La débandade
« c’est pas moi, c’est l’autre ! »
Du Benallagate au Macrongate
La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 57 – mercredi 25 juillet 2018
« C’est pas moi, c’est l’autre ! » disent Collomb et le Préfet de police devant la Commission des lois du Parlement. Collomb, le fidèle entre les fidèles, l’homme des basses œuvres, qui a sans doute subi l’ablation de la dignité, se défausse sur l’Elysée. Macron n’a-t-il donc point vécu que pour cette infamie ? Benalla qui selon les porte-paroles LREM a trahi la confiance de Macron et Collomb qui pointe du doigt Macron, lequel ne semble voir rien d’autre que des « dysfonctionnements » et n’étant pas censé se préoccuper du « micro-management » de ses services ; Il s’éclipse, tandis que l’hystérie collective s’empare de l’Assemblée. Nous sommes pris dans l’un des moments cruciaux de la chute du régime de la Ve République…
« Les théâtres comme les hommes sont soumis à des fatalités » 1 avait noté Balzac. Les régimes politiques, aussi. La révision constitutionnelle avait pour objet de faire glisser la 5ème république vers une forme moderne de monarchie absolue. La voilà pour le moins compromise. Le doute dans la capacité de Macron à faire « encore des réformes, toujours des réformes » s’est durablement installée. Mélenchon s’en est enquit : « l’autorité de l’État – est engagée » 2 . Le cœur de l’État, ses fonctions dites « régaliennes », police et gendarmerie, révèle sa crise profonde.
Macron est seul car il n’a pas d’appui dans la société civile qu’il prétendait incarner, comme nous l’avons-nous même noté à plusieurs reprises, y compris au soir de la Coupe.
Ses premières réformes ont été adoptées grâce au concours des leaders syndicaux confédéraux voire fédéraux dont les actions étaient l’auxiliaire de la Concertation, même lorsque cette Concertation ruinait leurs espoirs de « contreparties ». Par contrecoup, CGT et FO sont agitées de convulsions : le sommet social avec Macron, la veille de l’explosion de l’affaire Benalla, les tractations de ces dirigeants avec le MEDEF, considéré comme un « partenaire », placent ces dirigeants sur le grill. Hors l’argument fallacieux consistant, après avoir verrouillé toute initiative de la base, à mettre leurs compromissions sur le dos des salariés qui « ne luttent pas », ces leaders sont bien en peine de justifier leur coopération « conflictuelle » avec Macron et ses officiers d’ordonnance.
Les événements de Nantes ont donné un premier avertissement aux uns et aux autres, Macron, d’une part, les leaders syndicaux nationaux, d’autre part : les jeunes et les salariés n’attendront plus très longtemps les initiatives « confédérales » ou « fédérales », la colère, la révolte, l’indignation accumulées seront plus fortes que les verrous, les blocages, les fausses actions, les simulations de marées des appareils syndicaux et de l’opposition « protestataire ».
Un quart d’heure avant que ne surgisse l’affaire Benalla, on ne savait pas que cette crise allait surgir. Eh bien, comme l’avait noté Rosa Luxemburg : un quart d’heure avant la révolution, nul ne sait pas qu’elle va commencer. Jusqu’à ce que survienne un mouvement spontané, on ne croit pas possible un mouvement spontané.
Les expertologue de l’anticapitalisme, façon Besancenot, nous assurent que « le rapport des forces est défavorable » et que rien n’est possible tant qu’il n’y a pas de « débouché politique ». Dans la vraie vie, l’absence de « débouché politique » est, le plus souvent, le point de départ des premières explosions spontanées .
Evidemment, ce que nous venons d’énoncer n’a pas valeur de pronostic fatal. Les prémices d’une crise révolutionnaires existent, elles s’inscrivent encore en filigranes dans toute la situation et au premier chef, dans la crise politique dont l’affaire Benalla est un des révélateurs et un des accélérateurs.
Cette crise affecte le cœur de l’État, ses corps policiers et militaires, sa haute administration.
La crise du sommet de l’État et la crise sociale poussent les masses populaires et la jeunesse vers une action révolutionnaire , la politique des hautes sphères syndicales les poussent à compter d’abord sur leurs propres forces et, à chaque fois qu’elles le font à une petite échelle, elles l’emportent, comme ce fut le cas lors de la grève des Catacombes ou lors de la grève à l’Hôpital du Rouvray en lien avec les autres salariés et la population rouennaise. Ces grèves partielles font école tandis que la grève dite « intermittente » imposée aux cheminots devient l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire si on veut arracher les revendications et défendre les statuts.
La crise politique, telle que nous la vivons, telle qu’elle se noue, agit comme un accélérateur de processus. Une brèche s’ouvre : celui qui y avait été présenté par les mêmes médias qui le chargent aujourd’hui, comme un Jupiter fort, habile, capable de faire passer n’importe quelle réforme se présente à présent dans son plus simple appareil, lâché par de hauts fonctionnaires, tel ce directeur de l’ordre public et de la circulation qui « affirme ne pas avoir été informé de la présence d’Alexandre Benalla avant la manifestation du 1 er mai mais seulement le lendemain » 3
En cette fin juillet caniculaire, chacun ouvre son parapluie. Ce directeur insiste : « M. Benalla ne bénéficiait d'aucune autorisation pour être présent en tant qu'observateur sur cette manifestation ". Et, il « balance » : « c'est Laurent Simonin, le chef d'état-major de la DOPC, qui a donné l'autorisation à Alexandre Benalla de venir en tant qu'observateur. Laurent Simonin fait partie des policiers mis en examen. »
Ce qui frappe la population, c’est l’arbitraire-roi et arrogant, la violence de l’Elysée et donc du « prince » lui-même : violence verbale et violence tout court.
Pour un grand nombre de citoyennes et de citoyens qui ne veulent pas devenir des « sujets », ce qui frappe, c’est l’asphyxie de toute vie démocratique, à l’image d’un Précieux ridicule hissé à la tête de l’État par 43% des électeurs inscrits et dont le parti, omnipotent au parlement, représente, à tout rompre, 18% des électeurs inscrits.
Avant que ne surgisse, tout à coup, l’affaire Benalla, les sondages plaçaient déjà Macron sur le grill, les médias bien ordonnés exprimant l’état d’esprit des classes dirigeantes se montraient de plus en plus sceptiques et acides. Par son attitude fielleuse, Macron portait ombrage à la sacro-sainte fonction présidentielle à laquelle il a été hissé, comme chacun sait, par défaut.
Cette crise politique qui enfle encore donne un relief particulier à la nécessaire rupture avec Macron, rupture de toute concertation avec lui au nom de nos organisations syndicales, la nécessaire annulation de toutes les réformes de destruction sociale, le nécessaire retrait du projet de révision de la constitution et, immédiatement :
Macron, démission ! Maintenant !
25 juillet 2018
Dernière minute
Macron commence à parler après une éclipse de plusieurs jours, pour s’auto-désigner « responsable »…mais pas coupable ! il est la « victime », victime de la trahison de ce Benalla à qui il avait accordé toute sa confiance, dit-il (et qui le suivait comme son ombre), Victime des erreurs de sa « république exemplaire »… du Palais de l’Elysée. Victime, il fustige « la république des fusibles (qu’il a fait sauter) et la haine » (que son fiel génère), s’imaginant sans doute que « la meilleure défense, c’est l’attaque », tactique que l’on emploie aussi quand « la défense » ne peut convaincre… Puisqu’il dit lui-même être LE responsable, alors qu’il s’en aille !
Macron avait son nervi, il avait déjà sévi et « bavuré » avant le 1 er mai. Ensuite, l’Elysée a continué à le protéger et d’assurer sa promotion fulgurante. Ce sont ces faits qui sont « inaltérables » 4
1 Honoré de Balzac. Illusions perdues. Folio classique. Page 290.
2 https://www.bfmtv.com/mediaplayer/video/affaire-benalla-c-est-l-autorite-de-l-État-qui-est-engagee...
3 https://www.lci.fr/politique/en-direct-affaire-benalla-emmanuel-macron-souhaite-que-ce-genre...
4 https://www.francetvinfo.fr/politique/emmanuel-macron/agression-d-un-manifestant-par-un-collaborateur-de-l-elysee...
- Il y a quelque chose de pourri au royaume de Macron
Un pouvoir en marche pour sa réélection qui n’en finit pas de traîner des casseroles judiciaires … Une classe politique en décalage total avec la clairvoyance des masses … la fin de régime...
- « La colère sociale est là » ...
A la question ; « Craignez-vous un printemps social ? », Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, invité au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI du 31 janvier 2021, avait répondu : « Non, je...
- Nous sommes en guerre … contre Macron !
Leurs élections valent plus que nos vies ! Au plus haut niveau de l’État, toutes et tous savaient, aucun.e n’a rien fait ! C’est l’aveu de l’ex-ministre de la santé, Agnès Buzyn, fait...
- Pour en finir avec Macron !
La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 124 - Jeudi 30 janvier 2020 Après 56 jours d’un conflit historique, c’est peu dire que Macron et sa politique sont rejetés par une grande majorité...
- PAS DE RETRAIT, PAS DE TRÊVE ! PAS DE RETRAIT, PAS DE RENTRÉE !
La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 123 - Samedi 28 décembre 2019 Déjouant tous les pronostics, la détermination et la pugnacité des grévistes restent intactes au 24ème jour de grève...
- Contre Macron et sa réforme des retraites : grève générale !
La démonstration de force des salariés contre la réforme des retraites engagée le 5 décembre se poursuit et certains secteurs très déterminés comme les transports publics (SNCF, RATP),...