Le gouvernement des Six-Cents-Jours (1)
La Vème République vient de se fracasser sur le mur des abstentions lors des élections municipales, des 15 mars et 28 juin derniers. Véritable grève du vote, l’abstention massive est un des principaux enseignements politiques : 60% au 2ème tour, 55% au premier, un record absolu depuis 1959. Nous le savons bien : les abstentionnistes du dimanche sont les grévistes du lundi. Ainsi, la lutte des classes et l’affrontement qui en découle sont d’une actualité prégnante.
Défait dans les urnes, Macron n’a jamais été aussi faible. Tout comme le sont l’ensemble des partis. N’en déplaise aux commentateurs de salon, il n’y a pas eu de « vague verte ». Tous les partis sont lourdement frappés par l’abstention y compris les Verts. Ce scrutin montre une chute de LR, certes contenue, qui perd notamment Marseille et Bordeaux ; quant à LAREM, le parti de Macron, il a été incapable de la moindre victoire significative, n’obtenant que 10.000 conseillers municipaux sur les 520 000 mandats ouverts au scrutin ; le PS n’est arrivé que péniblement à sauver Lille et Paris ; pas de vague RN qui perd 4 de ses mairies, le gain de Perpignan étant une victoire à la Pyrrhus ; le déclin du PCF se poursuit inexorablement avec les pertes de bastions historiques comme Saint-Denis et Champigny tandis que la FI vivote à peine, menant une carabistouille électoraliste, tantôt alliée, comme à Ivry, avec le PS et les Verts contre un maire PCF, ou de mèche avec le NPA, comme à Bordeaux. Face à cet écroulement général, ce sont en effet les Verts, mais seulement avec 15 à 20 % des inscrits qui remportent la mise dans de grandes villes (Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Tours, Poitiers, Grenoble…). Autant de victoires en creux, loin de la « vague verte » revendiquée !
Face au chaos politique et à la déroute des deux partis qui vertèbrent la Vème République, Macron, comme l’y autorise la Constitution, a trouvé la victime expiatoire en la personne d’Edouard Philippe, réélu maire du Havre. Celui qui a mené toutes les politiques anti-ouvrières et antisociales depuis 3 ans est usé jusqu’à la corde, incapable de continuer à gouverner.
Jupiter n’est plus, vive Macron le Bonaparte au petit pied. Et son « gouvernement des Six-Cents Jours » n’est rien d’autre qu’un attelage dont le mandat est de tenir jusqu’en 2020. Avec qui? Un nouveau Premier ministre, Jean Castex, ex-conseiller de Sarkozy, accompagné par Bruno Lemaire maintenu à l’Economie et Gérald Darmanin promu à l’Intérieur. Pour affronter la crise économique et politique, Macron est donc allé chercher Castex, l’homme du « dialogue social », le sauveur, celui dont il estime qu’il peut étouffer la colère populaire en gestation.
Faible, isolé, Macron doit désormais pour gouverner s’appuyer sur ceux qu’il dédaignait il y a peu : les élus locaux et les « corps intermédiaires », au premier rang desquels les confédérations bureaucratiques syndicales. Et cela tombe bien, tous sont prêts à l’aider. C’est ainsi qu’en pleine crise sanitaire, les directions syndicales CGT CDFT, FO, CFTC et DGB ont publié une déclaration de soutien au plan de relance Macron-Merkel, un plan foncièrement anti ouvrier à l’échelle européenne. C’est ainsi aussi que Macron a pu compter sur la signature des syndicats CFDT, FO et UNSA lors du Ségur de la Santé, présidé par l’ex secrétaire générale de la CFDT, Nicole Notat.
Pour les confédérations, rien ne change ; elles s’engouffrent dans cette alliance comme elles l’ont fait pour la loi Travail, pendant le mouvement en Gilets Jaunes et le projet de réforme des retraites : négocier à tout prix, attacher le sort de la classe ouvrière aux politiques menées par la bourgeoisie.
Repousser les offensives capitalistes, défendre les intérêts des travailleuses/travailleurs et de leurs familles, refuser le chômage et la misère passe par la reconquête de l’indépendance des organisations de la classe ouvrière, notamment syndicales, afin de rompre une fois pour toutes avec Macron et exiger son départ.
DEHORS MACRON !
Wladimir SUSANJ
14 juillet 2020
(1) C’est Emmanuel Macron lui-même qui a employé cette formule le 8 juillet 2020 pour qualifier son nouveau gouvernement. En référence au gouvernement des Cent-Jours de Napoléon 1er, du 20 mars 1815 au 22 juin 1815 ?
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