » alors avec une extrême diligence et lâchent 59 missiles Tomahawks dans la nuit du vendredi 7 avril 2017 sur la base d'Al Shayrat (Homs) d’où serait partie l’attaque. Ceux qui pensaient que Trump était « contre la guerre » voulue par sa concurrente Clinton, comprennent sans doute mieux à présent l’intox de ce président US. Les « politiques » qui, en France, doutaient de la politique étrangère de Trump, se félicitent des frappes US. L’un des premiers à applaudir n’est autre que Benoît Hamon, dans le droit fil de Hollande. Il dit : « Il est de notre devoir de réagir face à la barbarie extrême ». 3

Poutine - AL Assad, Trump-Hollande,
les deux pinces de la même tenaille

Que le bourreau Assad soit responsable ou qu’il s’agisse d’une énième manœuvre yankee, c’est encore et toujours la population syrienne qui, comme les populations d’Irak et du Yémen, est sacrifiée. Chacune des parties, Daesh, Bachar-el Assad et les occidentaux, ont utilisé, à différentes reprises des armes chimiques dans leur sale guerre ; leurs larmes de crocodiles pour les « gens innocents, des femmes, des petits enfants et même de beaux petits bébés » , à d’autres ! Au reste, Les Hamon, Hollande, Macron et autres s’inquiètent-ils de ce que la population civile endure à Mossoul, où « la France » est engagée ?

Mossoul ou : la guerre dans la guerre

L’attaque contre Mossoul, la plus grande ville du nord de l’Irak, aux mains de Daesh depuis près de 3 ans, a été lancée en octobre 2016 par la coalition menée par les États-Unis, à laquelle participe la France avec, au sol, les forces fédérales irakiennes et une batterie d’unités militaires aux intérêts divergents.

Après avoir repris la partie Est de Mossoul, « l’offensive » se poursuit dans les quartiers ouest de cette ville immense.

À Mossoul - comme à Ramādī, Falouja ou Tikrīt, Alep, etc. - le même schéma meurtrier contre la population est à l’œuvre.

Dans cette ville de Mossoul en ruine, les habitants, qui n’ont pu fuir dans les camps de réfugiés ou n’ont pas succombé sous les bombardements de la coalition, les exécutions, les snipers ou les voitures piégées de Daesh, n’ont plus rien, ni eau, ni nourriture, ni médicaments.

L’attaque est menée, selon les sources officielles du gouvernement irakien 4 , par des unités militaires sous l’autorité d’un conseil politique au sein duquel on trouve des représentants du gouvernement irakien, du gouvernement régional du Kurdistan irakien 5 et de la coalition internationale dirigée par les États-Unis.

Sur le terrain, les milices présentes sont nombreuses : milices chiites (« la mobilisation populaire »), les Kurdes irakiens ( Peshmergas), les unités de l’armée turque aux côtés des milices sunnites, les milices chrétiennes, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Chacune des forces en présence livre une guerre dans la guerre pour le contrôle des territoires repris à Daesh : les Kurdes du PDK de Massad Barzani 6 , cherchent à étendre leur territoire, le gouvernement Irakien cherche à les chasser pour s’y rétablir, tandis que les tensions s’exacerbent entre d’un côté les Yézidi alliés au PKK, dont ils constituent une nouvelle branche armée (YBS) et, de l’autre, le PDK de Barzani. La Turquie, alliée du PDK, a armé une milice sunnite pour pouvoir intervenir à l’écart de la coalition internationale en cas de besoin, avec pour seul objectif de contrer le PKK pour éviter qu’il ne se renforce.

Les milices chiites, quant à elles, financées par l’Iran via le ministère de la défense à Bagdad, suivent une stratégie propre.

Du côté des grandes puissances impérialistes, « la force de frappe » est constituée par les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, la Belgique, les Pays-Bas, l’Australie, le Danemark et le Canada. En plus des missiles visant Daesh et tous les civils se trouvant dans les parages (« Entre le 8 août 2014 et le 12 juillet 2016, la coalition a mené 13803 frappes aériennes, dont 9273 en Irak et 4530 en Syrie 7 »), ces grands humanistes fournissent également les armes, l’équipement et la formation aux forces engagées dans la coalition arabo-occidentale. Les tensions de plus en plus vives entre des groupes aux intérêts très divergents et surarmés rendent les marchands d’armes très confiants pour l’avenir : le Moyen-Orient va rester une « zone de croissance » pour longtemps… Pour les populations, c’est une tragédie faite de sang, de chaos, de barbarie sans fin.

Irak : 37 années de guerre sans fin

L’Irak est en guerre ininterrompue depuis 1980 (Iran-Irak) et subit un embargo extrêmement dur des puissances occidentales depuis l’intervention de l’ONU en 1991, dont les plus pauvres sont les premières victimes. Le régime baasiste de Saddam Hussein, au travers d’une violence d’État impitoyable, avait favorisé la résurgence des tribus. Cependant, c’est bel et bien l’intervention américaine de 2003 qui a exacerbé les clivages confessionnels (Constitution d’octobre 2005) et transformé les partis politiques en partis religieux et ethniques 8 . Les guerres confessionnelles qui, inévitablement, en ont découlé (2005-2008) entre chiites et sunnites, ont fait des centaines de milliers de morts et ont abouti à la purification ethnique des quartiers autrefois mixtes de Bagdad, au profit des chiites. Cela n’avait jamais existé auparavant en Irak !

Poutine- Trump – Hollande : hors du Proche et Moyen-Orient

À chacune de ses nouvelles interventions, l’impérialisme américain et ses valets provoquent un nouveau chaos, tout en alimentant la poudrière par ses ventes d’armes et le terrorisme. La Russie de Poutine n’est pas en reste. Le régime barbare du boucher al Assad non plus dans ce jeu horrible.

Ni la défense du peuple irakien, ni même Daesh ne sont les enjeux de la bataille de Mossoul, seuls les intérêts capitalistes des puissances occidentales le sont, les puissances dites « régionales » cherchant au passage à en ramasser les miettes et à en tirer quelques marrons du feu.

Sous un déluge de feu, de boue et de sang, les populations tentent de survivre ou de trouver abri et asile « ailleurs », au péril de leur vie. Il manque cruellement un mouvement anti-guerre mondial qui mène campagne et manifeste partout pour l’arrêt de tous les bombardements, de toutes les interventions directes et indirectes US, russes, françaises, UE ; le retrait de toutes les troupes impérialistes, de toutes les bases militaires du Proche et Moyen-Orient.



Julie Charmoillaux,
10 avril 2017

1. https://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/0211609818823-la-france-nouveau-tigre-des-exportations-darmes-2051714.php
2. http://www.msf.fr/presse/communiques/attaque-khan-sheikhoun-syrie-victimes-vues-msf-presentent-symptomes-concordant-av
3. https://www.mediapart.fr/journal/international/070417/la-campagne-presidentielle-bousculee-par-la-syrie
4. http://www.noria-research.com/enjeux-politiques-de-bataille-de-mossoul/
5. Le KRG (Kurdistan régional Gouvernement) est autonome, son président est Massad Barzani, également chef du parti démocratique du Kurdistan (PDK).
6. Le PDK a permis à la Turquie de s’imposer dans la coalition contre l’avis du gouvernement Irakien. Erdogan s’est alors opposé à la présence des milices chiites et du PKK. Le PKK qui s’est battu aux côtés des Yézédis massacrés par Daesh, lors de la bataille de Sinjar. Sur cette bataille voir : http://www.akb.bzh/spip.php?article1168&lang=fr
7. https://fr.wikipedia.org/wiki/Coalition_arabo-occidentale_en_Irak_et_en_Syrie
8. DUPONT (A.-L.) et ali. - Histoire du Moyen Orient, du XIXe siècle à nos jours, ed Armand Colin, coll. U, Paris, 2016.

Modifié le vendredi 14 avril 2017
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