Qui attend, et quoi ?

Qui attend, et quoi ?

Macron est donc chef d’État depuis huit mois. Il se targue encore de lancer le pays dans la « destruction créatrice ». Au besoin, il provoque et il s’exhibe. Puis, il reçoit un parterre où picorent les 140 plus grands patrons, dans ce lieu public qu’est le château de Versailles. Il cherche à choquer ostensiblement, il s’applique à être le produit de synthèse de ses deux prédécesseurs, Hollande et Sarkozy. Il n’innove en rien, il continue ce que ces deux-là avaient commencé. Ainsi, l’ordonnance « travail » est à peu de chose près la copie de l’avant-projet de la loi El Khomri que Hollande et Valls avaient dû « arrondir ». Toutes les autres mesures prévues étaient déjà dans les tuyaux, depuis plusieurs années. Les avant-trous étaient déjà percés. Mais, pour des masses considérables de gens, tout est devenu insupportable, intenable car effectivement l’œuvre des gouvernements successifs est une destruction sociale. Nous assistons à l’étouffement sournois des libertés démocratiques et à la tentative de restaurer un « État fort », c’est-à-dire une dictature militaro-policière d’abord insidieuse puis de plus en plus affirmée. C’est aussi l’implosion des hôpitaux, les médecins sous haute surveillance qui sont sommés de ne plus faire de visites à domicile. C’est l’implosion de la Sécurité sociale et du droit du travail. C’est la mise au pas de la jeunesse et la mise en pièce du droit aux études, à la qualification professionnelle et, bientôt, la précarité « tout au long de la vie ».

Des militants, des syndicalistes, se sentant comme impuissants face à la pluie de coups durs qui tombe sans cesse, se disent « Mais qu’est-ce qu’attendent les gens pour se révolter, pour bouger ? ». Certains renvoient l’image d’un peuple de moutons toujours prêts pour la tonte. Des gens, il y en a de toutes sortes et, d’ailleurs, nous en faisons partie. La plupart n’attendent plus rien. Cela ne veut pas dire qu’ils entendent s’en tenir là. Pour l’heure, ils constatent que les hauts dirigeants syndicaux se laissent volontairement complaisamment « macroniser ». Macron n’a pourtant aucun pouvoir hypnotique. Il n’est pas non un «

Bonaparte » s’élevant « au-dessus de la mêlée ». Il est juste un homme de paille qui doit se faire croire à lui-même qu’il

existe, les médias bien mangeants lui renvoyant leur miroir menteur pour qu’il puisse s’y mirer. Face à Macron, les haut-responsables syndicaux ne proposent aucune action sérieuse. Ils optent pour un syndicalisme de « propositions »… aux patrons et au pouvoir. Aux travailleurs, ils ne proposent rien du tout, même plus de « journées d’action » sans action. Ils vivent aussi dans la crainte d’être « débordés ». Pas question pour eux de sonner le tocsin pour sauver les hôpitaux, d’en appeler à toute la population et manifester ainsi la puissance du nombre, la puissance de la masse, tous ensemble, au même moment, sur une question aussi vitale qui touche tout le monde.

Qu’est-ce qu’ils attendent, EUX ? Ils composent, ils parlementent, ils proposent et le roi en papier mâché dispose, sous la férule des grands capitalistes financiers. De temps à autre, moustaches en bataille, ils haussent les sourcils. En un éclair de lucidité, Martinez dit à propos des réfugiés : « il faut les accueillir, tous, tous ». Nous l’applaudissons. Cela fait du bien à entendre, en effet. Mais, propose-t-il une campagne active avec toutes les associations pour le retrait de la circulaire Collomb, circulaire de la honte ? Pourquoi ne pas joindre l’acte à la parole ? De peur de rompre avec Macron ? De peur que cesse ce « dialogue social » d’intérêt patronal où le syndicat devient « partenaire » et « conseiller social » du pouvoir capitaliste ? Ce « dialogue social », nous le savons, est un nœud coulant autour du cou de ces Mailly-Martinez, une laisse pour attacher les syndicats et une muselière qu’il se mettent eux-mêmes sur la bouche, pour ne pas dire : abrogation des ordonnances et de la loi El Khomri – retrait de tous les projets de réforme en cours !

Jusqu’au moment où les masses ne pourront pas « attendre », ni supporter plus longtemps. Elles apprennent déjà à compter sur leurs propres forces. L’heure est à la rupture avec Macron, son gouvernement capitaliste et sa cour des miracles parlementaire, minoritaire dans ce pays.


3 février 2018

Modifié le mardi 13 février 2018
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