Élections pestilentielles. Ouvrons les fenêtres, de l’air !
À deux mois du premier tour des élections du roi sans couronne, nous avons une certitude : le prétendant qui accédera au trône n’aura aucune autorité efficiente et devra tenter de naviguer à vue dans les décombres de la Ve République. L’échiquier est renversé et plusieurs pièces maîtresses sont placées hors d’état de nuire. Et tous ceux qui se sont livrés à des calculs de comptoirs doivent sans cesse remanier leurs formules. Idem, pour ceux qui ont spéculé sur l’idée que Hamon ou Mélenchon pourraient aller « plus loin » qu’ils ne le veulent, en adoptant comme cri de ralliement « l’abrogation de la loi El Khomri ».
Il y a quelques jours, les sondages tendaient vers une victoire de Macron. Las ! Le rejet que suscite ce DRH de la politique le replace derrière Fillon. Les mêmes sondages donnaient à Hamon une bonne longueur d’avance sur Mélenchon. Ce n’est pas Fillon qui rattrape Macron, mais Macron qui a une crevaison. Ce n’est pas Mélenchon qui rattrape Hamon, mais Hamon qui roule avec le frein à main serré.
Le spectre des 20 millions d’abstentionnistes
Dans une semaine, le classement des « partants » sera sans doute remanié. Au reste, les sondages reposent sur un non-dit : qui « ne se prononce pas » ? Qui déclare qu’il n’entrera pas dans l’isoloir ? Qui, parmi les personnes interrogées manifeste l’intention de déposer un bulletin vide dans l’urne ou un bulletin criblé de graffiti ? Questions à ne surtout pas poser. Dès lors, toutes ces « projections » en pourcentage se présentent comme une équation à une inconnue. Il n’empêche, dans les têtes farcies de politique institutionnelle, un spectre rôde, celui des vingt millions d’abstentionnistes des dernières Régionales.
L’épouvantail Le Pen - FN
Commence alors le chantage : « Au secours, Le Pen arrive ». Chaque jour, Cambadélis assène que « Elle » risque de « passer ». Le Parti communiste lui emboîte le pas. Le jeu, en lui-même, est risqué. C’est le pari de la peur, dernier ressort pour entraîner vers les urnes des millions d’électeurs, qui rejettent en bloc tous les partis liés aux institutions de la Ve République et à sa corruption interne et, parmi ces formations, celles qui tout en jurant vouloir défendre « la veuve, l’orphelin et l’ouvrier du rang », tournent le dos à la défense des droits, garanties collectives acquises par les travailleurs et à l’exigence de l’interdiction du travail précaire et d’un vrai travail, un vrai salaire, un CDI pour toutes et tous. Il est évident que ces « mauvais présages », martelés en boucle, n’auront d’autre effet que d’encourager ceux qui hésitent à voter Le Pen à le faire, puisque ses adversaires répètent à l’envi qu’elle a ses « chances ». Quelle meilleure façon de le galvaniser.
Les exigences du combat contre Le Pen-FN
Le combat contre le FN ? Bien sûr ! Mais ce combat a ses exigences. Prétendre le livrer sur le terrain du chauvinisme, de l’islamophobie, revient à se placer sur le terrain choisi par le FN. Prétendre le livrer sur le terrain de la morale, c’est « trou de balle » 1 aurait raillé Jean-Paul Sartre. Contre le FN, ce n’est pas un « combat d’idées » qui se livre.
À Marine Le Pen, enfant gâtée du « système », nous opposons comme à Fillon, Macron et les tenants d’une politique de collaboration de classes (Mélenchon - Hamon), une politique ouvrière indépendante qui commence par la satisfaction des besoins immédiats de la population et la satisfaction des revendications essentielles de la classe ouvrière et de la jeunesse, c’est-à-dire un plan d’urgence et de défense de la population travailleuse et pauvre et de la jeunesse, rompant avec la Ve République et avec l’Union européenne, lequel intègre la défense des droits démocratiques des étrangers vivant sur notre sol, la défense des libertés religieuses des habitants musulmans. Le principe : « à travail égal, salaire égal » et donc :des papiers pour tous ! Fermeture des camps de rétention !
En effet, si le nombre de logements HLM est porté à hauteur des besoins, qui viendrait parler de « priorité nationale » à un toit décent ? Si les immeubles et logements vacants sont réquisitionnés, qui viendrait tenter d’opposer les sans abris « français » aux réfugiés, migrants ?
Les allées et venues de Le Pen, Philippot et autres comparses du FN, ne sauraient nous faire oublier que Hamon, très ouvertement et Mailly, très clairement, nous expliquent mollement que l’abrogation de la loi El Khomri n’est pas à l’ordre du jour. Aussi bien, la rase-campagne pestilentielle mérite bien d’être présentée pour ce qu’elle est : Elections - Trahison.
Les « éclats » de Marine Le Pen permettent aux médias de passer sous silence, par exemple, l’ultime vote des députés de la dernière séance de la législature 2012-2017.
« L’acceptation tacite des abus » (F. Bayrou)
Oui, les députés ont voté un amendement qui prescrit les délits financiers, passé un délai de 12 ans. « Jusqu'à présent, puisqu'aucun texte ne fixait de délais de prescription pour ces infractions, la jurisprudence de la Cour de cassation faisait loi. Et celle-ci décidait que les infractions « clandestines » se prescrivaient à partir du moment où elles étaient découvertes et non commises comme pour le reste des crimes et délits. » 2
Grâce à cet amendement, le délai de prescription, fixé à 12 ans (2005 pour une infraction commise cette année-là), va permettre à bien des délinquants argentés d’échapper à toute condamnation. En revanche, le délai de prescription en cas de diffamation présumée dans la presse, passe de trois mois à un an, ce qui facilitera la répression de la liberté d’expression. Le PS et LR ont été co-auteurs de cette loi.
La caste « transpartisane »
Si cette loi s’était appliquée lorsque l’affaire Fillon a éclaté, les faits imputés à ce prétendant seraient prescrits et il ne risquerait pas d’être inquiété par le Parquet Financier. Voilà comment les uns et les autres tirent les enseignements des scandales, en augmentant la possibilité d’y échapper. Pour un peu, cet amendement glissé subrepticement dans le corps d’une loi serait passé inaperçu…Toujours à l’affût, le Canard Enchaîné est passé par là.
La représentation parlementaire, tombant toujours plus bas, régresse à l’état de caste « transpartisane » (néologisme forgé pour la circonstance par les médias aux ordres) qui, pour reprendre le mot de Bayrou, se vautre dans « l’acceptation tacite » des détournements de fonds, des abus de bien sociaux, des emplois fictifs.
Certains se rangent des voitures. Dans la poursuite de l’hécatombe qui a frappé Hollande, Sarkozy, Juppé et Valls, l’ancien Premier ministre Ayrault et le président de l’Assemblée nationale Bartolone, ont décidé de se retirer des affaires. Avec davantage de panache, Bayrou s’efface à son tour (derrière Macron), après avoir prononcé sa sentence : « Je veux vous dire à quel point la gravité de la situation m'a frappé. Jamais, dans les 50 dernières années en France, la démocratie n'a connu une situation aussi décomposée »3. Pour finir, il se fait l’interprète de l’angoisse qui saisit à la gorge tous les serviteurs de la classe dominante : « nous sommes dans une situation d'extrême risque et, face à cette situation exceptionnelle, il faut une réponse exceptionnelle ». En ce qui le concerne, cette réponse exceptionnelle réside dans la capitulation. Rappelons à cet effet, qu’en septembre dernier, il n’avait pas eu de mots assez durs contre Macron, fustigeant sa candidature comme « une tentative qui a déjà été faite plusieurs fois par plusieurs grands intérêts financiers et autres, qui ne se contentent pas d'avoir le pouvoir économique, mais qui veulent avoir le pouvoir politique »4.
Les « révolutions par les urnes »
Nous l’avions dit, nous le redisons : ces élections sont sans issue. L’« insoumis » suprême a beau s’échiner à faire croire qu’il pourrait en sortir « une révolution par les urnes ». Nous avons connu quelque chose comme cela le 10 mai 1981 et, d’une autre manière, le 29 mai 2005. Le moins que l’on puisse en dire est qu’elles ont fait pschitt, ces « révolutions par les urnes ». Après le 10 mai 1981, Mitterrand a pactisé avec le CNPF, ancêtre du MEDEF. Après le 29 mai 2005, Mélenchon a pactisé avec Hollande par le truchement de cette « synthèse » entre tenants du OUI au traité constitutionnel européens au sein du PS et partisans du NON. Cette « synthèse » fraya le chemin du vote du Traité de Lisbonne qui était la version B du traité constitutionnel européen, le Plan B des « oui, oui ».
Ces élections ne calmeront pas la crise du pouvoir et des institutions. Elles ne seront pas un tremplin permettant d’imposer la vraie abrogation de la loi El Khomri, de toute la loi El Khomri et de satisfaire les revendications vitales. Ces élections ne calmeront pas la crise sociale. Elles projetteront le « système » au plus profond de l’abîme, quel que soit le « gagnant ». Seuls seront dupes ceux qui veulent duper les gens.
Miroirs menteurs
Mélenchon se fait passer pour « plus à gauche » que Hamon. Tous deux illustrent, chacun dans son registre, ombrageux pour l'un et tumultueux pour l'autre, la même politique de trahison permanente. Ils tourneront toujours le dos à l’aspiration à « changer de base » et à faire table rase de toutes les réformes qui tuent la sécurité sociale, les services publics, les hôpitaux, les droits démocratiques et les libertés tant publiques qu’individuelles. En paroles, le Mitterrand de 1981 était bien plus radical que le Mélenchon de 2017. Il invoquait « la rupture avec le capitalisme » et, la rose au poing, scandait le vers de Rimbaud : « changer la vie ». Depuis, beaucoup de salariés, de retraités d’agriculteurs asphyxiés comprennent que les promesses sont le prologue des trahisons. Ils comprennent que les envolées lyriques ne sont qu’effets de manche et que, lorsqu’un prétendant déclame « mon ennemi, c’est la finance », c’est au mieux de la poudre aux yeux. Les miroirs électoraux sont menteurs.
Oui, l’Internationale !
L’Internationale est bannie des représentations de l’Insoumis Maximo. Sans doute parce que ses paroles sont d’une brûlante actualité.
« ll n'est pas de sauveurs suprêmes
Ni Dieu, ni César, ni Tribun,
Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes
[…]
Soufflons nous-mêmes notre forge,
Battons le fer tant qu'il est chaud. »
Ce chant né de la Semaine sanglante qui décima les communards (mai 1871) montrait déjà le chemin qui est le nôtre :
« Ouvriers, paysans, nous sommes
Le grand parti des travailleurs »
Voilà pourquoi, nous nous appelons « La Commune – pour un parti des travailleurs ».
Pour aller vers le Parti des travailleurs comme fer de lance de l’émancipation des travailleurs par eux-mêmes.
Le 23 février 2017
Dernière minute :
Ce jeudi 23 février, plusieurs lycées parisiens ont été bloqués pour Théo. Pressentant un rassemblement Place de la Nation, la Préfecture de Police a envoyé le tweet suivant :
« Toute incitation ou participation à un attroupement non déclaré engage votre responsabilité morale et juridique »
À l’occasion de cette manifestation, 40 personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre.
Il appartient au mouvement ouvrier et démocratique de s’élever contre le « délit d’attroupement » qui prend corps dans ce pays, dans le cadre de l’état d’urgence liberticide, pour la libération sans conditions de tous les manifestants arrêtés et pour la levée de toutes les poursuites.
24-02-2017
1 « La morale, c’est trou de balle ». Propos rapportés par Simone de Beauvoir – dans « La Force de l’âge »
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