À l'ombre de la monarchie

À l'ombre de la monarchie



Les prochaines élections en Catalogne, le 27 septembre, et dans l'Etat  espagnol, en fin d'année, agitent le calendrier politique. Si de leur  issue incertaine la monarchie sortira à rien pas douter amoindrie, la  lutte de classes, elle, en sera à terme renforcée. Pour l'instant la  question nationale met de nouveau en branle les forces centrifuges  dans un Etat prison de peuples. Tous les partis en lice affichent leur  véritable visage, celui de la soumission explicite ou implicite au  Pacte Constitutionnel.

Tout d'abord la coalition Junts pel Sí (ensemble pour le oui) qui représente la force majoritaire au sein de l'Assemblée Nationale Catalane (ANC), donnée jusqu'ici gagnante par tous les sondages,
intégrant Convergencia Democrática de Catalunya (Convergence Démocratique de Catalogne, droite « centriste », jusqu'’ici premier parti politique de Catalogne en termes électoraux, expression de la bourgeoisie catalane) et Esquerra Republicana de Catalunya (ERC, Gauche républicaine de Catalogne, indépendantiste, prône une République catalane, créé en 1931) et dont la tête de liste est Raül Romeva, ex-dirigeant du Partit Socialista Unificat de Catalunya (PSUC, Parti socialiste unifié de Catalogne, parti stalinien depuis sa création en 1936, alors affilié au Komintern de Staline) a résumé son programme: "faire un pays plus démocratique, plus juste et plus prospère" ... "L'Etat espagnol asphyxie la Catalogne financièrement et oublie le Pacte Institutionnel". La solution serait "un Etat favorable et juste".

Les nationalistes catalans en ordre dispersé

Il présente son programme comme la "Révolution des sourires" et se présente comme Catalunya un Sol Poble, ( Catalogne, un seul peuple) comme le faisait le PSUC dans les années soixante; il serait la garantie contre la corruption. Un détail pourtant, dans son argumentaire, le mot indépendance n'apparaît pas.

Mais voilà, les affaires de corruption ont rattrapé le Président de la Généralitat Artur Mas qui a consigné dans le programme sa continuité dans le poste en cas de victoire électorale. Et c'est en vertu d'une plainte déposée par l'ex-maire ERC de Torredemlarra qu'il a été mis en cause dans des affaires de blanchiment et de corruption dites du 3%, le pourcentage remis par les constructeurs de chantiers publics à une fondation de CDC. Voilà donc tout le discours fondé sur la garantie contre la corruption brandi par Junts pel Sí qui éclate en morceaux.

Au service du « Pacte constitutionnel » monarchiste

Il est clair maintenant que M. Mas est bien la garantie, mais contre l'indépendance de la Catalogne. De leur côte les indépendantistes d'Esquerra de Catalunya Sí que es Pot Podemos, Iniciativa per Catalunya font campagne en rappelant le passé de CDC et ses pactes avec le Parti Populaire (PP, droite Premier ministre Rajoy)). Ils ont conclu une alliance avec Podemos et Iniciativa de Catalunya les Verd (ICV) et la Candidatura de Unidad Popular (CUP) qui affichent leur
radicalité. Mais toutes ces composantes de Sí que es Pot ne sont que les béquilles de CDC et de l'ANC. Cet attelage hétéroclite et au service du Pacte constitutionnel avec la monarchie aura bien de la peine à convaincre un électorat de plus en plus sceptique sur leur volonté d'indépendance politique réelle..

Dissensions au sein de Podemos sur la politique de Tsipras

L'eurodéputé Miguel Urban de Podemos a déclaré son désaccord avec Pablo Iglesias, le principal dirigeant de Podemos qui a présenté la convocation électorale d'Alexis Tsipras comme "un acte de courage propre à un démocrate". Il l'accuse "d'abandonner les citoyens grecs en acceptant la mort de la démocratie en Grèce", de "casser Syriza et de transmettre le déplorable message que l'on ne peut pas (Podemos se traduit par nous pouvons) en Espagne et d'autres pays".

Il abonde donc dans le sens de Teresa Rodriguez, appartenant au même courant critique de Podemos, élue au Parlement autonome en Andalousie.

Pablo Iglesias loue la politique « courageuse de Syriza »

Ils n'acceptent pas les conditions de la troïka pour le troisième plan d'aide financière et l'anticipation des élections qui a facilité la scission de Syriza. Ils s'opposent également à la
direction de Podemos qui approuve les propos de M. Iglesias louant un Tsipras "capable de se salir les mains et d'assurer des contradictions en gouvernant". M. Urban condamne que M. Tsipras "se
soit plié" devant la troïka malgré son engagement dans le référendum pour le non au plan d'aide et qu'il ait accepté la gestion d'un programme et de mesures qui ne peuvent que nuire à terme, à la
politique défendue auparavant, signifiant la fin de toute possibilité de souveraineté populaire et "d'avoir provoqué sciemment une rupture du projet de Syriza en servant de façon indirecte une grande victoire à la troïka".

« Accord politique et personnel avec Cristina Kirchner » !

Il aurait ainsi "ressuscité le Parti Socialiste Grec avec un autre nom et fait de Syriza un mort vivant".
Ces déclarations auront-elles un effet sur les candidatures d'Unité populaire que proposent Podemos et Izquierda Unida (IU, crypto-staliniens ) pour les élections aux Cortes ?

Celle de Manuela Carmena, en visite en Argentine avec Ada Colau -maire de Barcelone- pour soutenir la campagne électorale de la Présidente de ce pays, Cristina Fernández de Kirchner, servira mieux encore ces candidatures. ! Elles ont en effet, rencontré Mme. Fernández de Kirchner et échangé leurs expériences politiques respectives en soulignant leur "accord politique et personnel", selon des sources argentines.

Mme. Fernández de Kirchner a aussi considéré la nouvelle maire de Madrid "comme un référent de la gauche européenne". Ces déclarations éclairent la politique que mènent déjà ces candidatures populaires. Mme. Carmena qui avait déclaré dans une interview sur France 24 son apolitisme malgré le poste très politique qu'elle occupe aujourd'hui, s'entend aussi très bien donc
avec la péroniste Fernández de Kirchner, aussi bien au moins qu'avec la monarchie espagnole.

Et Podemos qui a soutenu, politiquement cette fois, son élection pourra-t-il convaincre de sa capacité à changer le système politique de l'Etat espagnol ? Doutons-en fortement, parce qu'il est clair depuis bien longtemps que les « Unités populaires » et autres fronts populaires ont sans aucune exception combattu férocement la lutte de classes et invariablement soutenu la collaboration de classe avec le capital.



Domingo Blaya, 31 août 2015

Modifié le dimanche 06 septembre 2015
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