Pauvreté et répression

RussieSelon les calculs de la Banque mondiale, à la fin de l'année 2009, le pourcentage de personnes vivant sous le seuil de pauvreté atteignait 17,7% de l'ensemble de la population
de la Fédération de Russie. A moyen terme, il est prévu sa baisse à 16,1% pour la fin de 2010 et à 14,6% pour la fin de 2011, d'après un document de la Banque
mondiale. Bien difficile à croire si l'on en juge par l'aggravation considérable de la crise économique en Russie...
Les pronostics ne sont que des
pronostics, tandis que la quantité
des citoyens indigents de Russie
croît à un rythme accéléré, dans une
conjoncture pétrolière pourtant favorable
pour le pays.




Les travailleurs pauvres






Il est évident que les principales causes
économiques du développement
rapide de la pauvreté reposent sur les
bas salaires et des industries non-compétitives.

Les soi-disant " mesures
anti-crise " n'ont rien résolu
en 2009, pas même la stabilité
sociale.

Les mesures furent les suivantes
: la compensation
maximum pour le chômage
fut portée à un niveau record
de 4 900 roubles ( environ
120 euros), tandis que le
minimum pour les retraites
augmentait de 8,7% pour
atteindre 1 950 roubles (
environ 50 euros). De plus,
le 1° août les retraites furent
indexées en dehors du plan
à 7,5% et au 1° décembre à 31,4% jusqu'à
2 562 roubles (environ 65 euros).
Comme nous pouvons le voir, les
efforts du gouvernement russe furent
minimes par rapport aux besoins nécessaires
pour venir en aide à la population
et d'un cynisme intolérable en comparaison
avec l'enrichissement insolent de
l'oligarchie.

Selon les documents de l'Institut de
Recherche Scientifique du Travail, en
1992-95 le noyau des pauvres était formé
traditionnellement par les couches
de la population socialement vulnérables
(retraités, invalides, familles nombreuses
et mono-parentales). Mais à la
fin des années 1990, le centre de gravité
s'est déplacé vers les " employés "
pauvres, c'est à dire, les citoyens en
âge de travailler avec des bas salaires
ne leur permettant pas de les faire vivre
eux et leurs familles.

Les causes principales de cette situation
résident dans un bas niveau des
salaires ne permettant pas d'assurer le
minimum vital pour les travailleurs, les
salaires en retard de paiement, le chômage,
le sous-emploi, les congés administratifs
obligatoires sans compensation
salariale etc...Selon les enquêtes de l'Institut des Statistiques de Russie,
61,1% des pauvres sont des personnes
de la population active, parmi lesquelles
59,4% sont des employées.




l'oeuvre de l'oligarchie






Il est à noter qu'il s'agit des statistiques
officielles, lesquelles, comme nous le
savons, faussent toujours la véritable
situation en faveur des autorités.
Actuellement personne ne peut dire
avec exactitude jusqu'à quel point un
pays aussi riche en ressources que la
Russie est affecté par la pauvreté.
Il est évident que la pauvreté que nous
observons dans le pays est, avant tout,
la conséquence de la politique de libéralisation
mise en oeuvre par les autorités
russes pendant deux décennies.
En Russie les " réformes libérales " de
Yeltsine et Gaidar, commencées en
1992, ont abouti à la formation d'une
nouvelle oligarchie dont les différents
clans pillent la richesse du pays qui était
si grande et détruisent le peuple russe.
Aujourd'hui, le pouvoir oligarchique
représenté par Medvedev et Poutine,
qui ont juré devant le monde entier leur
fidélité aux " valeurs capitalistes
libérales ", continue de
poursuivre la politique stalinienne
dans sa version
moderne. Une poignée d'oligarques,
issus des débris du
parti stalinien, la bureaucratie
qui se multiplie comme les criquets,
et des millions d'esclaves,
c'est ce qui existe en
Russie en 2010. Les droits et
les libertés illusoires, comme
les illusions dans un heureux
futur capitaliste, n'engourdissent
plus la conscience des
travailleurs russes comme il y
a 20 ans. Aujourd'hui nombreux sont
ceux qui comprennent parfaitement que
la tension sociale qui s'accroît chaque
année peut, à n'importe quel moment,
exploser en " une cruelle révolte russe "
ou dans une Révolution.




La révolte de Pikalevo






Comme par exemple, les évènements
du mois de mai 2009 dans la ville de
Pikalevo (Province de Leningrad), où la
vieille usine d'aluminium (entreprise
coeur de la cité) fut divisée en trois usines
de production vendues à trois nouveaux
oligarques russes : Deripaska, Bronshtein et Utievski. En conséquence
des divergences apparues entre ces oligarques,
l'entreprise fut liquidée, et toute
la ville se trouva sans travail ni eau
chaude.

Les ouvriers désespérés de ne pas
recevoir leurs salaires depuis sept mois,
occupèrent l'usine et élevèrent un barrage
sur une importante route fédérale,
l'embouteillage de véhicules s'étendant
sur près de 450 km.

Les rumeurs sur les actions des travailleurs
de Pikalevo, en dépit du blocus
de l'information imposé par l'administration
de la ville, commencèrent à se propager
dans toute la région
et connurent une grand
écho dans toute la Russie.
A Moscou et Saint-
Petersbourg des manifestations
de solidarité avec les
travailleurs de Pikalevo
furent organisées.
l'information sur la lutte
des ouvriers de cette petite
ville se propagea à la vitesse
de l'éclair dans toute la
Russie, recevant le soutien
et étant à l'initiative de nouvelles
manifestations dans
d'autres régions.

l'intervention personnelle
du premier ministre Poutine
qui arriva d'urgence dans la ville en
insurrection, arrêta la vague croissante
de protestations, et les problèmes des
travailleurs de l'usine furent résolus :
l'eau chaude revint dans la ville, les
arriérés de salaires de sept mois furent
payés, la population affamée...acheta
en un jour pratiquement tous les aliments
à la vente dans toutes les épiceries
locales...




Renforcement de l'appareil de répression






On pourrait remercier les autorités
représentées par le premier ministre
Poutine, qui a réagi aux problèmes des
travailleurs. Mais le conflit a duré plus
de sept mois, et les travailleurs russes
comprennent parfaitement que Poutine
ne pourra résoudre tous les problèmes,
que les autorités ont donné une aumône aumône
à quelques-uns, mais comment
résoudre les futurs problèmes engendrés
par ces mêmes autorités ?
Le Kremlin comprend lui aussi parfaitement
que la révolte des travailleurs de
Pikalevo n'est pas la dernière et que la
tension sociale va continuer de s'accroître.
C'est pour cela qu'il n'est pas étonnant
qu'à la fin de l'année dernière le
gouvernement de Russie a soumis à
l'approbation de la Douma un projet de
loi qui aggrave les peines pour les
actions de protestation sur les routes
(barrages...). Maintenant quiconque
veut manifester sur une route ne sera pas menacé par une amende de 2 500
roubles (65 euros) mais par deux ans
de prison. Dans le meilleur des cas on
pourra s'en sortir en ayant payé une
amende de 100 000 roubles ( environ 2
600 euros), ce qui est totalement hors
de portée pour un travailleur.
De plus, il a été présenté, publiquement,
le projet de la dénommée loi anti-
Pikalevo élaborée après une réunion du
Conseil de sécurité et du Comité antiterroriste
national. Les auteurs du projet
de loi appuient la nécessité de son vote
sur " l'augmentation du nombre d'actions
illicites qui empêchent le fonctionnement
des transports, y compris les
actions de caractère terroriste ".
De cette façon, si ce projet de loi préparé
par le gouvernement est approuvé,
tous ceux qui oseront organiser une
manifestation sur une route seront punis
comme terroristes.





Retraités ? Terroristes !






Comme nous pouvons le constater, le
modèle nord-américain de la " lutte
contre le terrorisme " a été pris comme
exemple et mis en oeuvre activement
dans tous les pays de l'ex-URSS par
chaque oligarchie locale contre leur propre
peuple.

A ce dispositif préparé par les autorités
russes face aux futurs conflits sociaux,
nous devons souligner un événement
supplémentaire. En novembre 2009, à
la périphérie de Moscou, furent organisés
les exercices des unités spéciales
d'intervention du Ministère des
affaires intérieures dédiés à la
dispersion d'une manifestation
imaginaire de retraités mécontents.
Conformément au scénario,
dans une localité, un groupe
important de retraités est descendu
dans la rue en manifestation
pour réclamer la sécurité
sociale, bloquant une route fédérale.
Pour leur dispersion on a
appelé les unités spéciales des
Forces internes. En quelques
minutes, à l'aide de grenades
aveuglantes et bruyantes, de
gaz lacrymogène et de bombes
à eau, la foule de " retraités " fut
dispersée. Les généraux du
Ministère des affaires intérieures firent
l'éloge du niveau moral et technique de
préparation de leurs subordonnés
récompensant les participants les plus
zélés dans ces exercices par l' octroi à
de nouveaux grades, des prix et des
cadeaux.

Ainsi, en lieu et place de réformes
sociales, de nationalisation des entreprises
stratégiques de la Russie, les
autorités russes continuent dans la voie
du renforcement des mesures destinées
à lutter contre leur propre peuple.
Apparemment, les nouveaux bourgeois
russes n'ont rien appris de l'histoire.
Par conséquent nous devons la
reprendre à notre compte... Vive la
révolution russe du XXI°siècle.




Anatoli Matvienko

Dirigeant de " Basta ! ",

organisation Biélorusse
Modifié le vendredi 21 mai 2010
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