Macron, le précieux ridicule face à la crise de l’Armée

La Lettre de La Commune, nouvelle série, n° 7 – samedi 22 juillet 2017

Un crétin des Alpes n’aurait probablement jamais gesticulé comme Macron. Transformer la commémoration de la rafle du Vél d’Hiv en meeting pro-sioniste, il fallait oser. S’en prendre publiquement au général commandant toutes les armées un 13 juillet, il fallait le faire. Voilà qui pourrait paraître anecdotique. Pourtant, en se « posant » ainsi, Macron déchaîne la crise de l’État. Pour un peu, l’armée serait au bord de… l’insoumission.

Macron, le précieux ridicule face à la crise de l’Armée

Le chef d’État-major des armées Pierre De Villiers a donc démissionné en expliquant clairement qu’il ne se reconnaît pas dans le « modèle d’armée » de l’exécutif. Tout avait commencé par l’audition de ce général devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale. Ce n’est pas « sur la place publique » mais à huis clos que De Villiers a mis en cause une coupe de 850 000 millions dans le budget militaire. La réaction publique de Macron est celle d’un autocrate bouffi d’arrogance et une invitation faite à ce général à : « se soumettre ou se démettre ». La veille du 14 juillet devant un aréopage de militaires gradés, Macron avait donc lancé : « je suis votre chef, il n’est pas digne d’étaler certains débats sur la place publique ». Le ridicule, certes, ne tue pas, mais peut provoquer des dégâts irréparables.

« Une crise extrêmement grave » (Général Desportes)

Du côté de « l’opposition », l’attitude de Macron suscite une envolée de boutique. Mais, la réaction la plus significative est celle du Général Desportes.

« nous sommes devant une crise extrêmement grave – il faut se rappeler qu’il n’y a pas eu de tensions politico-militaires à ce niveau depuis le 21 avril 1961 – il y a plus d’un demi-siècle – (putsch des généraux d’Alger) - nous sommes devant une crise institutionnelle grave - [de Villiers] a été poussé à la démission pour avoir dit à huis clos devant la représentation nationale – pour avoir donné son avis technique devant les députés – On est dans un État aujourd’hui où l’exécutif ne supporte pas que ses plus hauts fonctionnaires donnent leur appréciation devant les élus de la France, je pense que c’est une situation – on lui reproche [à De Villiers] quelque chose qu’il n’a pas fait. Macron lui a donné une humiliation totalement gratuite, il l’a accusé devant l’ensemble de ses collaborateurs, ce qu’aucun manager ne fait. Macron a brisé le lien de confiance avec l’armée – l’institution militaire est aujourd’hui stupéfaite ». [1]

Une crise de l’armée qui vient de loin

En retraite, le Général Desportes, ancien instructeur de l’ABC [2] , professeur à Science Po s’était déjà manifesté dans le passé. Dans son ouvrage, Les plaisirs du journalisme, Claude Angeli le rappelle :

« en 2007, lors de diverses rencontres à l’École militaire, quelques généraux évoquent l’idée d’intervenir publiquement (…). Des généraux, des amiraux et hauts-gradés, en activité ou en retraite (…) rédigent un texte qu’ils signent « Surcouf » - « Ce texte au parfum gaulliste met Sarkozy hors de lui. Ses auteurs y taillent méchamment en pièce le Livre blanc de la Défense ». [3]

Claude Angeli relate ensuite que le général Desportes « devient le premier militaire de haut rang à mettre en cause un engagement militaire de la France », à savoir la guerre en Afghanistan.

Ce que l’on appelle les OPEX (opérations extérieures), sont au cœur de la crise de l’Armée depuis longtemps. Les généraux n’y emmènent pas les troupes, la fleur au fusil.

Face à la coupe budgétaire présidentielle, ils sont inquiets : des soldats sous entraînés, hébergés dans des conditions sordides, des équipements non livrés, des soldats qui restent 220 jours sur le théâtre des OPEX, des soldats qui, à la longue, rompent leur engagement, des divorces massifs, des morts « pour rien ». Le risque de mutinerie des hommes du rang n’est plus à écarter.

La fronde de la hiérarchie militaire n’a rien à voir avec des velléités de coup d’État et est bien plus « syndicaliste » que « factieuse » . De façon pour ainsi dire préventive, la hiérarchie militaire se pose en défenseur des conditions de vie et de sécurité des soldats.

Arrêt de toutes les « OPEX [4] »

La solution, nous la connaissons, c’est le retrait de toutes les troupes françaises en opération extérieure, l’arrêt des OPEX. Nous savons tous que les attentats barbares sont la rançon de ces OPEX. Seulement voilà, l’opposition à sa majesté ne l’entend pas de cette oreille. Le discours des députés FI est : « donner aux armées les moyens de combattre « à l’extérieur ». La hiérarchie militaire ne demande pourtant pas que les « politiques » soient plus militaristes qu’elle. Bien évidemment, elle se gardera bien d’exiger l’arrêt des OPEX et elle s’en tient aux conditions d’exécution de ces opérations.

Notons également que le groupe LREM refuse de prendre position sur le face-à-face Macron-de Villiers, alors qu’elle est censée être, en toute circonstance le « supporter » de Macron.

Une chose est sûre : après la colère des policiers en fin d’année 2016, ce « malaise dans l’Armée » est un pas qualitatif de plus dans le délitement du régime de la Ve République, qui atteint l’appareil d’État lui-même. Au reste, l’attitude de Macron n’est en rien conforme à sa fonction, telle que la Ve République l’a définie : « clé de voûte des institutions », « chef au-dessus de la mêlée ». Elle nous confirme que l’élection de Macron est un accident, que ce personnage est lui-même un accident.

En deux mois, il est déjà considérablement affaibli, non seulement par les « réformes » qu’il porte mais par les balles qu’il se tire lui-même dans le pied, à force de déclarations décalées, déplacées, dérapantes et tout à la fois, bouffies d’orgueil pathétique, tel un précieux ridicule.

Raison de plus de ne pas perdre le nord : Á bas les ordonnances – Abrogation totale de la loi El Khomri – Salaires et emplois, pas touche – Place à nos revendications vitales !



22 juillet 2017




 [1] https://youtu.be/oiky31f8RG0

 [2] Arme blindée cavalerie

 [3] Claude Angeli ( directeur du Canard Enchaîné), Pierre Edouard Deldique – Les plaisirs du journalisme – page 177 à 180 – Fayard 2017

 [4] OPérations EXtérieures

Modifié le samedi 22 juillet 2017
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