Un virage à droite ?

Chili : après les éléctions présidentiellel'élection de Sebastian Pinera, ancien partisan de Pinochet à la Présidence du Chili, après vingt ans de gouvernement de
la Concertacion (alliance entre la démocratie chrétienne et le parti socialiste) marque-t-elle un tournant à droite de ce pays
? En fait, moins de 62% des Chiliens en âge de voter ont participé à ce scrutin, gagné par 230 000 voix d'avance par ce
milliardaire, propriétaire de la ligne aérienne LAN, de chaînes de supermarchés, et d'un canal de télévision... contre le candidat
de la Concertacion, Eduardo Frei, qui, en 1973, avait soutenu le coup d'Etat de Pinochet.
Après la victoire de Pinera et la fin
du mandat de l'actuelle présidente,
Michelle Bachelet, la
Concertacion perd le gouvernement du
Chili, après vingt années de pouvoir.
Dire que la victoire de Pinera signifie
un tournant à droite implique de caractériser
que les gouvernements de
Bachelet, et de ses prédécesseurs
Lagos ou Frei ont été de gauche. Rien
de plus faux. La Concertacion a été la
championne de l'application d'une politique
néo libérale et de droite durant ces
vingt années de gouvernement.
Pendant la période de croissance de
l'économie chilienne, le fossé entre les
riches et les pauvres n'a cessé de s'approfondir
en favorisant les grands
entrepreneurs et les multinationales.
Cette politique s'est développée sur la
base de la Constitution fasciste dictée
par Pinochet, toujours en vigueur. La
réforme de Frei n'avait apporté que
des changements de détail, et ses partisans
n'ont cessé de cohabiter pendant
ces vingt dernières années au
Congrès, à la Cour suprême, à la
Banque Centrale, au Conseil
Constitutionnel, dans les Forces
armées avec ceux qui viennent de
gagner aujourd'hui la Présidence. C'est
pour cela qu'au Chili, durant ces
années, non seulement l'inégalité sociale
a augmenté de façon exponentielle,
mais également les milliers de militaires
et leurs complices, bourreaux du peuple
chilien, continuent de jouir d'une totale
i m p u n i t é .
Plutôt qu'une victoire de Pinera, qui a
obtenu moins de 30% des voix des
citoyens en âge de voter, il s'agit d'une
défaite de la Concertation qui, dès le
premier tour, a perdu plus de 40% de sa
base électorale, qui a soit voté pour
Miguel Enriquez, député PS, (20% des
exprimés) soit pour Jorge Arrate, PC,
(6% des exprimés) ou plus largement
s'est abstenue.


Changement dans la continuité




Il en est tellement ainsi que Pinera, luimême,
préfère parler de " changement
dans la continuité ", et que " ce sont de
vieilles lunes que les distinctions entre
droite et gauche " tandis que le gouvernement
de Bachelet se voit féliciter par
tous les patrons et les organismes
représentants de l'impérialisme (FMI,
ONU, OEA, etc.).
Ce n'est pas pour rien que durant ces
années, la concentration du pouvoir
économique, les privatisations, la soumission
de l'économie chilienne au
Traité de Libre Commerce et la perte de
la souveraineté nationale dans les
accords sur l'exploitation des mines,
des ressources hydrauliques, de la plateforme
maritime et les traités militaires
et de sécurité de l'hémisphère sud avec
l'impérialisme n'ont cessé de se développer.
Le travail précaire s'est généralisé,
ainsi que les bas salaires, tandis
que le chômage n'a cessé de se développer.
Seul un petit secteur des travailleurs
a pu accéder à la négociation
collective, tandis que la législation du
travail n'a pas changé sur l'essentiel
depuis la dictature.

Le caractère privé de l'éducation s'est
approfondi. Même chose dans la privatisation
de la Santé, des services
publics et des logements sociaux, etc.
La criminalisation et la répression de
luttes se sont accentuées sous le gouvernement
socialiste de Bachelet qui a
systématiquement recouru à la police
sans la moindre hésitation pour réprimer
les manifestations. Il en a été ainsi
contre les étudiants qui en 2006 ont fait
reculer le gouvernement sur la loi de
l'éducation, contre les représentants
des peuples indigènes ou des habitants
de Santiago combattant contre le système
de transports collectifs.


Quelles perspectives




Certains disent qu'avec cette victoire
commence un tournant à droite dans
toute l'Amérique latine, mettant l'accent
sur un axe se constituant entre les gouvernements
de Colombie, du Pérou et
de Pinera au Chili. En fait, la réalité des
luttes des peuples d'Amérique latine
nous indique, au contraire, une intensification
de la bataille contre les plans des
gouvernements capitalistes soumis à
l'impérialisme. Au Chili, le deuxième
tour des élections fut précédé par une
importante grève minière : 6000
mineurs de cuivre à Chuquicamata ont
obtenu gain de cause sur leur revendication
salariale. Sombres perspectives
pour les tenants de l'ordre capitaliste.



Elie Cofinhal,

29 janvier 2010
Modifié le lundi 22 février 2010
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