De l’agonie à la chute

Nous n’avions pas besoin du déballage sordide d’une Trierweiller, courtisane tombée en disgrâce, pour savoir que Hollande n’aimait pas les pauvres. Toute sa politique, et pas seulement depuis qu’il est Président, mais comme dirigeant du PS, comme député, comme «élu» est une politique intégralement au service de la défense de la propriété privée des moyens de production, bref, du Capital. Et ce constat est tout aussi valable pour ses pairs, au gouvernement, au Parlement et ailleurs. Nul besoin donc de coucher avec tous ces gens-là pour le savoir !
L’élément nouveau, qualitatif de cette affaire, c’est que, à l’évidence, l’homme, poignardé dans le dos dans sa vie privée n’avait pas besoin  de ça puisqu’il  qu’il était déjà bien seul, isolé, affaibli, le genou à terre après les résultats électoraux en forme de Waterloo et les scandales à répétition de ces derniers mois, dont le tout récent, celui du député Thévenoud, ce pauvre homme affligé de phobie administrative au point de ne pas payer loyers et impôts.
Bonaparte le tout petit  est nu. Le régime bonapartiste est un régime dans lequel les classes dirigeantes abdiquent leur pouvoir politique pourvu qu’un homme, appelé à la rescousse pour régler leurs conflits internes et encamisoler la classe ouvrière réussisse dans cette voie. Et écrase la classe ouvrière et ses organisations.  de Gaulle a finalement échoué le 27 avril 1969, au référendum par lequel il voulait imposer des institutions corporatistes. L’agonie du bonapartisme commence là.
 Certes, les institutions de la Ve République permettent, faut-il le rappeler, à un homme seul de gouverner un pays: il est le chef des armées, il est le premier magistrat de France, il peut gouverner par ordonnances ou à coups de 49 ter. Il peut dissoudre le Parlement si bon lui chante. Seulement, cet homme «providentiel» a tout de même besoin d’une base sociale qui le soutienne et d’une organisation pseudo-politique à sa botte. Louis Bonaparte, futur Napoléon III avait sa «société du 10 décembre», ramassis de lumpen, de la lie de la société. Il organisait des banquets où il nourrissait tous ces gens qui clamaient alors « Vive Napoléon, vive le saucisson» mais il avait d’abord et avant tout une base sociale, la petite paysannerie, qui le soutint lors de son coup d’Etat. de Gaulle avait la caste militaire des officiers, les «pieds-noirs» et même un petite partie du prolétariat en la personne des mineurs du Nord (avant que finalement, ils engagent la grande grève de 1965); sans oublier le soutien des staliniens bien entendu.
 Par la suite, sa défaite marquera les étapes de l’agonie de la Ve république mais, même lors de l’élection de Hollande, une certaine couche sociale petite-bourgeoise, intellectuels et enseignants en particulier ainsi qu’une couche populaire non négligeable lui ont permis de gagner tant Sarkozy était vomi.
Aujourd’hui, il n’a plus de base sociale pour le protéger, donc protéger ces institutions nées d’un coup d’Etat, en 1958. Le mouvement de masse, profond de l’abstentionnisme est passé par là. C’est ce que ne comprennent pas les bas du front qui voient dans l’abstention de la passivité et qui ont même tendance à vouloir culpabiliser ceux qui font la grève du vote. La petite-bourgeoise jusqu'à présent attentiste, voire un peu complaisante encore, se détourne, sous les coups de l’austérité qui la frappe aussi durement. Quant à la droite, elle est en décomposition avancée elle aussi.
Le tout petit Bonaparte est nu et Trierweiller a juste porté l’estocade à un homme à terre. Pas glorieux mais ce sont leurs affaires.
Il reste à Hollande sa «société du 10 décembre» à lui, ses courtisans, ses affidés, ceux qui sont par exemple passés de la Révolution permanente à la gamelle permanente, les Cambadélis, Dray, Rebsamen, ce courageux ex-LCR qui voit les chômeurs comme des ennemis,  tous ces renégats qui vont tôt ou tard fuir cet homme dès qu’ils vont constater que pour le saucisson, ça devient dur. Car il y a un proverbe basque qui dit: « chien qui te mord mordra à nouveau». Dit autrement, la société du 10 décembre de Louis Bonaparte avait la Marseillaise comme hymne. Celle de Hollande a repris, elle, la chanson de Dutronc: « je ne sais faire qu’un seul geste, je retourne ma veste»
La lutte de classes, dont le mouvement abstentionniste et les grèves depuis deux ans, est la cause première de cette crise. Cette même lutte de classe balaiera très prochainement ces institutions et ceux qui s’y accrochent comme des cafards affolés. Qui en doute ?

Pedro Carrasquedo
10 septembre 2014

Modifié le mercredi 17 septembre 2014
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