Sale temps pour Sarkozy

Chronique d'une fin de RégimeTravaillez plus pour gagner plus, cumulez un emploi avec votre retraite, créez votre auto-entreprise pour sortir du chômage,
telles sont les " paroles de Français " glanées par Sarkozy dans sa dernière prestation télévisée. Trois jours plus tard, le
Tout-petit-Napoléon fête ses 55 ans. Au même moment, le verdict de l'affaire Clearstream tombe comme un désaveu : de
Villepin est relaxé. Nous sommes le 28 janvier. La crise du Sommet est portée à incandescence. Tandis qu'à tous les niveaux de la société, la révolte couve.
Cette révolte, encore diffuse, a
gagné les magistrats. Le verdict
de l'affaire Clearstream est porté
par ce vent de fronde. Les juges n'entérinent
plus si facilement les réquisitions
du parquet. En relaxant de
Villepin mais aussi le journaliste Denis
Robert, ils ont fait acte d'insubordination.
De même, le 5 février, le verdict du
jugement des ouvriers de Continental,
jugés en Appel pour la mise à sac de la
sous-préfecture de Compiègne, aura
été bien en deçà des condamnations
réclamées par le Ministère public puisqu'aucune
peine de prison n'a
été prononcée contre les
ouvriers mis en cause. Dans
un autre registre, l'annulation
par le Conseil d'Etat de la suppression
de la publicité sur les
chaînes publiques de télévision,
le 11 février, résonne
comme un désaveu pour
Sarkozy.



La révolte des magistrats





Dans " Le Monde " du 9
février, le journaliste Alain
Salles dresse un premier bilan
de la crise qui se noue entre le
gouvernement et la magistrature : "
jugement Clearstream, décisions annulant
des gardes à vue, contre-rentrées
des tribunaux où les magistrats expriment
bruyamment leur opposition au
projet de suppression du juge d'instruction,
et même résistance au plus haut
niveau de la Cour de cassation : les
"petits pois" - c'est ainsi que Nicolas
Sarkozy avait désigné les magistrats de
la Cour - se rebiffent. Le jugement de
relaxe de Dominique de Villepin dans
l'affaire Clearstream, comme avant lui
les sévères condamnations infligées aux prévenus de l'Angolagate, en octobre
2009, ont donné du baume au coeur
d'une magistrature affaiblie depuis le
scandale de l'affaire d'Outreau
. " Il
poursuit : " La polémique soulevée par
l'appel du procureur de Paris, Jean-
Claude Marin, contre la relaxe de
Dominique de Villepin, même si l'appel
était logique en droit, souligne l'opposition
entre juges du siège indépendants
et un parquet soumis à l'autorité hiérarchique
de la chancellerie. Les juges du
siège affirment ainsi leurs prérogatives
en rendant des décisions non conformes aux réquisitions des procureurs et
aux souhaits du pouvoir
. " Les magistrats
remettent en cause la validité des
garde-à-vue, provoquant l'ire des syndicats
d'Officiers de Police.
Ainsi commence un authentique bras
de fer dont la cause est le projet de
réforme de la justice qui prévoit la mise
à mort du Juge d'instruction et l'extension
des pouvoirs du parquet. Tant et si
mal que dans son discours de rentrée,
Madame la Présidente du Tribunal de
Melun s'insurge : "l'annonce de la suppression
du juge d'instruction ou celle
de l'extension du plaider coupable vont
dans le sens d'un juge dont le rôle se
réduit à homologuer ou valider des décisions
déjà prises par un parquet qui reste
placé sous l'autorité du pouvoir exécutif
".



Fin de la "fin de crise"





Ainsi, la crise du régime tourne à la
crise de la machine d'Etat, elle-même,
suscitant les éléments de la dislocation
de l'appareil de l'Etat Bourgeois. Cette
aggravation de la crise
politique intervient au
moment où prend
fin... " La fin de la crise
" que l'on nous annonçait
depuis des mois.
Le PIB, pour l'année
2009, affiche une baisse
de 2,2%. Le pire
résultat depuis 1945.
Le CAC 40 replonge
dans la zone rouge
des 3600 points. En
2009, 412 000
emplois ont été perdus
dans l'emploi
salarié, selon l'Insee
.
Sur un an, l'emploi
salarié a baissé de 2,5% à 16.019.000
personnes occupées, selon ces mêmes
statistiques. Autant de chiffres qui
démentent l'optimisme de façade qu'affichait
Sarkozy lors de son émission
égocentrique " face aux Français ".
Autre donnée du moment présent, celle
que délivrent les sondages sur la popularité.
Selon le baromètre TNS SOFRES
de février, " la cote de confiance de
Nicolas Sarkozy atteint son plus bas
niveau avec 31% Français qui lui font
confiance
". Dans ces conditions, comment
ce gouvernement, à ce point affaibli et miné de l'intérieur, pourrait porter
le coup de grâce aux retraites ? Il est
vrai que les retraites sont d'ores et déjà
gravement remises en cause par les
réformes successives : lois Balladur,
Fillon, réforme des régimes spéciaux.



Retraite ou déchéance ?





En conséquence, les pensions se ramènent
à des pécules de misère et le droit
à la retraite devient pour la majorité des
retraites, le droit à la déchéance, incitant
les gens à travailler à nouveau
après leur départ à la retraite. Et, il en
sera ainsi si les " 37,5 " ne sont pas
rétablis ainsi que le calcul au minimum
sur les 10
m e i l l e u r e s
années dans le
Privé. D'ailleurs,
tous ces dirigeants
syndicaux
ou " de
gauche " qui
p r é t e n d e n t
défendre les
retraites en faisant
l'impasse
sur le nécessaire
retour au 37,5
suggèrent ou
bien de reculer
l'âge légal à 62
ans (Aubry) voire
67 (Cohn-
Bendit, moyennant une réduction du
temps de travail en fin de carrière) ou
alors d'augmenter les cotisations sociales,
ce qui revient à attaquer le salaire
direct, le pouvoir d'achat immédiat des
salariés. Ainsi, Eric Aubin, bras-droit de
Thibault chargé des retraites a dit clairement
qu'il ne ferme pas la porte "à une
hausse des cotisations salariales, en
parallèle bien entendu à celle des cotisations
patronales" (voir Les Echos. 27
01 09 ; Retraites : la CGT détaille ses
propositions). On n'en croit pas ses
yeux : comment un dirigeant syndical
peut-il s'attaquer à la fiche de paie ? A
cette étape, tout se passe comme si les
"partenaires sociaux " et les leaders de
la gauche étaient en train d'élaborer
eux-mêmes le dernier volet de la réforme
des retraites commencée en 1993, à la place du gouvernement.



Des bulldozers "PCF" contre les mal-logés.





Autre droit fondamental sans cesse
piétiné, le droit au logement vient de
subir un nouveau coup, du côté où on
ne l'attendait pas forcément. En effet,
c'est la municipalité PCF de Bagnolet
qui vient d'expulser, le 10 février, en
pleine hiver, en période de grand froid,
80 mal-logés et sans logis, comment en
témoigne le communiqué du DAL dont
voici un extrait : " Environ 80 personnes,
et quelques enfants ont été
expulsé ce matin, par d'importantes
forces de police. l'immeuble est en
cours de destruction avec les biens
des occupants
. Certains habitaient là
depuis 10 ans. Il s'agissait d'un immeuble
de logements, appartenant à la mairie
de Bagnolet, qui selon certaines
sources aurait été revendu récemment
à une filiale du groupe Auchan pour
construire des logements. Aussitôt
expulsés, les bulldozers se sont mis au
travail, détruisant les biens des expulsés
restés dans l'immeuble. l'huissier
de justice présent sur les lieux a répondu
que la mairie avait refusé de louer
un garde meuble. Aucun inventaire des
biens n'a été dressé, en violation avec
le code des procédures civiles d'exécution qui régit le travail des huissiers de
justice. Le commissaire en charge
d'exécuter l'expulsion a assisté à la destruction
des bien sans broncher. Devant
être reçus par un adjoint au logement,
les expulsés ont alors attendu en vain
2h sous la neige, devant la mairie de
Bagnolet, puis ont été se mettre à l'abri
dans un gymnase voisin, vers 15h. Un
responsable de la préfecture de St
Denis dépêché sur place a fait évacuer
la gymnase par les gardes mobiles à la
demande du maire. Les expulsés à nouveau
la rue se sont rassemblés et
remontent vers l'immeuble en cours de
destruction.
" . Ce n'est pas sans un
profond sentiment de dégoût que nous
citons ce témoignage. Honte à
cette gauche qui n'en est pas
une !

Cet acte barbare survient
quelques jours à peine après la
publication du rapport de la
Fondation Abbé Pierre sur le
mal-logement, qui décrit longuement
la souffrance des
enfants, première victime de
cette crise du logement dont la
Fondation ne cache pas qu'elle
provient au moins du " manque
de volontarisme des pouvoirs
publics ". Ainsi, plus d'un million
de personnes sont privées d'un
logement. "On compte parmi
eux aussi bien les 100 000 personnes
sans domicile, que les
250 000 hébergés dans le cadre de
dispositifs collectifs, les 100 000 personnes
qui résident de façon permanente
dans des campings, les 150 000
contraintes à un hébergement chez des
proches, ou encore les quelque 300 000
qui vivent dans des conditions atypiques
.
" précise le rapport. S'y ajoutent
un million de personnes abritées dans
des habitations indignes. Dans le
même temps, des municipalités de toutes
obédiences, poursuivent, c leurs
programmes de démolition de dizaines
de milliers de HLM, de centaines de
quartiers populaires désignés comme "
zone urbaine sensible ".

Daniel Petri

12 février 2010

Modifié le dimanche 21 février 2010
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