Un parti à géométrie variable...

Le PT de Lambert-Glückstein et la participation aux dernieres électionsOui aux cantonales, Non aux régionales pouvait-on lire sur les affiches du PT de Lambert-Glückstein placardées au moment des élections cantonales et régionales. Au moyen de ce slogan plutôt original, cette organisation appelait à boycotter les élections régionales. A la limite, pourquoi pas ? Mais, dès lors, pourquoi cette même organisation a-t-elle présenté des listes aux élections européennes, trois mois plus tard ? Essayons de comprendre.

Il y a de quoi s'interroger sur la signification de la participation du PT aux "européennes" après avoir lu ce que cette formation écrivait à propos de la participation aux "régionales". Ainsi, dans un tract du PT diffusé à Alfortville : "Ou bien l'on participe aux élections régionales pour mettre en place les" gouvernements régionaux " exigés par l'Union européenne [souligné par nous, NDLR] pour casser la République une et indivisible et tous les droits qui s'y rattachent / Ou bien on rejette la régionalisation, on participe au combat engagé pour l'abrogation du traité de Maastricht, la reconquête de tous nos droits, la renationalisation de tous les services publics, l'arrêt des licenciements et des délocalisations, la défense de la République une et indivisible". Et, dans la profession de foi d'une candidate du PT aux cantonales : "Avec les élections régionales du 21 mars, il s'agit d'installer des " gouvernements régionaux " qui recevront directement des subventions de l'Union Européenne. Ce serait " l'Europe des Régions " pour casser la République une et indivisible". On a bien lu : premièrement, participer aux élections régionales équivaut, au moins, si l'on en croit le PT, à renoncer au combat contre la régionalisation, contre Maastricht, pour l'arrêt des licenciements et pour les services publics ; deuxièmement, régionalisation et intégration européenne sont inextricablement liés, d'après le PT.

Commençons donc par confirmer qu'effectivement, la régionalisation et l'intégration européenne sont imbriquées l'une dans l'autre et doivent être combattues, l'une et l'autre, avec la plus grande intransigeance. En revanche, il est évident que le fait de participer ou non à des élections n'a rien à voir, ni de près, ni de loin, avec un soutien direct ou indirect à l'institution ou au système d'institutions auxquelles ces élections se rapportent. Et cela, les dirigeants du PT le savent parfaitement. A telle enseigne que dès le lendemain des régionales, la revue du courant communiste internationaliste du PT, courant plus qu'ultra-majoritaire de ce parti autoproclamé, rappelle comment Lénine envisageait la question du boycottage ou non des élections et cite, entre autres, ce passage où Lénine précise : "le boycottage n'est pas une lutte menée à partir d'une institution donnée, mais une lutte contre la naissance de cette institution". Or, les conseils régionaux, sous la forme que nous leur connaissons actuellement, élus au suffrage universel, doués de pouvoirs subsidiaires, sont nés il y a 18 ans. Cela ne signifie pas qu'on ne puisse en aucun cas envisager leur boycottage mais cela signifie, à tout le moins, que la participation aux élections régionales n'est pas équivalente au renoncement à combattre, non seulement la régionalisation, mais, plus largement, l'ensemble des institutions réactionnaires de l'Etat, c'est-à-dire le régime de la Vème république.

Y compris, on peut considérer que la question du boycott se posait, à plus forte raison aux européennes qu'aux régionales, du fait d'un découpage du pays en circonscriptions qui préfigurent cette " Europe des régions " qui se dresse contre les travailleurs, la population et l'ensemble des acquis de la classe ouvrière dans les différents pays. D'ailleurs, le niveau inégalé atteint par les abstentions aux européennes avait des allures de boycottage spontané, non ?

Pour notre part, nous n'avons pas appelé au boycott parce que nous avions fait le choix de soutenir inconditionnellement les listes LCR/LO. C'était une variante au boycott, qui n'élude en rien la question de savoir pourquoi le PT a décidé de présenter ses propres listes aux européennes après avoir " boycotté " les régionales. Soyons clair : c'est une volte-face. A l'évidence, le refus de " participer " aux régionales sur la base des arguments du PT impliquait, à plus forte raison, le boycottage des européennes et non cette campagne qui débouche sur un score peu engageant : 110 000 voix , à tout rompre. Dans le passé, à des élections comparables, le Mouvement pour un parti des travailleurs, dont le PT est issu, faisait davantage de voix bien qu'il y ait moins d'inscrit et un silence médiatique plus important autour de l'activité de ce Mouvement.

Reste à savoir le pourquoi de cette volte-face et nous avons quelques raisons de croire que la "participation" du PT n'avait d'autre principe que la division, pour affaiblir les listes LO.LCR. Ne lit-on pas dans la revue du courant communiste internationaliste que LO et la LCR "étaient (notamment la LCR) l'avant-garde de la régionalisation" (rien que ça !) ? Ne lit-on pas que "le vote de classe du 28 avril est aussi un coup contre la politique de LO et de la LCR qui prônent notamment la dénaturation de classe dans les forums sociaux " (forums dont LO n'a d'ailleurs jamais été partie prenante ")?

Mais à vouloir diviser et dénigrer à outrance, le PT s'est encore affaibli. Toutefois, nous ne ferons pas l'affront à Glückstein d'écrire à notre tour que les abstentionnistes du 13 juin ont porté un coup à la politique du PT.

Cet affaiblissement accuse d'abord et avant tout une orientation qui, sous couleur de combattre Maastricht et la régionalisation, épargne le gouvernement Chirac-Raffarin et, chemin faisant, épargne les institutions de la Vème république, s'inquiétant d'abord et avant tout du "démantèlement de la nation".

Cette orientation subordonne la défense des droits, de la démocratie et des conquêtes ouvrières dont le PT se réclame à "la république qui doit rester une et indivisible". Concrètement, où cela peut-il nous mener ? Au-delà de toute frontière de classe, assurément ; comme en témoignait ce meeting tenu l'automne dernier à Glaires, petite commune des Ardennes, où le responsable départemental du PT était à la tribune ... avec le député UMP des environs, ainsi que l'a relaté en son temps l'hebdomadaire du PT Informations ouvrières. Encore une fois, de quelle république "une et indivisible" s'agit-il ? N'y a-t-il pas là un cas flagrant de "dénaturation de classe" dans un meeting local commun avec...l'UMP !?

En ce qui nous concerne, le combat contre la régionalisation et contre Maastricht n'a rien à voir avec la défense de l'unité de la nation française ni avec un quelconque souverainisme, ce combat s'incarne dans la lutte pour en finir avec le gouvernement Chirac-Raffarin, il est basé sur la défense des intérêts des masses ouvrières et de la jeunesse, de leurs revendications et de leurs conquêtes sociales. De Londres à Paris, Budapest et Berlin. Contre tous les gouvernements en place.

Ce combat-là, la direction du PT l'aliène complètement, il l'avilit, le désosse, le dénature, après avoir tenté de le confisquer, en essayant de phagocyter le combat pour un nouveau parti ouvrier basé sur les besoins immédiats des plus larges masses, sur la défense des conquêtes sociales et droits démocratiques ouvriers et sur la rupture la plus complète avec tous les gouvernements, traités et régimes capitalistes. Un parti anti gouvernemental, anti impérialiste, internationaliste.

Ce combat-là, nous le continuons, aux côtés des salariés, des chômeurs, des travailleurs immigrés et des jeunes.
Modifié le mardi 21 juin 2005
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