Une victoire populaire écrasante

Palestine : succès électoral du HamasLe coup de tonnerre redouté par tous ceux qui s'accommodaient du statu quo dans les territoires occupés à éclaté le 25 janvier : 77 % des citoyens de Cisjordanie et de Gaza, y compris ceux de Jérusalem-Est, ont participé aux élections législatives. Et le vainqueur incontestable est le Hamas. Derrière le Hamas, le peuple palestinien. Marxistes et militants ouvriers doivent-ils se réjouir ou se lamenter de la victoire d'un parti religieux, se demandent certains. La question est mal posée, sauf à vouloir dicter aux masses ce qu'elles ont ou non le droit de faire et les punir si leurs choix ne plaisent pas ...Ce qui est flagrant, et pour tout dire réjouissant, c'est la défaite de ceux qui, d'Accords d'Oslo en application de la feuille de route, ont fait subir aux Palestiniens l'opprobre et l'humiliation quotidienne en cherchant la voie de l'entente avec l'État sioniste. Ce qui est réjouissant, c'est de voir les mines allongées des Blair, des Chirac, des Bush et autres parrains du Quartet.
À ce titre, la politique des petits pas négociés qui débouchaient sur toujours plus de rétrécissement de l'espace dévolu aux Palestiniens est suspendue sine die. Alors que Sharon s'enfonce dans un coma qui n'aura bientôt plus rien d'artificiel, les dirigeants sionistes se cramponnent à la manche d'Abbou Abbas et d'Ahmed Corei, Président et Premier ministre de l'Autorité Palestinienne, cette entité née des Accords d'Oslo et qui représente un cas, unique sur la planète, d'une ombre d'État à qui l'autonomie est distillée au goutte à goutte par ses oppresseurs. Les deux dirigeants du Fatah, en pleine dérive, rappellent que, selon les termes des Accords d'Oslo, ils représentent l'autorité, et que les négociations doivent continuer avec eux. Il n'ont guère qu'une fiction de pouvoir, au sein d'une Autorité qui mérite difficilement ce nom. Qu'est ce que le peuple palestinien a voulu signifier par son vote ? S'agit-il d'un ralliement à l'étendard vert des islamistes ?

Flambée religieuse ou rejet de la corruption ?

Une flambée de foi contagieuse ? Ce serait pure utopie que de le croire. Ce que craignent les observateurs occidentaux, à juste titre, c'est que les Palestiniens expriment leur exaspération devant la corruption des dirigeants du Fatah, le partage des prébendes entre familles, au sens mafieux du terme, et la non-redistribution de l'aide financière versée par l'Union européenne et les États-Unis versée à l'Autorité Palestinienne en application des Accords d'Oslo. Que revendique le Hamas, qui a su mobiliser tant d'électeurs en sa faveur ? Retour des réfugiés chez eux ; " Restauration de la Palestine historique " ; " non-reconnaissance de l'État d'Israël ". Que dit le Fatah, au pouvoir depuis Oslo ? " Reconnaissance d'Israël " ; " Un solution juste pour les réfugiés " ... Ce n'est pas tout à fait la même chose. Qui a oeuvré au soutien financier des centaines de milliers de chômeurs parmi les 3,8 millions de Palestiniens des Territoires occupés ? Le Hamas, qui a patiemment tissé un réseau de charité et de solidarité. Ce qui est en conformité avec son objectif de départ : Hassan el Banna, en 1928, a fondé l'organisation des Frères Musulmans, confrérie religieuse à but d'entraide. C'est aujourd'hui la principale force organisée d'opposition en Égypte, face aux exactions de Moubarak. Ce sont les Frères Musulmans qui ont fondé le Hamas en 1987, et, à l'époque, au début de l'Intifada, l'État sioniste y voyait une source de diversion efficace contre les organisations laïques qui contrôlaient l'OLP. À l'époque, point d'attentats-suicides. Cette tactique sanglante n'interviendra qu'après les Accords d'Oslo, en particulier à partir de 1996, et deviendra plus couramment pratiquée au cours de la 2e Intifada. Mais voilà plus d'un an que le Hamas, qui avait boycotté les scrutins précédents, sauf les municipales, qu'il a remportées dans beaucoup de localités, a renoncé aux attentats-suicides, contrairement au Djihad islamique et à d'autres organisations religieuses. Il a su épouser les aspirations des masses palestiniennes avec d'autant plus d'efficacité que la gestion du Fatah leur sortait par les yeux. Loin de nous l'idée de minimiser la persistance de l'influence du Fatah, qui, soit dit en passant, a été le fer de lance du combat antisioniste pendant des décennies, mais les faits sont là.

La faillite du Fatah et des organisations laïques

Mais si ce sont des forces religieuses qui l'emportent sur des formations présentées comme laïques, on ne peut leur tenir rigueur de la faillite de ces dernières. Il n'y a rien à glaner pour la classe ouvrière dans les prêches exaltés des plus radicalisés des religieux. Mais il y avait, pour le peuple palestinien, un gourdin frappé du croissant, et il a porté un coup aux magouilles des sionistes, du Quartet et de leurs interlocuteurs complaisants de l'Autorité palestinienne. En ce sens, ce résultat doit être compris comme une victoire du peuple palestinien, même s'il est sûr que l'arme ne sera pas toujours adéquate. Mais les masses palestiniennes ont-elles le choix des armes ? Seuls des petits bourgeois apeurés vont se boucher le nez - ils le font déjà en France et ailleurs - devant la décision démocratique majoritaire d'un peuple quotidiennement agressé, spolié, martyrisé par un État d'Israël armé jusqu'aux dents par l'Impérialisme. Certes, maintenant, le Hamas est attendu. Certains prédisent qu'il sera à son tour touché par la corruption, qu'il devra mettre de l'eau dans son vin, si l'on peut dire. C'est possible, dans la mesure où l'Impérialisme porte la putréfaction sur tout ce qu'il touche. Mais si les espoirs du peuple sont déçus, il cherchera à nouveau un autre outil, et au sein même du Hamas, des tendances radicales prendront plus de place ou quitteront cette formation, suivant des cas de figure qu'il est difficile de modéliser. À ce jour, aucune déclaration n'est venue infléchir la ligne officielle du Hamas, même s'il est probable que ce soit un gouvernement de notables proches du Hamas ou de technocrates de toutes tendances qui sorte des tractations actuelles.

l'agonie de Sharon et la crise de l'État sioniste

l'État sioniste est en crise au plus mauvais moment pour lui, quelques mois avant des élections qu'apparemment tous les " fabricants de feuille de route " souhaitent voir remportées par le parti Kadima, créé par Sharon avant sa mise en veilleuse. Pourquoi ? Parce que les politiciens raisonnent en termes anciens dans un rapport entre adversaires datant d'une autre période. Il n'y a plus le bras de fer Sharon-Arafat, les échanges Olmert-Abbou Abbas ne sont manifestement qu'un épisode transitoire. Sans risque de se tromper, on peut pronostiquer que la mascarade de la feuille de route a vécu, pulvérisée entre la victoire du Hamas d'une part et la crise politique interne en Israël même d'autre part. l'un et l'autre de ces événements étant dus, de toute manière, à la résistance du peuple palestinien qui, une fois de plus, a déjoué tous les calculs de ses ennemis. Les colonies de Cisjordanie (plusieurs centaines édifiées depuis Oslo) ont du souci à se faire, tout comme les entreprises attelées à la finition du Mur de la Honte. Le peuple palestinien perçoit parfaitement comme une victoire le résultat du 25 janvier, et cela ne peut que lui donner le moral, quand son oppresseur est plongé dans la perplexité et l'angoisse.
Modifié le lundi 13 février 2006
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