Il y a quelque chose de pourri au royaume de la Ve République

CE QUE REVELE L'AFFAIRE BENALLA - 2ème Partie :
La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 58 – mercredi 1er août 2018 

Il y a l’affaire et le fond de l’affaire. Le tissu de mensonges tramé pour la réduire à une banale « affaire d’été » n’abuse que les menteurs eux-mêmes  et les gogos. Il y a affaire d’Etat parce qu’il y a mensonges d’Etat, tout simplement. Le fond de l’affaire tient à la nature même de la 5ème république, que le Benallagate surprend en pleine agonie. La Bande à Macron est un pur produit de ce régime, basé sur un Chef de l’Etat et qui étant le chef du pays est placé au-dessus de tout soupçon. A ceci près que nous sommes aux prises cette fois avec un « chef » en dessous de tout…

Il y a quelque chose de pourri au royaume de la Ve République

Les friands d’intrigues flairent un complot. Un complot policier pour faire tomber Benalla et atteindre Macron, un complot politique pour saboter la révision de la Constitution. Ici, les soupçons se suffisent à eux même, ils montrent qu’aux sommets bureaucratiques, policiers et élyséens de l’Etat, la confiance n’existe plus et que ce « front » de l’ordre établi  est en train de se rompre, sur les ruines d’une 5ème république en perdition.

Depuis quelques années, les feuilletons politiques qui frisent la Télé-réalité sont devenus une série télévisée : l’affaire Strauss-Kahn en 2011-2012, suivi de l’épisode quasi-burlesque du duel entre Copé et Fillon au sein de leur parti en 2012, puis l’affaire Cahuzac, cet homme qui savait mentir « droit dans les yeux », puis en 2017 l’affaire Fillon, tandis que se poursuivent les affaires Sarkozy. La vie imite l’art, dit-on. La politique politicienne imite la fiction.

Qu’il s’en aille, lui, sa bande et toutes ses réformes !

Hollande a montré qu’un chef de l’Etat n’avait pas de raison d’avoir le respect de lui-même. Macron est, pour sa part, dévoré par son orgueil, devenu son « diable au corps » à lui. Son assurance à la fois arrogante et stupide n’est pourtant pas sans fondement.

« Qu’ils viennent me chercher ! » a-t-il crâné.

« Ils » ne sont pas venus le chercher, ni le Premier opposant de France déguisé en insoumis, ni personne.

« Ils » se sont bruyamment défaussés en quittant le Commission dite « d’enquête » de l’Assemblée nationale…avant que ne soit entendu le Commandant de CRS qui a ordonné la charge contre des « activistes » qui consommaient dans un café.

 Ces gens-là, on l’a vu et entendu,  ont passé le plus clair de leur temps à défendre la Police et son image…Deux semaines seulement après l’homicide policier à bout portant contre un jeune homme qui faisait juste une marche arrière. Là aussi, les « explications » avaient commencé par des mensonges.

Venir chercher Macron, cela signifiait : exiger sa démission et appeler à une première manifestation : qu’il s’en aille, lui, sa bande et toutes ses réformes ! Mais, encore une fois, ce n’est pas parce que Mélenchon se peindrait avec des rayures qu’il deviendrait un zèbre. Cet homme, au demeurant fort instruit voire érudit et fort éloquent, n’en est pas moins atteint de crétinisme institutionnel et étatique. Cela aussi, fait partie du fond de l’affaire.

Mélenchon tend la main à la Droite

Nous avons eu le triste privilège de voir Danièle Obono poser pour la postérité avec Le Pen et la droite, à sa demande.  Cette députée malgré elle est passée dans la machine à embrouiller les choses, à brouiller les repères démocratiques et ouvriers les plus simples, ce à quoi Mélenchon s’emploie tous les jours, infatigablement.

Et, maintenant, voter une motion de censure avec Les Républicains semble aller de soi[1] alors qu’il n’existe objectivement aucune raison  de le faire puisque cette motion n’a aucune chance de passer, cela a donc valeur de main tendue à la droite, qu’on le veuille ou non ou alors cela n’a aucun sens, à part désorienter les bases insoumises.

 "Nous n'aurions pas désapprouvé la formation d'un grand arc républicain contre la dérive monarchique", a tenu en effet à souligner l’intarissable Mélenchon. [2]

A ce jeu malsain se prêtent également les élus du Parti communiste. Le vote des députés PC pour la motion de droite est d’autant plus honteuse qu’en 1991, Les élus communistes avaient refusé de s’associer à la motion de censure de la droite contre la CSG. Si ils l’avaient voté, la CSG ne serait pas passée et le gouvernement Rocard aurait été contraint de démissionner, mais, à cette époque, il semblait pour ces politiciens plus important de ne « pas faire le jeu de la droite » que de mettre en échec la CSG, par tous les moyens à disposition. Cette fois, insistons bien, voter la motion  de censure de la droite est purement un geste politicien qui montre l’aptitude des dirigeants du PC à se prosterner devant Mélenchon qui, de son côté, continuera à les toiser.

Le tour de passe-passe des députés LR

Cela ne nous dispense pas pour autant de voir ce que contient la motion de censure de droite :

« Nous considérons que le gouvernement a failli sur la base de l'article 20 de la Constitution : il ne peut pas confier à quelqu'un qui n'a aucune compétence comme ce M. Benalla la sécurité du président de la République », avait alors justifié Christian Jacob s'appuyant sur texte de 1958 qui stipule que le gouvernement « dispose de l'administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50. »… « L'affaire Benalla, qui a mis en lumière une confusion des pouvoirs à la tête de l'exécutif, une forme de subordination du gouvernement face à la présidence de la République et une incapacité de ce même gouvernement à exercer ses responsabilités et pouvoirs institutionnels justifie le dépôt de la présente motion de censure »[3]

Revenons donc sur l’article 20 de la Constitution à propos du gouvernement : « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose de l'administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50.»

Sur le fondement de cet article, Les Républicains font mine de découvrir « une forme de subordination du gouvernement face à la présidence de la République ». Auraient-ils oublié l’article 8 de cette Constitution : « Le Président de la République nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions. ».  

Si le Premier ministre ne se subordonne pas au président de la République, le président peut immédiatement appliquer l’article 12 : « le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des présidents des assemblées, prononcer la dissolution de l'Assemblée nationale… »

Les Républicains font comme si le chef de l’Etat était responsable devant le gouvernement. Ce n’est pas le cas, Macron n’est responsable devant personne. La réalité est donc bien crue : il y a quelque chose d’intrinsèquement pourri au Royaume de la 5ème république où le président n’est contrôlé par personne, ne peut être incriminé s’il embauche des nervis.  Les Républicains qui sont en réalité les enfants de cette pseudo-république accusent en fait le gouvernement de se subordonner volontairement à la « présidence de la République » qui, du coup, est épargnée, puisque c’est le gouvernement qui devient « incapable ». Joli tour de passe-passe.

Si le gouvernement ne se subordonnait pas, la « présidence de la république » le démissionnerait et en cas de refus de démission, « la présidence » procéderait à la dissolution de l’Assemblée nationale. Voilà pourquoi, dans la pratique, Macron peut changer de gouvernement comme de chemise. Voilà pourquoi, dans la pratique « constitutionnelle », le gouvernement est tenu de se subordonner à lui. Comme disait Chevènement autrefois : « un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne »[4].

Dans l’affaire BENALLA, il n’y a qu’un coupable : Macron !  Ce qui n’appelle qu’une seule conclusion : exiger sa démission ! Nous l’avons vu, ni les Républicains, ni le PS, ni le PC, ni LFI ne veulent que Macron s’en aille. Alors, que veulent-ils ?

La motion magique

La réponse à cette question se trouve dans l’autre motion signée par les députés PS, PC et LFI :

« (…) plusieurs responsables au plus haut niveau de l’État ont tenté de dissimuler volontairement des faits qui auraient dû être signalés à l’autorité judiciaire. (…)Ces faits interrogent les habitudes du président de la République en matière de sécurité, la pratique gouvernementale en matière d’ordre public, et plus généralement une pratique du pouvoir et des institutions. Ils fragilisent l’autorité de l’État. (…) La confiance que le peuple doit accorder au Gouvernement et dans ses institutions est donc compromise. L’Assemblée nationale doit pouvoir s’exprimer sur la responsabilité du gouvernement et lui retirer la confiance que son comportement a rompue (…). »[5]

 Ces députés affirment que le peuple DOIT accorder sa confiance au Gouvernement et aux Institutions. Le Gouvernement est accusé d’avoir rompu la confiance que nous lui devions. Ils sont affolés de voir l’autorité de l’Etat « fragilisée ». 

Voilà donc leur critère suprême, la défense de l’autorité de cet Etat ! Voilà le dernier cri de « l’insoumission » domestiquée ! La défense des matraques et des gaz « républicains » et « aux couleurs de la France » face à la petite garde prétorienne… du chef de l’Etat qu’il n’est pas question de déboulonner. 

Ne leur en déplaise, cet Etat n’est pas le nôtre. Cet Etat est, avant tout, dans son plus simple appareil « une machine  faite  pour maintenir  dans  l'obéissance  la majorité  du  peuple » (Trotsky – La révolution trahie page 25)[6]

Il n’y aura d’inattendu que le moment…

Lorsqu’on cherche ce qu’il y a au fond de l’affaire Benalla, on trouve des CRS qui gazent des manifestants et des badauds, dans un café et au jardin des Plantes,  avec la collaboration d’éléments zélés de la garde prétorienne du chef de l’Etat juridiquement- constitutionnellement-parlementairement –« gouvernementalement » incontrôlé et incontrôlable. Evidemment, en mentant éhontément, le Pouvoir sape de lui-même sa propre autorité sur fonds de règlements de compte au sein de l’Etat et de son corps policier.

Nous savons maintenant que Benalla n’a jamais été sanctionné, qu’il dispose, au besoin, d’une tribune sur TFI, Le Monde, le JDD pour enfumer éhontément son monde et encenser Macron. Nous avons pu enregistrer tout autant le mutisme de Pavageau, Martinez alors qu’il s’agit tout de même au départ des suites des manifestations du Premier mai, journée internationale et syndicale des travailleurs depuis 1886, appelées entre autre par la CGT, qu’il s’agit d’atteintes graves au droit de manifester.

Plus ils se couchent devant Macron, plus ils s’isolent.

Plus ils s’isolent, plus les travailleurs, les jeunes, la population apprennent à compter d’abord sur ses propres forces.

La révolte et la colère contre les réformes et les conditions actuelles de vie  va surgir au grand jour. Il n’y aura d’inattendu que le moment. Nous nous y préparons, des militants syndicalistes, de plus en plus nombreux se préparent aussi à se mettre au service de leur classe, à s’affranchir des discours martinéziens et mélenchoneux…

A suivre …



1er août 2018







[1]
https://youtu.be/WgrYe998r58

[2] http://www.lepoint.fr/politique/affaire-benalla-la-gauche-surmonte-ses-divisions-pour-presenter-une-motion-de-censure-27-07-2018-2239710_20.php

[3] https://www.republicains.fr/actualites_affaire_benalla_obliger_executif_expliquer_deputes_deposent_motion_censure_20180727

[4] https://youtu.be/AmMDJvr5A60

[5] http://lessocialistes.fr/retrouvez-le-texte-de-notre-motion-de-censure/

[6] https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/revtrahie/rt.pdf

Modifié le mercredi 01 août 2018
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