Unité ouvrière, pour l’abolition de toutes réformes destructrices, pour les salaires et pour l’emploi !

Notre point de vue

La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 47 – mercredi 23 mai 2018

Il y’aura donc le 26 mai. Pour l’égalité, la justice, la solidarité, affirment les organisateurs. Vaste programme. Aussi beau et virtuel que « liberté-égalité-fraternité ». Qui pourrait s’y opposer ? Hormis la bande à Macron, la clique de Wauquiez et le FN, personne.
Concrètement et logiquement, Egalité-Justice-Solidarité, cela commence par l’abolition de toutes les réformes destructrices, par l’augmentation générale des salaires et des effectifs, par l’abolition du travail précaire, l’arrêt total de tous les licenciements, l’arrêt des violences policières de l’Etat et de la répression qui frappe les syndicalistes et les jeunes. Oui, mais le « 26 mai » va-t-il dans ce sens-là ? Nous ne le pensons pas.

Unité ouvrière, pour l’abolition de toutes réformes destructrices, pour les salaires et pour l’emploi !
Contenu

« Alternatives » ou riposte unie ?

Les coulisses du « 26 »

Mélenchon-Martinez portent un coup sévère à la CGT

Les deux versions d’une même diversion

« Aller plus loin », mais vers où ?

« Y aller » ou pas.

Point de vue d’Éric, cheminot à Saint-Pierre des Corps (extrait)

A l’heure où nous écrivons ces lignes, les salariés de Carrefour apprennent que près de 300 magasins sont voués à la fermeture, dès le mois de juillet. Il y’a quinze jours, la police a matraqué et gazé des étudiants pacifiques à l’université de Grenoble. Dans le même temps, la grève des cheminots « tient » dans des conditions rendues difficiles par une intersyndicale qui se situe sur le terrain de la Concertation-trahison avec Macron. Pendant ce temps-là, les salariés des catacombes combattent, par la grève unie, pour l’augmentation de leurs effectifs et des conditions de travail décente. Les grèves sont nombreuses, en particulier depuis le mois de mars.

« Alternatives » ou riposte unie ?

Parallèlement , depuis plusieurs semaines (au moins depuis le 14 avril), se nouent des tractations entre Mélenchon et Martinez en vue de la « marée populaire » du 26 mai. Autour de cet axe Mélenchon-Martinez gravitent groupes, partis, associations signataires de l’appel « unitaire » à ce « rendez-vous citoyen ». Ici la référence à Egalité-Justice-Solidarité est la sauce qui fait passer le merlan.

L’appel à ce « rendez-vous citoyen » nous donne pourtant une idée de l’objectif poursuivi : « « Il s'agit maintenant d'aller plus loin et, toutes et tous ensemble, d'affirmer dans la rue que des alternatives existent, que nous ne nous résignons pas au sort que nous promet ce gouvernement. »

Des alternatives existent. Ah bon ? Quelles alternatives ? L’appel ne le dit pas. Ce mot « alternatives » est l’inconnue de l’équation du 26 mai. Aucune explication de texte ne peut résoudre des équations… Au mieux, cela s’appelle : tourner autour du pot au feu.

L’heure n’est pas aux « alternatives », l’heure est à la riposte unie pour arracher le retrait et l’abrogation des réformes, pour arracher l’augmentation générale des salaires et des effectifs, l’arrêt des licenciements et des fermetures d’entreprises. Sans cela, il n’est pas « d’alternatives » favorables aux salariés et à la population qui tiennent.

Les coulisses du « 26 »

Pour notre part, nous ne ferons pas semblant d’oublier ou d’ignorer que le « 26 » va très nettement dans le sens du combat que mène Mélenchon depuis des mois pour « fédérer le peuple » autour du « tribun du peuple » qu’il prétend être.

Il suffit de lire ce que JLM écrivait sur son blog Ere du Peuple, le 16 mai, pour en être édifié :

« Je veux revenir ici sur le fond de la stratégie qui se déploie . Pour nous, les insoumis, l’événement du 26 mai en soi est une très bonne nouvelle. Depuis des mois, ici et dans mes revues de la semaine, je plaide au nom de mes amis insoumis pour le « décloisonnement » du syndical, de l’associatif et du politique. C’est le choix de stratégie auquel était arrivée le groupe parlementaire après la marche du 23 septembre dernier contre les ordonnances sur le code du travail. L’assemblée représentative du mouvement l’a décidé à l’occasion de la préparation de la marche du 5 mai. Bref, c’est déjà toute une histoire avec ses dates et ses moments fondateurs.

Depuis, nous avons travaillé avec patience et dans toutes les directions pour convaincre et, davantage encore, pour créer les conditions qui rendent désirable cette formule. Je n’ai jamais caché ici qu’à mes yeux le slogan un peu abstrait que nous avons défendu dans la présidentielle « fédérer le peuple » trouvait sa forme concrète dans ce type de démarche . » 1

Le même 16 mai, Martinez a annoncé officiellement la participation de la CGT au « 26 ». Or, l’appel au « 26 » était déjà prêt le 3 mai. Il avait été décidé par un « cadre commun » créé le 17 avril sous la houlette d’ATTAC-Copernic. Composition de ce groupe : « La CGT, Union Solidaires, Snesup FSU, le Syndicat de la magistrature, Attac, la Fondation Copernic, Femmes Égalité, Convergence pour les services publics, Eric Coquerel député FI, Ensemble, NPA, PCF, PCOF, PG, Reso, le Collectif mis en place par F. Ruffin pour préparer la manif "Pot Au feu" du 5 mai . » 2

Le « 26 » a donc d’abord été tramé en coulisses. C’est un « rendez-vous » imposé par des appareils et appareillons, dans le dos des bases syndicales, consultées une fois que tout a été tramé par des leaders de diverses obédiences.

Mélenchon-Martinez portent un coup sévère à la CGT

Comme toujours, les médias capitalistes s’en mêlent : «Avant même cette journée, le député des Bouches-du-Rhône (JLM) a remporté une première victoire. Mercredi 16 mai, la CGT a en effet annoncé qu'elle allait manifester aux côtés de La France insoumise le week end prochain alors que le syndicat avait toujours refusé une telle association au nom de son indépendance. "Le fait que la CGT participe et soutienne la manifestation du 26 mai, il a fait un coup politique magistral. C'est une vraie victoire politique", assure Christophe Jakubyszyn. Selon le journaliste de LCI, cela signifie que le leader de gauche a "commencé à aller vers ce qu'il souhaite » Avec en titre « " Mélenchon fait un coup politique magistral". Voilà qui donne un premier aperçu de la promotion médiatique du personnage dans les jours qui viennent.

En réalité, Mélenchon et Martinez, de concert, ont porté un coup sévère contre la CGT, contre ses principes fondateurs d’indépendance. Les médias institutionnelles ne vont pas s’en plaindre, bien au contraire. Elles applaudissent le tribun-du-peuple 3

Ainsi, devant le Grand Jury RTL de ce dimanche 20 mai, JLM ne sent plus : « "Je milite pour une forme d'unité populaire qui décloisonne le syndicalisme, la politique et le monde associatif , a affirmé Jean-Luc Mélenchon lors du "Grand Jury" sur RTL. Le syndicat ne fait pas de politique, il joint ses efforts à ceux de la politique."

Le syndicat, dans la vision mélenchoniste des choses, se voit relégué au rang d’accessoires « des politiques ». Ou plutôt du « Politique » qu’est Mélenchon. Par politesse, les syndicats seront placés en tête des cortèges. Les accessoires peuvent aussi servir de bouclier…

A l’attention de ces organisations qui se rallient, nous continuerons à citer sans relâche le « fond de la stratégie » mélenchoniste :" Je suis passé à une autre stratégie : fédérer le peuple. (..). En passant du clivage gauche-droite à celui qui oppose l’oligarchie au peuple, en passant de « l’intérêt de classe » à « l’intérêt général humain » » 4

Les deux versions d’une même diversion

D’autre part, à l’intérieur du cadre commun, deux lignes s’affrontent : la ligne mélenchoniste, d’une part, et la ligne contre laquelle le « tribun » polémique en boucle : celle de la nouvelle union de la gauche portée par Besancenot-Hamon-Laurent. Ce qui fait de cet « ensemble » un panier de crabes. Sous les dehors de l’unité affichée en devanture, se livre une lutte à fleurets mouchetés entre les uns et les autres.

Ainsi, pour résumer

Le 26 mai, ce ne sera pas une manifestation pour l’abrogation-le retrait des réformes, à commencer par le « pacte ferroviaire », « action publique 2022 » (réforme de la fonction publique), et réforme ORE (université), ce ne sera pas une manifestation pour les revendications vitales.

Ce sera une grande diversion, dans toutes ses versions !

Pour notre part, nous savons que le plomb ne se laisse jamais transformer en or.

« Aller plus loin », mais vers où ?

A tous ceux qui espèrent un débordement, nous rappelons que, jusqu’à présent, les « débordements » ont toujours commencé par des initiatives « d’en bas », des grèves imposées par la base. Jusqu’à présent, ils n’ont jamais commencé par des combinaisons d’en haut, sur un terrain balisé d’avance. Voilà pourquoi, nous ne spéculons pas sur un très hypothétique débordement du « 26 » ou sur la possibilité, plus qu’aléatoire, que le 26 puisse donner de l’élan aux grèves et à leur généralisation.

Une chose est sûre à nos yeux : le « 26 » a été construit de toute pièce contre « le débordement » partiel ou général », contre ce que certains appellent « la convergence des luttes ».

De ce point de vue, l’appel au « 26 » est translucide : « « Le gouvernement espère que ces mobilisations sectorielles restent isolées et qu'il pourra les défaire les unes après les autres en tenant bon, en les laissant s'épuiser ou en les réprimant. Affichant sa détermination, il espère ainsi nous décourager. Il se trompe, comme le montre la multiplication des collectifs citoyens en lien avec les salarié.es, les retraité.es et les étudiant.es ainsi que le succès de la solidarité aux grévistes, notamment à ceux de la SNCF. Il s'agit maintenant d'aller plus loin et, toutes et tous ensemble, d'affirmer dans la rue que des alternatives existent, que nous ne nous résignons pas au sort que nous promet ce gouvernement. » La seule mesure concrète déclinée par les auteurs de l’appel au 26, c’est « la multiplication des collectifs citoyens » « en lien » avec les grévistes salariés et étudiants. Car pour ces organisateurs, « aller plus loin » signifie « affirmer dans la rue que des alternatives existent ».

« Y aller » ou pas.

Reste la question : « y aller ou pas », « y aller quand même », « y aller malgré tout », « y aller sur nos propres mots d’ordre ». Cette question relève du libre débat. La réponse n’est écrite dans aucun livre. Il n’existe aucun impératif catégorique qui nous obligerait à y aller ou bien nous ordonnerait de ne pas y aller.

Nous considérons librement que cette manifestation ne va pas dans le sens de l’unité d’action pour l’abolition des réformes et de la satisfaction des revendications vitales et donc pas dans le sens de « chasser Macron ».



23 mai 2018


ANNEXE :

Point de vue d’Éric, cheminot à Saint-Pierre des Corps (extrait)

« (…) Cette semaine est à l image du reste, on finit une période de grève le vendredi ou le samedi pour certains, on attaque la semaine par une journée pour la fonction publique après c est les cheminots et on attend le samedi pour casser la gueule à Macron, j en ai rien à foutre de casser la gueule à Macron, on n est pas capable de se défendre pour retirer cette putain de réforme qui va elle nous casser la gueule .

Le seul truc que je voie c’est que les copains, tous les copains (même les autres OS) s’épuisent moralement et financièrement, on nous trimbale comme dans une corrida avant la mise à mort !!!

Alors, je ne veux pas baisser les bras et dire que le combat est perdu, mais restons vigilant face à ces requins. (…) »





1 https://melenchon.fr/2018/05/16/le-26-mai-une-bonne-idee-a-fait-son-chemin/

2 http://fdgpierrebe.over-blog.com/2018/05/ou-en-est-on-sur-la-journee-citoyenne-de-manifestations-du-samedi-26-mai.html

3 « Là, je suis le tribun du peuple - j'en suis fier . » https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/0301004330722-jean-luc-melenchon-je-suis-un-independantiste-francais-2137436.php

4 Jean-luc Mélenchon – le choix de l’insoumission – page 322 – seuil éditeur, sept.2016.

Modifié le mercredi 23 mai 2018
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