Le Brexit ouvre la voie

Jacques Cotta est journaliste, et réalisateur de documentaires à la télévision. Il est aussi écrivain, sur des thèmes comme les travailleurs pauvres et les services publics. Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits de  l’article qu’il a mis en ligne sur le site La Sociale pour le Brexit. Nous partageons, dans les grandes lignes, son analyse

Le Brexit ouvre la voie

Au lendemain du vote des ressortissants britanniques en faveur du Brexit, nous assistons à un déferlement de déclarations qui visent à nier l’évidence. En 24 heures une pétition spontanée recueillerait plus de 3 millions de signatures pour qu’un nouveau vote soit organisé. […]

Micros-trottoirs et manipulation

La manipulation va bon train. Jusqu’à l’absurde. Aujourd’hui en Grande Bretagne comme hier en Irlande ou en France, les télévisions toutes chaines confondues s’en donnent à cœur joie. Micro trottoir après micro trottoir, on entend dire par des correspondant envoyés en mission dans les rues de Londres que « l’heure est au regret », que « les votants pour le Brexit n’avaient pas compris que cela signifierait la sortie de l’UE » (sic), que « nombreux sont ceux qui ont voté pour le Brexit sans en vouloir la victoire » (re sic), que la majorité des votants pour le « leave » désirait seulement que « reamain ne l’emporte pas de façon trop écrasante »(re, re sic).
Evidemment la réalité est beaucoup plus simple.

Le vote des couches populaires et des électeurs du Labour party

Le vote des britanniques pour sortir de l’UE est d’abord celui des couches populaires, concentré dans les municipalités frappées par l’austérité. La crise politique qui touche le Labour en pleine décomposition n’est pas à chercher ailleurs. Ses électeurs, militants et sympathisants ont massivement voté contre la direction du parti en se prononçant pour le « Leave ».

Le vote des britanniques est une défaite majeure de toute l’oligarchie qui n’a pas lésiné pour faire pression en faveur du maintien dans l’UE. Outre Cameron et Corbyn qui sur place ont tenu le rôle que les sommets de Bruxelles attendaient d’eux, Obama, Merkel, Hollande, et autres connaissent une défaite à la hauteur de l’engagement qui a été le leur dans la campagne [...] Le vote des britanniques est une défaite de la city et des banques. […]

Une défaite de l’Union européenne

Le vote des britanniques est enfin une défaite de l’UE sur tous les plans dont celui d’actualité qui concerne la politique européenne migratoire qui à travers l’accord avec la Turquie vise à renvoyer chez eux les centaines de milliers de migrants qui fuient les guerres provoquées par les grandes puissances. La question posée par le Brexit est politique. Tous les gouvernements, toutes les forces de « droite » comme de « gauche » sont affolées par l’irruption du peuple anglais sur la scène de l’histoire. […]Le « risque » comme l’indiquent tous les commentateurs réside dans l’idée qui pourrait être donnée à d’autres peuples d’Europe de reprendre aussi en main leur propre destinée. […]La question de la souveraineté populaire, droit des peuples à décider de leur propre destinée, à maitriser leur propre avenir, est incontournable et les menaces économiques, les pronostics les plus noirs, les difficultés annoncées –parfois à juste titre- ne peuvent rien y changer.
Dans tous les pays d’Europe le rejet de l’Union Européenne est chargé d’un contenu précis. En France, la loi El Kohmri qui se propose de liquider le droit du travail et les organisations syndicales, de nous ramener des décennies en arrière, n’est que l’application des directives européennes, comme cela a été le cas dans d’autres pays d’Europe[...]. Alors que les différents parlements nationaux passent leur temps à transcrire dans leur droit national les directives et traités européens, les oppositions à leur politique posent comme une question objective l’abrogation des traités européens, la rupture avec la BCE, l’Euro et la souveraineté monétaire, les pactes d’austérité et de responsabilité dictés par l’union européenne.[…]

Les peuples veulent reprendre leurs affaires en main

Contrairement à toute la propagande qui veut assimiler le Brexit en Grande Bretagne, ou des décisions similaires ailleurs, dans d’autres pays européens, à un repli sur soi, guidé par un sentiment xénophobe et arriéré, un refus d’ouverture aux autres, la rupture avec l’union européenne signifie pour les peuples la possibilité de reprendre en mains leurs propres affaires, de décider pour ce qui les concerne en toute liberté, sans que les choix ne soit dictés pour servir des intérêts qui leur sont étrangers. A l’union européenne, construction politique faite pour servir le capital financier, étrangère à l’Europe des peuples, la Grande Bretagne pourrait ouvrir la voie à une Europe des nations libres, décidant librement entre elles des coopérations, des échanges, des projets communs. Quelle autre voie en effet pour relever les grands défis en termes d’écologie, d’emploi, de développement, les grands défis humanitaires posés à l’Europe dans son ensemble que celle de la souveraineté populaire et nationale dans tous les domaines ?

Jacques Cotta,
28 juin 2016

Modifié le samedi 09 juillet 2016
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