Accord AGIRC/ARRCO : Accord scélérat !

L’accord sur les retraites complémentaires du privé conclu le 30 octobre dernier entre le patronat et 3 organisations syndicales de salariés (CFDT, CFTC et CFE-CGC) constitue une nouvelle attaque contre nos acquis sociaux. Cet accord minoritaire va allonger la durée de cotisation, baisser encore davantage le taux de remplacement1, casser le système par répartition et l’ouvrir à la capitalisation : voilà ce que ces 3 syndicats ont signé !

Accord AGIRC/ARRCO : Accord scélérat !

Les caisses ARCCO et AGIRC (pour les cadres)2 concernent l’ensemble des salariés du privé, soit 18 millions de cotisants et 12 millions de retraités auxquels elles versent des pensions qui représentent de 30 à 70% des revenus. L’objectif mensonger de l’accord signé est de réduire le déficit de ces caisses complémentaires (3,1 milliards d’euros alors qu’il existe des réserves, respectivement 14,1 et 61,8 milliards d’euros).

Main basse sur le salaire différé

Mais derrière cette propagande il n’y pas d’autre volonté que d’organiser le détournement des cotisations vers l’assurance privée. Car depuis la création du régime général de la Sécurité sociale en 1945, qui instaure le principe de financement des retraites par répartition basée sur la solidarité ouvrière intergénérationnelle, le patronat n’a eu de cesse de s’attaquer à ce système anticapitaliste par nature qui l’empêche de mettre la main sur le « marché des assurances sociales » et de « réduire les coûts du travail » à la portion congrue. Le gâteau qui leur échappe est en effet colossal : les fonds de la sécurité sociale s’élèvent à 464,5 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires (chiffres 2014), c’est-à -dire plus que celui de l’État ! Ces 464 milliards représentent LE SALAIRE DIFFERE de tous les travailleurs (part salariée + part patronale des cotisations)

Les salariés rackettés

Ces mesures, dans la droite ligne des contre-réformes des 20 dernières années, imposent de nouveaux reculs inacceptables aux travailleurs :
- La sous-indexation des pensions : la revalorisation des pensions sera inférieure d’un point au taux de l’inflation jusqu’en 2018 inclus (cette sous-indexation avait été définie comme « temporaire » lors du précédent accord signé en mars 2013 !). A quoi s’ajoute le report de la date de revalorisation, qui correspond pour les retraités à une perte de 4,1 milliards d’euros d’ici 2030.
- Une augmentation du prix du point et une baisse de sa valeur (la valeur du point sera égale à 6 % en 2018 alors qu’elle était à 10,21 % en 1993...) et une augmentation des cotisations !
- Un système de bonus-malus, véritable escroquerie pour les salariés qui, s’ils partent à la retraite à 62 ans en ayant cotisé pendant 41,5 années, c’est-à-dire en remplissant toutes les conditions légales pour disposer d’une retraite à taux plein, se verront appliquer une baisse de 10 % prélevée sur le montant de leur retraite complémentaire à partir de 2019 et pendant deux ans voire trois.
Vers un recul de l’âge de référence à 67 ans
Cette mesure s’appliquera également à toutes les tranches d’âge au-dessus, Jusqu’à 67 ans !
Comme l’explique le journaliste Laurent Mauduit3 : « c’est l’âge de 67 ans qui devient de plus en plus la référence. C’est la ligne d’horizon autour de laquelle le gouvernement socialiste et le Medef organisent l’avenir du système des retraites. »
Quand on sait que la pension moyenne des retraités4 s’élevait à 1 216 euros net par mois en 2013 ( les pensions sont gelées depuis) et qu’une majorité des retraités sont bien en deçà de cette moyenne ; officiellement 1,2 millions (chiffres INSEE, 2014) de retraités vivent sous le seuil de pauvreté mais la réalité est bien pire et notamment pour les femmes qui touchent une pension d’environ 40 % inférieur à celle des hommes, on réalise aisément que partir en retraite avec une décote de 10 % ce n’est pas une affaire de choix pour les travailleurs comme l’assènent la CFDT et le MEDEF !
La fameuse retraite à la carte ! Alors que 56 % des travailleurs sont au chômage au moment de prendre leur retraite ! Et qu’il y a 6,5 millions de chômeurs en France !
Le système des retraites par répartition (et de la sécurité sociale) est une conquête arrachée par les travailleurs comme sous-produit de la vague révolutionnaire de l'après-guerre en France. Ce n’est pas autre chose qu’une partie de notre salaire, qui est différé (ou socialisé, versé dans un pot commun à tous).

Détournement d’une fraction du salaire

Il nous faut donc réaffirmer haut et clair que le financement des retraites par les cotisations sociales adossées directement aux salaires est le cœur de l'acquis à défendre. La solution « au déficit » des caisses complémentaires ne passe que par l’augmentation générale des salaires, des minima sociaux, des effectifs, par une loi interdisant les licenciements et par la mise en place de l’échelle mobile des heures de travail. Par l’arrêt des exonérations en faveur des " entreprises " qui ne sont pas autre chose qu’un détournement d'une fraction du salaire de chaque travailleur.
Cet accord doit être annulé et les réformes Balladur-Fillon-Ayrault doivent être abrogées : pour un retour aux 37,5 annuités pour tous avec 75% du salaire " actif " et 60 ans comme âge de départ à la retraite !
Unité syndicale CGT-FO-FSU-SUD pour l'annulation pure et simple de cet accord scélérat, par la grève et la manifestation !

Julie Charmoillaux
le 3 novembre 2015

1 Rapport entre la pension nette au moment du départ à la retraite et le dernier salaire net.

2 L’ARRCO (Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés) et L’AGIRC (Association générale des institutions de retraite des cadres) sont des fédérations qui organisent, réglementent et contrôlent le fonctionnement des institutions de  retraite complémentaire

3 http://www.mediapart.fr/journal/economie/201015/en-avant-vers-la-retraite-67-ans?

4 Enquête annuelle de la direction de la recherche du ministère de la santé (la Drees). A consulter sur le site de Médiapart : http://www.mediapart.fr/files/retraite-edition-2015.pdf

Modifié le jeudi 05 novembre 2015
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La Commune n° 100

La Commune n° 100

dimanche 08 novembre 2015

Sommaire : • Air France : La violence patronale• Editorial : Réforme ou rupture ? • Chronique d'une chute de régime : Hollande, la dictature à tête de veau • Retraites : Accord AGIRC/ARRCO : Accord scélérat ! • Pedro Carrasquedo, membre fondateur de La Commune, nous a quittés... • Pedro Carrasquedo (1951-2015), premiers points de repères biographiques • POI : Gluckstein plus...

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