Porte- Flingues

EditorialSi la situation de millions d'hommes et de femmes n'était pas aussi dramatique, il y aurait tout lieu de rire du spectacle que nous offrent chaque jour les personnels politiques de la droite et de la gauche officielle. On se croirait dans une cour de récré. A droite, Debré énerve fortement les sarkozystes. " Il faut cogner Debré " : c'est la consigne dans les couloirs de l'UMPLe Parisien du 16 septembre. Et, du coup, Brice Hortefeux, ministre délégué aux Collectivités locales et homme de Sarkozy accuse Debré d'être atteint de " psittacisme " : " c'est une tendance à répéter mécaniquement les choses. C'est généralement bénin pour les enfants ". Debré ne s'est pas laissé démonter et a répliqué : " Ce que dit Brice Hortefeux m'est égal. Il est le porte-parole, le porte-flingue d'autres personnages.Il devrait plutôt s'occuper de son propre ministère et soutenir le gouvernement auquel il appartient. " Tiens-toi le pour dit ! Quant à Sarkozy, il a choisi la Convention sur l'Europe de l'UMP, tenue les 23 et 24 septembre dernier, pour enfoncer le clou et exacerber la zizanie. " J'ai décidé de ne plus faire le moindre compromis. Sur la Turquie comme sur le reste, je ne céderai rien ". On sait que l'écrasante majorité de l'UMP est opposée à l'entrée de la Turquie dans l'UE, pendant que Chirac est pour et fait donner son gouvernement en ce sens. Pour Bayrou : " il faut reconstruire un pays au bord de la banqueroute " (journées parlementaires de l'UDF). l'un de ses lieutenants, Jean-Louis Bourlanges, est encore moins charitable et chrétien avec Villepin. Rappelant que le Premier ministre a commis il y a quelque temps un ouvrage intitulé : " Le cri de la gargouille ", Bourlanges n'a pas manqué de déclarer : " Je ne confonds pas la voix de la France avec le bruit d'un écoulement d'eau dans une canalisation médiévale " Sur LCI, le 24 septembre, à l'émission de Michel Field. Le même dirigeant de l'UDF, décidément en verve, a rappelé, toujours à propos de Villepin, ce mot de Chateaubriand qui parlait de ces personnages victimes d'un " haussement de stature " Synonyme contemporain : péter plus haut que son cul. Voilà Villepin habillé pour l'hiver.

A gauche, le spectacle est tout aussi réjouissant. Fabius se fait conspuer à la Fête de l'Humanité, samedi 10 septembre ; Ségolène Royal se porte candidate pour 2007 tout en déclarant qu'un retour de Jospin serait le " signe d'un rendez-vous manqué pour notre génération " ; Fabius, du coup, se moque, devant cette pléthore de candidats recensés du PS : " Pourquoi pas une présidence tournante ? " ; et Jack Lang, autre candidat putatif exige de Hollande qu'il soit désigné porte-parole officiel du PS. Enfin, le PCF n'est pas en meilleure posture, sa crise interne s'approfondit. Voilà pour la débandade et la crise de représentation politique. Pendant ce temps, Cegetel annonce 721 licenciements, Philips, 470 dans son usine de Dreux, Sony prévoit 10 000 suppressions d'emplois dans le monde, IBM 14 500 et Hewlett-Packard veut licencier 1240 salariés en France (14 500 mondialement). Aussitôt, Villepin déclare (Les Echos du vendredi 23 septembre) : " Il serait normal que Hewlett-Packard rembourse les aides publiques spécifiques dont elle a pu bénéficier ". Villepin n'a pas inventé l'idée, il la reprend au PCF, dont c'est une revendication formulée maintes fois. Ainsi, Braouzec, député PCF de Seine-Saint Denis, déclare : " Ca serait effectivement un minimum (...) C'est une vieille revendication d'un certain nombre d'organisations ". André Vallini, président (PS) du Conseil général de l'Isère (un des sites concernés par les licenciements de Hewlett-Packard) embraye de son côté : " c'est une menace qu'il faut agiter, bien sûr". Il n'y a que Fillon, ex-ministre UMP et aujourd'hui sénateur de la Sarthe pour casser le bel unanimisme et déclarer : " Juridiquement, je pense que ce n'est pas possible. Et surtout, il faut faire attention à ne pas rendre de plus en plus inhospitalier le territoire français pour les investisseurs étrangers (...) ". Il a, ce faisant, le mérite de révéler que la proposition Villepin n'est que poudre aux yeux. Les cadeaux faits aux patrons par les gouvernements qui se sont succédé depuis 25 ans, en particulier à coup de milliards d'euros d'exonération de charges (c'est-à-dire de cotisations à la Sécurité sociale) ne reviendront pas, c'est une évidence. Proclamer l'inverse, c'est vouloir mystifier les salariés. Et d'ailleurs, Villepin, le PS, le PCF et consorts réclament-ils le remboursement par le groupe français Pernod-Ricard, qui licencie 500 salariés en Pologne, des aides qu'ils ont obtenus du gouvernement polonais ? Idem pour Peugeot, qui annonce plus de 200 licenciements en Angleterre ?

Dans le même interview dans Les Echos, Villepin prône le " patriotisme économique " : après le " produisons français ", le " licencions français " ?

Ce sont les salariés de la- SNCM qui ont raison. Après une semaine de grève contre la privatisation de l'entreprise, ils poursuivent la grève pour la défense de leur avenir. Un seul mot d'ordre : non à la privatisation.

Dans ces conditions, dans cette situation, il y a l'appel des cinq confédérations syndicales à la journée d'action du 4 octobre prochain ; pour les salaires, contre le Contrat Nouvelle Embauche (CNE), pour la protection sociale. Certes, nous y serons et nous préparerons cette journée du 4 octobre. Mais cette journée sera-t-elle une sempiternelle journée d'action sans lendemain ou ouvrira t-elle la voie à l'appel unitaire, au " Tous ensemble " interprofessionnel. ?

Nous sommes à la croisée des chemins.


Modifié le mercredi 19 octobre 2005
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