La Grève générale en Guyane

Depuis plusieurs semaines les habitants de Guyane se mobilisent contre des conditions de vie et de travail d’une terrible précarité. Le peuple guyanais s’inscrit dans la lutte et la grève. Ce mouvement, d’une ampleur exceptionnelle, trouve ses racines dans le dénuement de la population et la disparition programmée des services publics. Les amérindiens, les plus pauvres des plus pauvres, trouvent dans le mouvement un écho à leurs propres revendications. L’unité des travailleurs est seule garante de la victoire de la grève générale, leur lutte est la nôtre.

La Grève générale en Guyane

Kourou ne répond plus

Ce grand mouvement n’est pas sans nous rappeler celui de 2008-2009 mené par le Collectif contre l’exploitation (LKP) en Guadeloupe. La mobilisation s’organise avec des barrages bloquant les endroits stratégiques et l’entrée de Cayenne. La grève générale, lancée par l’ Union des Travailleurs Guyanais (UGT) et effective depuis le lundi 27 mars, est suivie très largement par l’ensemble des salariés et des sans-emploi. Au grand détriment du gouvernement, Kourou ne répond plus. L’économie est bloquée, mais quelle économie ! Il faut un inventaire à la Prévert pour décrire la situation des guyanais.

Un département d’outre-mer dans le coma

La Guyane compte un peu plus de 200 000 habitants, le taux de chômage est estimé entre 20 et 25% de la population, tandis que chez les 18-25 ans ce sont presque la moitié d’entre eux qui pointent à pôle emploi. Selon l’ Insee, le taux de pauvreté s’élève à 19 % en Guadeloupe, 21 % en Martinique et 44 % en Guyane. Il faut savoir que l’Insee n’a pas retenu le seuil de pauvreté de 60 % du niveau de vie médian national, mais 60 % du niveau de vie médian du département, soit 558 euros. Une nouvelle tromperie de nos gouvernants qui ne voient dans les Dom-Tom que des paradis touristiques. Les services publics sont exsangues, au sein de l’éducation nationale les syndicats estiment qu’à ce jour, les besoins sont de cinq lycées, de dix collèges et de cinq cents classes de primaire. Plus de 3000 enfants de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés, plus d’un tiers de jeunes est en situation d’illettrisme. La politique de casse systématique de l’hôpital public fait des ravages. L’espérance de vie est de trois ans inférieur à celui de la métropole, le taux de mortalité infantile est de 12,1 pour 1000 naissances contre 3,7 en métropole en 2007, le taux de contamination au VIH était de 140 contre 50 en 2012. Le centre hospitalier de Cayenne présente un déficit de 45 millions d’euros et un retard de paiement de 25 millions, le Centre Médico-Chirurgical de Kourou est en passe d’être cédé au secteur lucratif privé. L’inventaire de la casse montre à quel point les gouvernements successifs ont sacrifié la Guyane.

Les peuples autochtones se mobilisent

Les Amérindiens sont aussi dans la rue et dans la grève. Les 10 000 Amérindiens (répartis en six peuples : Arawak, Kali’na, Palikur, Teko, Wayana et Wayapi) vivant en Guyane réclament le droit de disposer d’eux-mêmes. Leurs revendications sont multiples : la santé, le désenclavement de leurs villages, la préservation et la reconnaissance de leur culture ou l’arrêt des projets de méga-exploitation minière et de l’orpaillage illégal. L’orpaillage passe par l’utilisation du mercure. La déforestation qu’elle entraîne libère également le mercure présent dans le sol. Le mercure provoque dans la population la terrible maladie de Minimata qui se traduit par une perte de motricité, des décès d’enfants et des cas de folie. Le mercure Ingéré par les poissons, source principale d’alimentation des habitants provoque des troubles gravissimes, attaquant le foie ou les reins. La maladie s’attaque aux muscles, aux reins et au foie. L’État est responsable de ce désastre écologique et de la catastrophe sanitaire qui en découle.

Pour arracher les moyens de vivre

La question de la terre est centrale pour les peuples autochtones : la colonisation fait que 95 % du territoire guyanais est la propriété de l’ État français. Les Amérindiens revendiquent 400 000 hectares afin de préserver leurs coutumes et l’avenir de leur peuple. L’ensemble de ces revendications sont reprises par le collectif « Pou La Gwiyann dékolé ». Les travailleurs et la population de Guyane exige les milliards de L’État qui leur sont d û s, ils veulent les moyens de vivre, de se loger, de s’éclairer, de s’instruire, de se soigner.

La grève générale a imposé au gouvernement d’ouvrir des négociations, le blocage du site de Kourou est une carte maîtresse dans leur lutte. Mais le bilan de la grève de 2008 en Guadeloupe nous a enseigné que leur victoire ne sera possible que si les travailleurs de métropole sont à leurs côtés. Les directions syndicales doivent lancer un grand mouvement de solidarité pour faire plier l’État. Leur lutte est la nôtre, leur victoire sera la nôtre.



Francis Charpentier,
05 avril 2017

Modifié le vendredi 14 avril 2017
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