Un succès bien fragile

État espagnolSacrifiant tous ses alliés, effectifs ou potentiels, amoindrissant d'autant sa marge de manoeuvre pour les temps difficiles que d'aucuns annoncent, la victoire à la Pyrrhus du PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol) a mis un terme à l'une des campagnes électorales les plus ternes de ces trente dernères années. Il coupe par ailleurs tous les ponts de négociations en emprisonnant ses interlocuteurs basques radicaux, interdisant leur participation aux élections législatives. Une bonne nouvelle pour la classe ouvrière : l'effondrement de Izquierda Unida, bras du stalinisme dans l'Etat espagnol...Exit IU (Izquierda Unida), ERC (Eskerra Republicana Catalana), EA (Eusko Alkartasuna), PNV (Partido Nacionalista Vasco), et autres partis régionalistes, tous réduits à une peau de chagrin et sanctionnés par leurs électeurs potentiels de la classe ouvrière, pour le premier ou de la petite bourgeoisie pour le reste.

Izquierda Unida laminée.

C'est ainsi que IU, avec seulement 3,80%, le plus bas pourcentage de son histoire et deux députés (il en avait cinq), a perdu son groupe parlementaire, laminé jusqu'au point de revenir au score de ses débuts, en 1986, au-dessous de la barre du million de voix. Il est vrai que son programme électoral n'était guère alléchant pour les travailleurs, éclipsant les revendications les plus pressantes de la classe ouvrière comme la garantie du droit au travail avec l'abolition du travail précaire, véritable fléau de l'Etat espagnol, de la fléxibilité tous azimuts ou la question des salaires menacés par une hausse des prix galopante, alors que le chômage, attisé par la crise des hypothèques immobilières, commence à faire ses premières victimes dans le bâtiment.

Le problème national persiste

Les gains électoraux de Zapatero s'appuient sur la Catalogne et le Pays basque. Le PSC (parti socialiste catalan) et le PSE (socialistes basques) ont averti Zapatero du danger qu'il y aurait à faire alliance avec deux partis nationalistes : CIU et PNV, qui seront leurs adversaires aux prochaines élections régionales. En effet, face aux propositions du PNV, de procéder à un preréférendum sur le droit du peuple basque à l'autodétermination, Zapatero vient d'annoncer son intention de réformer le statut d'autonomie basque, comme cela s'est fait en Catalogne et le président basque, Ibarretxe lui a répondu que "le PSOE et le PNV sont condamnés à s'entendre". Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais la réalité est très différente puisque l'interdiction des partis et l'impossibilité de négocier avec l'ETA et avec les partis nationalistes radicaux, dont il vient d'emprisonner tous les dirigeants, ne fait qu'aggraver encore plus la situation et remet au premier plan le problème national qu'il avait pourtant placé comme le premier objectif politique à résoudre au cours de son précédent mandat.

A qui profite le crime?

La possible victoire du PP se profilant à l'horizon grâce à la politique pro-capitaliste de J.L. Rodriguez Zapatero, appuyée par le banquier P. Botin (Banco Santander) qui en a fait lŽéloge, c'est l'attentat providentiel du 7 mars, juste à la veille des élections, contre un syndicaliste de l'UGT et ancien conseiller municipal du PSOE à Mondragon, ville ouvrière gouvernée par la formation Acción Nacionalista Vasca (nationalistes basques radicaux affectés par la loi des partis qui leur a interdit la participation aux élections) qui a donné le coup de pouce nécessaire au gouvernement Zapatero pour se maintenir, vaille que vaille, aux commandes d'une monarchie de plus en plus chancelante. Au lendemain des élections, Zapatero, talonné par le PP, avec seulement 400 mille voix et 6 sièges de plus aux Cortés, se retrouve sans majorité absolue et réduit à quémander des alliances à des formations nationalistes, basques ou catalanes qu'il a lui-même contribué à affaiblir, en suivant à la lettre les injonctions du PP, l'accusant de se livrer aux nationalistes. Mais c'est vraisemblablement au PP franquiste, lui aussi en crise, qu'il devra proposer son "Pacte d'Etat" afin de garantir la stabilité et la survie de la monarchie au service de laquelle il est prêt à se sacrifier, comme en d'autres temps.
Seule la mobilisation de la classe ouvrière, unie avec ses organisations, comme c'est le cas dans la grève des chauffeurs d'autobus de Barcelone et de Madrid qui se poursuit depuis plusieurs semaines, pourra faire échec aux desseins des banquiers, de l'Eglise et de leur monarchie en banqueroute.
Modifié le mercredi 02 avril 2008
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