Toute la dette est illégitime

Dès son arrivée, Macri a accordé des allégements de taxes à l’exportation,  a décidé la dévaluation du peso, la réduction des effectifs dans le secteur public, l’arrêt du contrôle des mouvements de capitaux, l’annulation des déclarations d’importations, la levée de la maîtrise des tarifs publics. L’inflation s’est accélérée. Puis l’augmentation démentielle des tarifs publics de 400% a provoqué une chute brutale du pouvoir d’achat de la population. Des « mesures nécessaires et inévitables » qui ne manquent pas d’intensifier la lutte des classes.

Alfonso Prat-GayAlfonso Prat-Gay

La population et les travailleurs subissent les mesures d’austérité mais Macri ne veut pas se couper de la finance internationale.

Le ministre des Finances, Alfonso Prat Gay, veut retrouver la confiance des investisseurs étrangers sinon il promet « des mesures fiscales terribles ».

La dette est un problème politique

Le ministère des Affaires étrangères du gouvernement Hollande est plutôt clair :

" Désireux de rendre à l’Argentine sa place sur les marchés financiers internationaux, le Président M. Macri a fait du règlement de contentieux avec les fonds spéculatifs dits « fonds vautours », une priorité. Ce litige, qui entravait le retour du pays dans le paysage financier international a été résolu en quelques mois, grâce aux négociations que le nouveau gouvernement a engagées avec les créanciers, dès son arrivée au pouvoir. L’Argentine s’est engagée à rembourser 4,6 milliards de dollars US en 2016 aux principaux créanciers » 1 .

La dette n’est pas, avant tout, un problème financier mais bien un problème politique. En décembre 2001, sous la pression des grèves et des manifestations monstres, le président De la Rua est contraint de prendre la fuite, la dette extérieure de l’Argentine s’élève alors à 144 milliards de dollars : c’est l’Argentinazo.

En Argentine, la dette est une institution, un monument. Un gouvernement lui a même consacré un musée, « el Museo de la Deuda externa », inauguré en octobre 2003. Car, en Argentine, la dette n’est pas seulement un sujet politique majeur, c’est aussi un drame national depuis les années 1970 quand la dictature militaire de Videla a fait exploser la dette extérieure du pays.

En plein Argentinazo, l’économiste Norberto Galasso disait déjà : “ L’Amérique latine devra un jour être tentée de dire : Je ne paye pas. Pour cela, il faut une grande force politique et un fort soutien populaire » 2 .

Pour l’indépendance politique des travailleurs

Les 19 et 20 décembre 2016, 15 ans après l’Argentinazo de décembre 2001, comme cadeau d’anniversaire, des milliers d’Argentins ont manifesté avec des partis de gauche et avec le nouveau front constitué par le MAS et le MST.

Le programme d’urgence du nouveau front est simple. Il est de gauche et socialiste. Il défend l'indépendance politique des travailleurs. Il propose de « lever les drapeaux contre le gouvernement de Macri, les organisations patronales, les gouverneurs de toutes les couleurs, les variantes de centre gauche et la bureaucratie syndicale » . Il pousse « à la plus vaste démocratie et à l'autodétermination des travailleurs à partir d’une perspective ouvrière et socialiste. Il propose un programme pour développer la mobilisation indépendante ouvrière et populaire contre le capitalisme. Il a la volonté de mettre en avant les revendications qui viennent, de la rue, des femmes et de la jeunesse. Sur cette base stratégique, le nouveau front avance un programme global de mesures de fond et de mesures transitoires contre la crise du capitalisme impérialiste ».

Pour des mesures d’urgence contre la crise

Voici un extrait de ces mesures contre la crise

« Non au paiement de la dette extérieure. Annulation de la dette internationale quels que soient les créanciers. De l’argent pour les salaires, l’éducation, les services publics, la santé et le logement, un vrai travail et un vrai salaire pour tous.

. Re-étatisation, sous contrôle ouvrier et (ou) une gestion des travailleurs et des utilisateurs, de tous les services publics privatisés.

. Re-étatisation de tout le système ferroviaire et du Metro de Buenos Aires sous contrôle et(ou) une administration ouvrière, avec participation des utilisateurs et pour un plan de déploiement du réseau ferroviaire.

. Nationalisation sans indemnité de tous les groupes pétroliers privés et d'YPF, à 100 %, sous contrôle étatique et (ou) une administration des travailleurs. Pour un plan national énergétique contrôlé par les travailleurs et les utilisateurs.

. Nationalisation de la banque et du commerce extérieur sans indemnisation et sous administration et (ou) contrôle des travailleurs, de l'industrie minière et du grand capital industriel et agraire. Pour un plan économique au service des travailleurs et du peuple » 3

Macri voit d’un mauvais œil les manifestations d’anniversaire aux grèves de 2001, il a raison. Il a compris qu’il risque le même sort que De La Rua. Le nouveau front fera tout pour que cela arrive.

Rémi Duteil,
30-12-2016

1. http://www.diplomatie.gouv.fr
2. www.marianne.net
3. http://as.mst.org.ar/

Modifié le lundi 09 janvier 2017
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