POUR LA SNCF UNE ET INDIVISIBLE – SERVICE PUBLIC UNIQUE AU SERVICE DU PUBLIC

USAGERS –CHEMINOTS MEME COMBAT

(Par Daniel Petri, cheminot retraité du Matériel)
La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 33 – jeudi 22 février 2018

Le rapport Spinetta commandé par Macron sur la SNCF n’a rien d’un scoop. Ce rapport est la suite logique des réformes de la SNCF de 1997 et 2014. Le bilan de ces réformes est lourd. Chaque jour, les usagers en souffrent tandis que les conditions de travail des cheminots se dégradent. Quant au Statut des cheminots, il est d’ores et déjà salement embouti par la réforme de leur régime de retraite de 2007 et la réforme de 2014. Le trafic est désorganisé. La vie du rail n’est pas belle  du tout.

POUR LA SNCF UNE ET INDIVISIBLE – SERVICE PUBLIC UNIQUE AU SERVICE DU PUBLIC

Point n’est de chercher midi à 14 heures pour connaître la cause des pannes, incidents, retards qui perturbent tous les jours le trafic et la vie de millions de salariés qui prennent le train pour se rendre à leur poste de travail : l’hémorragie des effectifs cheminots. A cette saignée des emplois, s’ajoute le recours massif à la sous-traitance. Mais aussi, les fermetures de lignes, de gares, de dessertes remplacées par des cars.

Toujours plus hypocrite, Macron et ses ministres nous disent qu’il faut réformer la SNCF parce que la situation est devenue alarmante…du fait des réformes antérieures. Le véritable mobile de cette frénésie de réformes est : l’ouverture du trafic voyageur à la concurrence « européenne ».

Cette concurrence sur rail existe déjà pour l’acheminement des marchandises, le Fret ferroviaire. Résultat : le trafic de marchandises par trains s’est considérablement « rétracté », au régime du « tout-en-camion » qui sature les routes. Il faudrait même insister sur la généralisation périlleuse du transport de matières dangereuses qui il y a encore vingt ans se faisait essentiellement par rail. Il existe également un train de voyageur privé en « trafic international », le Thello qui va en Italie depuis la gare de Paris-Lyon : rames vétustes, personnel sous-payé et nombreuses pannes de chauffage et autres en parcours.

Insistons sur ce point : la concurrence sur les réseaux ferrés n’avait jamais existé. Avant la nationalisation de la SNCF en janvier 1938, les compagnies privées se partageaient le réseau. Ainsi, la compagnie Paris-Lyon-Méditerranée détenait le MONOPOLE du réseau Sud Est, pour ne prendre que cette société. L’unification des réseaux en 1938 en une seule Société nationale fut, en son temps un progrès.

La SNCF était UNE et INDIVISIBLE. Et elle s’affichait comme SERVICE PUBLIC AU SERVICE DU PUBLIC. Son statut en faisait une entreprise « pas comme les autres » c’est-à-dire qu’elle n’était pas soumise au critère de rentabilité financière, dans le fameux « MODELE SOCIAL 1945 » que Macron veut abattre, dans les brisées des gouvernements précédents.

En 1997 : la réforme JUPPE-PONS a créé RFF. Comme l’a écrit alors un journaliste de l’Huma, la SNCF perdait ses rails : la gestion de l’infrastructure (voies, bâtiments, ouvrages d’art, gares, sous-stations électriques, caténaires) était donc « confiée » à RFF. Néanmoins, les dizaines de milliers de cheminots affectés à l’Equipement-Infrastructures restaient à La SNCF.

En 2014 : la réforme VALLS-CUVILIER reconfigure l’ensemble, comme un Holding (ce que voulait le ministre « communiste » GAYSSOT de Jospin, prônant « une réforme de la réforme » lorsqu’il succéda à PONS en juin 1997). Cela a donné une SNCF-Réseau englobant les cheminots de « l’infra » (ex- Equipement) d’un côté et une SNCF- mobilité chargée de l’exploitation dans l’optique de la concurrence « européenne », ces deux SNCF étant « chapeautées » par une troisième SNCF censée coordonner les deux entreprises séparées, sous l’égide de Guillaume Pepy dans le rôle du Capitaine d’industrie. Chacun comprendra que ce cloisonnement favorise les incidents, les pannes et tout ce que nous vivons au quotidien, comme à chaque fois que l’on multiplie les donneurs d’ordre. Cela donne au mieux une armée, mais sans la discipline…

Le but de cette réforme encore inachevée était, répétons-le, l’ouverture à la concurrence. Dans cette perspective funeste, SNCF-réseau va louer des sillons à des opérateurs différents. Un sillon équivaut à un parcours dans un temps imparti. Exemple : Paris-Marseille de 15 heures à 18 heures. Voilà ce qui nous pend au nez ! SNCF-Réseau, « partenaire » de SNCF-mobilité va donc louer des sillons à des concurrents et SNCF-Mobilité prendre des actions chez les concurrents. Pour ce faire, il faut que la SNCF devienne une société anonyme : c’est une « dénationalisation » complète, même si l’Etat, pour l’instant unique actionnaire, reste majoritaire ( du fait de la place des chemins de fer dans la « défense nationale », par exemple). LA CONCURRENCE du point de vue fondamental de la SECURITE DES CIRCULATIONS qui nécessité l’unité de commandement et d’action représente UN DANGER POTENTIEL GRAVE

Cette ouverture à la concurrence est un « impératif catégorique » dicté par Bruxelles au nom de la concurrence libre et non faussée contre laquelle nous avions majorité voté en 2005. Elle constitue par la même un déni de démocratie.

Nous avons dit que le Statut des cheminots a été sérieusement diminué. Mais, reste la garantie de l’emploi. Laquelle ne fut pas un cadeau de bienvenue aux salariés qui entraient à la SNCF.. Nombre de métiers sont spécifiques aux chemins de fer : en moyenne, un agent devient maître de son poste au bout de cinq ans et apte à initier sur le tas les nouveaux embauchés : une partie du savoir-faire ne s’acquiert que dans la pratique quotidienne, dans bien des postes. La garantie de l’emploi, en son temps, fut une initiative des patrons du rail. D’un point de vue technique, elle tombait sous le sens. Le « turn over » aurait eu, à n’en point douter, un effet dévastateur.

La garantie de l’emploi était un facteur d’ordre, dans le bon sens du terme : du point de vue REGULARITE et SECURITE FERROVIAIRE, de CONTINUITE DES SERVICES .

Depuis 2014 , la SNCF peut embaucher les jeunes au régime de la convention collective de droit commun. Le nombre de cheminots « contractuels » (en CDI de droit commun) a « explosé » ces vingt dernières années.

Reste pour les cheminots qui sont encore au Statut, la garantie de l’emploi qui contraint la direction SNCF à reclasser les agents dont le poste est supprimé et ceux qui sont devenus médicalement inaptes à leur poste. Du point de vue des capitalistes et de leur gouvernement, c’est une contrainte insupportable qui les empêche encore de faire des effectifs « une variable d’ajustement ».

Bien sûr, des commentateurs médiatiques bon chic, bon genre, vont se ruer sur les « privilèges » des cheminots. Qu’ils montrent leur feuille de paie et notes de frais, ça ira plus vite. Sans parler des parlementaires qui voyagent à l’œil. Qu’ils ne perdent pas de vue que le trafic est assuré 7 jours sur 7, 365 jours par an et qu’ainsi même, des cheminots très nombreux travaillent ou ont travaillé plusieurs années de nuit, de matinée, de soirée ou « d’extrême soirée », ou alors montent des « astreintes », souvent en « extérieur-nuit » et sans notion d’intempéries ou pas. Ils omettront de préciser qu’à la fin des fins, ce sont les usagers qui se font rouler par ces réformes, tous les jours .

Pendant que la presse capitaliste va tirer sur l’ambulance, Gouvernement et Direction de la haute- SNCF ont pour les syndicats les yeux de Chimène. Ils leur font de belles déclarations jurant qu’ils aiment la SNCF et qu’ils veulent la sauver de « la mort lente » alors qu’ils l’engagent dans la voie de la « mort sûre ».

Une dépêche AFP de ce mardi 20 février annonce :

« Le président de la SNCF Guillaume Pepy a affirmé mardi qu'il ne s'attendait pas à une grève des cheminots pour protester contre la réforme de la SNCF, estimant que "la concertation" permettra d'éviter un tel mouvement.

"Les cheminots, les syndicats de cheminots, ils ont intérêt à ce qu'il y ait un avenir pérenne pour la SNCF, donc moi je suis persuadé que l'écoute, la concertation, la négociation vont permettre d'éviter une grande grève", a déclaré M. Pepy sur la radio France info.

"Plus il y a de concertations, moins il y a de tensions", a-t-il ajouté, reconnaissant toutefois que "l'inquiétude" est présente chez les cheminots, après la présentation la semaine dernière du rapport Spinetta, qui présente des pistes de réformes pour la SNCF.

La ministre des Transports Élisabeth Borne a reçu lundi les quatre syndicats représentatifs du groupe, qui ont chacun réaffirmé leurs "limites" quant à ces pistes sur l'avenir du groupe ferroviaire.

Le premier syndicat de la SNCF, la CGT-Cheminots, qui appelle à la mobilisation le 22 mars, n'a pas prévu de "grève nationale" ce jour-là. Mais la suite dépendra de ce que va annoncer le Premier ministre Edouard Philippe, a-t-il prévenu.

Jean-Cyril Spinetta a, lui, espéré qu'à l'issue des concertations, "des décisions raisonnables, qui sont celles que recommande le rapport, pourront prévaloir".

Pourquoi tant d’empressement pour la « concertation » avec les syndicats ? Quel besoin le gouvernement éprouve-t-il de se concerter avec les syndicats pour toute réforme et toute Ordonnance ?

Poser la question, c’est y répondre : sans le concours direct ou indirect, contestataire ou constructif, le gouvernement et Pepy sont impuissants. Il ne s’agit pas seulement de prévenir d’éventuelles grèves mais aussi de se prévaloir auprès de l’opinion publique d’avoir obtenu un consensus, même mou et de faire passer sans douleur ses traitements de choc. Il faut domestiquer les syndicats, faire en sorte qu’ils deviennent « sur le terrain », « co-auteurs et acteurs de la réforme », intervenant pour le Meilleur du Pire.

Usagers, cheminots actifs et retraités, nous sommes donc tous en droit d’attendre de nos syndicats CGT FO SUD ( et les autres s’ils veulent bien guérir de la jaunisse, au moins une fois ), de rompre immédiatement tout jeu de « dialogue social » sur ordonnance et « rapports ».

Dès maintenant, nos organisations syndicales peuvent en appeler aux usagers et à la population, pour la défense de la SNCF et de tous les services publics, pour le retrait du projet de changement de statut de la SNCF qui se trame et l’abrogation des réformes de 1997 et 2014, pour une sncf une et indivisible – service public au service du public !



Daniel Petri,
21-02-2018

Modifié le jeudi 22 février 2018
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