Lettre d'informations de La Commune n° 6

I / Les barbares et leurs maîtres contre les Kurdes.

A l’heure où ces lignes sont écrites, le sort de la ville kurde de Kobanê est peut-être déjà scellé, malgré la résistance héroïque et désespérée de ses défenseurs. Nous n’avons rien à redire, bien au contraire, à ce qu’écrivent nos camarades de l’Organisation Communiste Libertaire/ Courant alternatif à ce sujet :

« L’assaut sur Kobanê, lancé sur trois fronts – ouest, sud et est – bénéficie en effet d’un complément décisif au nord grâce à la Turquie qui a verrouillé la frontière et déployé sa police et son armée pour bloquer les renforts et surtout les acheminements en armes (antichars surtout) susceptibles d’inverser le rapport de forces.

Les Kurdes encerclés par les djihadistes et l’armée turque

Aujourd’hui, les djihadistes sont aux portes de la ville. Malgré la résistance farouche des combattants hommes et femmes, des habitants restés pour se battre et des jeunes volontaires venus de l’autre côté de la frontière, les forces de l’EI semblent pouvoir prendre prochainement la ville de Kobanê et se livrer à un massacre de masse. De leur côté, les YPG-YPJ affirment qu’ils ne se rendront jamais et qu’ils se battront rue par rue, maison par maison.

Cette ‟victoire” des djihadistes – quelle que soit l’issue finale – n’est que le résultat tragique des derniers développements en Irak et en Syrie : la montée en puissance de l’entité appelée EI, elle-même conséquence de l’effondrement des régimes en place et du soutien apporté par les pétromonarchies du Golfe persique et la Turquie aux divers mouvements armés de l’islam politique en Syrie comme en Irak qui donneront naissance à l’EI, et par voie de conséquence, l’absence, ou la trop grande faiblesse, d’oppositions laïques, anticoloniales et anticapitalistes..

La Turquie, qui a été parmi les principaux appuis des djihadistes depuis 2011, entend profiter de la situation pour s’imposer comme la première puissance régionale, affaiblir ou liquider la résistance kurde et briser l’émergence d’une nouvelle réalité sociale-politique dans la région porteuse d’une alternative aux découpages et aux États-nations issus de la domination coloniale, et, des islamistes aux dictatures, aux formes les plus totalitaires et barbares de la domination politique.

Les États-Unis et les pays occidentaux, parfaitement informés de ce qui se jouait, ont laissé leurs ‟alliés” dans la région armer, entraîner, encadrer, financer des dizaines de groupes djihadistes qui se sont rassemblés dans l’EIIL (puis EI), pour, à l’époque, faire tomber les régimes de Bachar al-Assad et de Nouri al-Maliki.

Mais aujourd’hui, le monstre semble avoir échappé à ses créateurs et se retourne contre eux. »

En effet, on assiste bien à une « Union sacrée » contre le peuple kurde, union sacrée dont le bras armé est l’Etat Islamique ( EI) avec la complicité ouverte du dictateur Erdogan, bien content d’assister, du haut des collines qui surplombent Kobanê, à l’assaut des barbares de l’EI, surarmés. Mais il ne faut surtout pas oublier que les différents impérialistes Obama-Cameron-Hollande, sont unis dans une même sanglante complicité, d’autant qu’ils n’ont rien à refuser à Erdogan qui voit là une occasion d’exterminer les combattants kurdes du PKK.

Et l’on voit à la lumière de ces tragiques événements à quel point l’EI n’est rien d’autre que le monstre, l’enfant bâtard de l’Impérialisme. Un Impérialisme qui, jouant les apprentis-sorciers dans toute cette région, par peur du soulèvement des peuples, voit son Frankenstein, hier son allié, se retourner contre son maître, du moins chercher à s’en émanciper et s’engager dans la barbarie la plus noire.

Et, de même que le 11 septembre et ses instigateurs ont été utilisés pour tenter de normaliser les peuples, singulièrement le peuple palestinien au nom de la lutte anti-terroriste, cette fois, l’utilisation de ces fous manipulés va prendre une ampleur inégalée, si l’on en juge d’ailleurs en France par la prochaine « loi antiterroriste » en préparation.

L’alliance universelle des bourgeoisies contre les peuples et les classes ouvrières est une loi, une constante dans l’Histoire, Les impérialismes et les dictatures bureaucratiques savent faire taire ponctuellement leurs conflits et divergences dès qu’il s’agit de faire front contre les révolutions et soulèvements des peuples. Là, on serre les rangs pour défendre la propriété privée et les taux de profit, quitte à reprendre la guerre ensuite, une fois le danger commun passé. Les exemples ne manquent pas.

Pour n’en prendre que deux :

1er août- 2 septembre 1944, l’insurrection de Varsovie. Les partisans polonais s’engagent dans le soulèvement contre l’occupant nazi. La résistance polonaise est acharnée, rue par rue, maison par maison. De l’autre côté de la Vistule, l’Armée Rouge est là, puissante, elle vient d’enfoncer les défenses allemandes sur tout le front de l’Est. Elle a derrière elle la victoire éclatante de la résistance ouvrière contre les nazis, celle de Stalingrad arrachée le 12 février 1943 au prix d’un million de morts.

Mais Staline donne l’ordre de mettre l’arme au pied. Il ne lèvera pas le petit doigt pour aider la résistance polonaise. C’est déjà la mise en œuvre des accords passés avec Roosevelt et Churchill à la conférence de Téhéran (28 novembre- 1er décembre 1943), préfiguration des accords de Yalta et Postdam et où s’est déjà décidée une nouvelle partition de la Pologne. Staline laisse les mains libres à Hitler pour écraser la résistance. Toujours ça qu’il n’y aura pas à faire soi-même. Les nazis vont massacrer, écraser l’insurrection à coups de bombes incendiaires et de lance-flammes. L’Armée rouge rentrera ensuite dans Varsovie transformée en champ de ruines et en cimetière…Varsovie-Kobanê, une comparaison déplacée ? Nous ne le croyons pas.

18 mars -28 mai 1871 : l’insurrection des ouvriers parisiens, qui constituent le premier gouvernement ouvrier, La Commune de Paris, 46 ans avant la Révolution russe. La bourgeoisie a peur, elle est affolée. Elle se réfugie à Versailles. La Commune de Paris décrète la réquisition des ateliers abandonnés par les patrons, interdit le travail des enfants, le travail de nuit dans les boulangeries, annule les dettes de loyers et les créances, décrète la séparation des Eglises et de l’Etat, 34 ans avant la loi de 1905 etc.

Thiers prend contact avec Bismarck, dont l’armée encercle Paris, suite à sa victoire contre Napoléon III, qui a dû s’exiler, permettant à la République d’être proclamée. Pas de problème, Bismarck va aider Thiers. L’exemple parisien pourrait donner des idées aux ouvriers Allemands !

Il libère rapidement près de 60 000 prisonniers de guerre qui peuvent s'adjoindre aux 12 000 soldats dont dispose Thiers. Le 1er avril, celui-ci déclare à l'Assemblée nationale qu'il met sur pied « une des plus belles armées que la France ait possédée ». Les versaillais seront 130 000 au début du 21 mai. Les troupes sont commandées par le vaincu de Sedan, le maréchal de Mac Mahon Par les banlieues nord et est qu'ils contrôlent, les Allemands laissent passer les troupes versaillaises qui veulent contourner Paris. De plus, par convention avec le gouvernement Thiers, ils occupent le Chemin de fer du Nord, établissent un barrage de troupes de la Marne à Montreuil et massent 80 canons et 5 000 soldats près de la porte et du fort de Vincennes tenus par la Commune, bloquant ainsi la sortie de la capitale par l'est.

La suite, on la connaît. Les Versaillais entrent dans Paris et, du 21 au 28 mai 1871, ils massacrent 30 000 communards dans ce que l’Histoire retiendra comme la Semaine sanglante. Les bourgeoisies allemande et française peuvent enfin dormir. Elles ont eu chaud.

Varsovie-Paris-Kobanê, des comparaisons sans fondement ? Nous ne le croyons pas.

L’alliance Erdogan-Obama-Hollande-Cameron avec comme bras armé « l’Etat Islamique » est en cours sous nos yeux.

Vive la résistance du peuple kurde !

Pas touche au PKK et à ses combattants !

A bas la dictature d’Erdogan !

Unité ouvrière et des peuples pour :

Pas une arme, pas une munition pour l’EI, enfant monstrueux de l’Impérialisme et des pétromonarchies !

Troupes impérialistes hors de toute la région !

II/Philippe Poutou quitte la direction du NPA

Une édifiante confirmation

Voilà qui n’a rien d’un coup de tonnerre sous un ciel serein Philippe Poutou, ouvrier métallurgiste, porte-parole national du NPA a claqué la porte du Comité Exécutif de cette organisation. Ce militant ouvrier chaleureux, syndicaliste dévoué à sa classe n’a, bien entendu, pas « craqué », ni cherché à se préserver à titre personnel. Il a simplement décidé de réagir, à sa façon, face aux mœurs d’une « direction politique » que nous avons, quant à nous, qualifiée, de clique petite-bourgeoise décomposée et bureaucratique qui a, elle-même, gangrené le NPA, de toutes les façons possibles. A plus d’un titre, son témoignage est édifiant.

(Nous publions le texte de Philippe Poutou au CE en annexe, in extenso en fin de cette lettre d’info)

Certes, Philippe Poutou, ne se prévaut d’aucun désaccord avec l’orientation générale imprimée au NPA par sa direction. Il s’attaque, de façon prosaïque et concrète, au fonctionnement de son exécutif. Il s’attaque donc à la forme que prend cette direction, il la dénonce sans ambages. Pour notre part, nous savons que la « forme » (le fonctionnement au quotidien) caractérise et détermine le « contenu » (l’orientation politique).

Son premier constat est sans fioritures et sans appel

« . En vrai, je n’étais qu’un « fantôme » au CE et ce, depuis le début. […] Faut dire que cela fait plus d'un an que je pense démissionner. J'ai alerté et questionné à plusieurs reprises sur mes problèmes d'intégration et sur nos problèmes de fonctionnement. J'ai envoyé plusieurs e-mails mais jamais de réponses, jamais de discussions à part quelques échanges avec quelques camarades réceptifs. »

Il précise :

« Je n’ai jamais su ou pu m’intégrer. Habiter à 550 kilomètres, à 10 heures de transport aller-retour (en train) ou à 6 heures en avion, ça complique. Malgré mon jour « npa » il m’était difficile de participer aux réunions le soir à 18h30 : Juste pour se faire une idée : y participer cela signifiait dormir à Paris et du coup devenait ingérable pour ma vie de famille. Ce sont mes limites, désolé. Faut savoir que je passe déjà quelques nuits à l’extérieur à l’occasion de participations à des initiatives diverses (manif, meetings, média …) J’ai quand même tenté de faire le début des réunions, les retours chez moi à minuit, sans tram, à pied … un peu trop l’aventure à mon goût. Tout ça pour embaucher tôt le lendemain. Puis progressivement je ne suis plus venu aux réunions, je passais alors la journée du lundi à Roto, puis le mardi puis n’importe quel jour, peu importe car dans tous les cas, il n’y avait pas de cadre collectif pour m’intégrer. Je me suis senti inutile de plus en plus. D’autant plus gênant que des camarades supposaient une mauvaise volonté de ma part, ignorant en quoi tout cela était compliqué pour moi. »

Edifiante description d’un fonctionnement où l’homme est seul, sans solidarité, sans soutien ! Non, ce n’est pas lui qui n’a pas « su » s’intégrer. Porte-parole national, il fallait qu’il se débrouille seul, sans aide et qu’il sue le burnous dans le vide, sans boussole. Le traitement que lui a infligé la clique de direction du NPA est totalement inhumain et empreint de morgue bureaucratique. Cette clique allant jusqu’à mettre en cause sa bonne volonté, c’est-à-dire, son dévouement. Voilà qui traduit, pour le moins, l’incapacité chronique de la direction du NPA d’intégrer en son sein un authentique militant ouvrier. Mais, est-ce seulement sa vocation, à cette direction ?

La description qui suit donne un aperçu saisissant des mœurs en vogue à la tête du NPA :

« On ne s’en sort pas, on semble même complètement engluer dans des relations conflictuelles, destructrices, usantes, démoralisantes. Ce n’est pas seulement un problème de « tendances » car le conflit, l’agressivité, le manque de respect ou d’attention ou de correction, cela existe aussi au sein d’une même tendance, entre « groupes »ou cliques différentes.

Cette ambiance permet à chacun de fonctionner un peu comme il veut, chacun dans son « coin » au mépris de règles collectives, au mépris d’un fonctionnement démocratique où le souci est de rendre des comptes à la collectivité. La conséquence est logiquement un manque de transparence. Par exemple , il n'y a pas de compte-rendu de réunion CE. De trop nombreuses choses sont décidées et faites hors du « collectif » . Je peux l'illustrer avec les tâches de porte-parole : les apparitions médiatiques ne sont pas discutées, ni le fond ni le choix d’y aller ou pas, de comment faire ; on ne discute pas des meetings, de quoi dire mais aussi d’où on veut aller, du pourquoi on va là et pas ailleurs, à quelles manifestations participerions-nous, quelles priorités, quels axes d'interventions dans telle ou telle situation. […] . Cela donne des trucs pas terribles : je suis allé soutenir les « anti-barrage », les intermittents sans discussion, j’étais quasiment à mon compte. J'y suis allé à la demande des camarades investis dans ces mobilisations mais sans avis du CE. Mieux encore, pour la manif de Quimper le 2 novembre 2013, nous étions seulement 3 du CE en plus des camarades Bretons a avoir pris position clairement pour y aller, nous débrouillant avec la pression qui existait les jours précédents.. »

Clique ou amas de cliques, le CE ne décide quasiment rien, decide de tout, selon la majorité du moment. En réalité, tout se décide en coulisses. Et, face aux urgences de la lutte des classes, le porte-parole est livré à lui-même. Le cas de la mobilisation des « bonnets rouges », fin 2012, est hautement significatif : Nous avions salué, à ce moment-là, le courage politique personnel de Philippe Poutou, prenant fait et cause pour les manifestations des bonnets rouges contre les licenciements et l’écotaxe tandis que la majorité du Comité Exécutif, de façon certes plus hypocrite que Mélenchon, se dressait contre ce mouvement spontané de la population de Bretagne, dont l’axe était formé par les salariés.

Parce qu’il ne partage en rien les préoccupations immédiates de la population laborieuse et des couches opprimées, ce petit cercle bureaucratique est organiquement incapable d’intégrer un militant ouvrier comme Philippe Poutou. Pour savoir au compte de qui se fait telle ou telle politique, les marxistes que nous tentons d’être avons appris à poser la question « quelle est la base sociale derrière la politique menée ? » Ce cénacle est, par nature, petit-bourgeois décomposé, plus près des préoccupations des bobos influencés par les dernières modes idéologiques que de l’homme de la rue. Telle est la base sociale de cette direction du NPA. Philippe Poutou a donc lui-même instinctivement ressenti qu’il était un corps étranger à cette clique ou conglomérat de cliques.

A la suite de sa démission de la direction exécutive du NPA, il est aussitôt épinglé dans un des blogs que Mediapart met à disposition de ses lecteurs, le blog « révolutions ». Ce blog est celui de Jacques Fortin, qui se revendique du NPA.

Jacques Fortin écrit en effet :

« L’ancien candidat NPA à la présidentielle a donc démissionné de la direction du parti (de l'exécutif, non du "parlement" et il continue toutes ses activités dont la représentation du NPA dans les luttes) avec des arguments tout à fait recevables entre autres sur l'absence du collectif. On peut regretter simplement qu’il n’appelle à rien de collectif et se cantonne dans un acte… individuel (une tendance s'était constituée au congrès précédent tentant à sa façon de poser ces questions, décriée et vite effacée). On peut aussi penser qu’il a oublié les conditions peu démocratiques dans lesquelles il accepta d’être porté à la candidature comme la façon très individuelle dont il a conduit la campagne présidentielle dans la première partie (calamiteuse) de celle-ci même si sur les dernières semaines il a su sinon sauver la mise du moins l’honneur.

Mais bon, il est vrai que le NPA n’échappe pas à la sidérante dislocation politique en cours dans quasiment tous les partis en France alors que, franchement, le taux de sincérité, d'honnêteté, d'engagement global de ses militant/es ne le mérite pas. Mais les temps sont cruels alors autant essayer d'en tirer un peu de lucidité . »

Jacques Fortin, qui avoue dans ses écrits être un affidé de Sabado, autre dirigeant du NPA, permanent LCR puis NPA, inamovible depuis des lustres, aurait voulu se livrer à une attaque perfide contre Philippe Poutou qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Ainsi, Philippe Poutou, isolé par le CE au sein du NPA et livré à lui-même par ce même CE, est sournoisement accusé de se retrancher derrière « un acte individuel ». On lui reproche y compris « les conditions dans lesquelles il accepta d’être candidat aux présidentielles ». Quand on pense qu’il a sauvé la mise au NPA en acceptant, non sans réticences, d’être candidat après la démission surprise et soudaine de Besancenot ! Quelle ingratitude ! Ou encore, de façon non moins retorse, la façon « très individuelle » « dont il a mené la campagne ». Comme si la façon dont a été menée la campagne de 2012 n’était pas imputable intégralement à la direction du NPA ? De là à dire que les mauvais résultats ne seraient imputables qu’à Philippe Poutou, il n’y a qu’un pas !

C’est d’autant plus fort de café que le blogueur J.Fortin reconnaît « la sidérante dislocation politique du NPA » en la pointant toutefois, non pas comme la conséquence d’une méthode de direction et d’une orientation politique menant à la capitulation devant le Front de gauche ( et, par la même, devant le gouvernement) mais comme une sorte de fatalité frappant indistinctement tous les partis.

Nous ne discutons évidemment pas du « taux de sincérité, d’honnêteté, d’engagement global de ses militants », à la base du NPA qui n’est d’ailleurs pas un « taux » mais une force pillée et gaspillée par le « sommet » de ce parti.

Nous avons, à n’en pas douter, de sérieuses divergences avec le camarade Philippe Poutou, des divergences qui peuvent être surmontées par la libre discussion démocratique, ce que ne garantit pas le régime interne du NPA. Il reste que Philippe Poutou est un militant ouvrier que nous respectons et saluons. Et donc pour notre part, nous ne hurlerons pas avec les loups.

Annexe :

texte intégral de Philippe Poutou au CE

« Ma démission du CE : comme une contribution pour le congrès

J’annonce maintenant ma démission du CE mais je précise de suite que ce n’est pas un évènement, ce n'est pas une décision brusque. C’est seulement le résultat logique de ma non intégration à l’équipe exécutive et de désaccords multiples sur le fonctionnement. En vrai, je n’étais qu’un « fantôme » au CE et ce, depuis le début. Donc pas de souci, mon choix n’aura pas de conséquences handicapantes. Faut dire que cela fait plus d'un an que je pense démissionner. J'ai alerté et questionné à plusieurs reprises sur mes problèmes d'intégration et sur nos problèmes de fonctionnement. J'ai envoyé plusieurs e-mails mais jamais de réponses, jamais de discussions à part quelques échanges avec quelques camarades réceptifs.

D’abord, une impossible intégration : Je n’ai jamais su ou pu m’intégrer. Habiter à 550 kilomètres, à 10 heures de transport aller-retour (en train) ou à 6 heures en avion, ça complique. Malgré mon jour « npa » il m’était difficile de participer aux réunions le soir à 18h30 : Juste pour se faire une idée : y participer cela signifiait dormir à Paris et du coup devenait ingérable pour ma vie de famille. Ce sont mes limites, désolé. Faut savoir que je passe déjà quelques nuits à l’extérieur à l’occasion de participations à des initiatives diverses (manif, meetings, média …).. J’ai quand même tenté de faire le début des réunions, les retours chez moi à minuit, sans tram, à pied … un peu trop l’aventure à mon goût. Tout ça pour embaucher tôt le lendemain. Puis progressivement je ne suis plus venu aux réunions, je passais alors la journée du lundi à Roto, puis le mardi puis n’importe quel jour, peu importe car dans tous les cas, il n’y avait pas de cadre collectif pour m’intégrer. Je me suis senti inutile de plus en plus. D’autant plus gênant que des camarades supposaient une mauvaise volonté de ma part, ignorant en quoi tout cela était compliqué pour moi. Ça fait bien parti des problèmes auxquels on est confrontés et pas simple à gérer, ça pose notamment le problème de la participation régulière à un exécutif quand on habite loin. Comment mettre en place un CE avec des camarades non-parisiens, peut-on élaborer un cadre pour le réussir ? Et puis quel lien entre l’exécutif et le CPN, quelles fonctions pour chacun ? Pour permettre l’intégration de chaque camarade, cela suppose qu’on s’intéresse à l’autre, qu’on ait le souci de construire une équipe qui intègre tout le monde. On est obligés d’en discuter, de progresser dans notre structuration.

En suite, les désaccords sur le fonctionnement du CE : Je ne règle pas de comptes, je veux bien prendre ma part de responsabilité, donc on peut en discuter tranquillement. Les difficultés de fonctionnement concernent tout le monde, on peut tous se sentir responsables de notre incapacité collective à fonctionner démocratiquement, respectueux même des camarades. Le problème est ancien mais demeure, s’installe carrément. On pensait pouvoir le régler à l’occasion du dernier congrès mais non, on en est presque au même point. On ne s’en sort pas, on semble même complètement engluer dans des relations conflictuelles, destructrices, usantes, démoralisantes. Ce n’est pas seulement un problème de « tendances » car le conflit, l’agressivité, le manque de respect ou d’attention ou de correction, cela existe aussi au sein d’une même tendance, entre « groupes »ou cliques différentes.

Cette ambiance permet à chacun de fonctionner un peu comme il veut, chacun dans son « coin » au mépris de règles collectives, au mépris d’un fonctionnement démocratique où le souci est de rendre des comptes à la collectivité. La conséquence est logiquement un manque de transparence. Par exemple, il n'y a pas de compte-rendu de réunion CE. De trop nombreuses choses sont décidées et faites hors du « collectif ». Je peux l'illustrer avec les tâches de porte-parole : les apparitions médiatiques ne sont pas discutées, ni le fond ni le choix d’y aller ou pas, de comment faire ; on ne discute pas des meetings, de quoi dire mais aussi d’où on veut aller, du pourquoi on va là et pas ailleurs, à quelles manifestations participerions-nous, quelles priorités, quels axes d'interventions dans telle ou telle situation. Une commission avait été mise en place pour gérer cette question, elle n’a jamais fonctionné correctement et a été abandonnée discrètement ou bien ça fonctionne en tout petit groupe. Cela donne des trucs pas terribles : je suis allé soutenir les « anti-barrage », les intermittents sans discussion, j’étais quasiment à mon compte. J'y suis allé à la demande des camarades investis dans ces mobilisations mais sans avis du CE. Mieux encore, pour la manif de Quimper le 2 novembre 2013, nous étions seulement 3 du CE en plus des camarades Bretons a avoir pris position clairement pour y aller, nous débrouillant avec la pression qui existait les jours précédents. A force, je me rends bien compte que je me déforme aussi, que je finis par décider seul, par faire ce que je veux. Ce qui n'est pas bon du tout.

Pour ne pas juste redistribuer des places et refaire un tour pour rien : Le congrès arrive et les disputes plus ou moins justifiées sur l’orientation à débattre vont s’intensifier. Mais il va bien falloir se coltiner sérieusement les problèmes de fonctionnement, de manque de démocratie, de manque de respect entre camarades. Les questions de démocratie ou de vie collective ne sont pas liées aux questions d'orientations ou de politiques telles l’opposition de gauche, les rapports avec les FdG, le sectarisme ou les tendances réformistes. D’un côté ou de l’autre, nous n’avons pas su faire pour mettre en place une direction qui permette de construire, de coordonner l’activité, d’aider les équipes militantes à se renforcer. D'un côté ou de l'autre, nous ne sommes pas plus transparent ou collectif. Le CE tel qu’il se comporte contribue au contraire à paralyser, à étouffer et même à abîmer. C’est triste parce nous réussissons à gâcher des possibilités de développement, à gaspiller des forces et à laisser des équipes militantes sans solution.

La période actuelle n’est pas si défavorable pour nous, il y a des choses à faire, à tenter. Pour cela, c’est obligatoire, il faut se débarrasser de nos « conneries ». Il faut que nous en parlions franchement, sans se faire la guerre, sans se vexer et sans en faire des histoires personnelles. Au Npa, nous subissons aussi l’opportunisme individuel, l’ambition personnelle, la prétention, le sentiment de supériorité ou encore l’aspiration à prendre la place (sa place) et à vouloir la garder. Il y a besoin de se remettre en cause sur toutes ces questions. Le congrès peut en être l'occasion. Cela nous donnerait de l’air frais, si utile pour discuter sereinement de notre construction ou reconstruction. On, a besoin de revoir le rôle du CE, celui du CPN et le rapport entre les deux instances. Cela pourrait passer par limiter les fonctions du CE et renforcer celles du CPN. Il y aurait aussi besoin de voir comment fonctionner avec des camarades qui habitent loin, qui n'ont pas les mêmes disponibilités.

Le CE, le CPN, l’ensemble de la direction, ne doivent pas seulement être le lieu de débats ou de disputes sur l'orientation, ils doivent aussi s'intéresser à la vie du parti et des comités. Il serait nécessaire d'agir pour aider les équipes militantes à construire le Npa, impulser des initiatives, proposer de l’aide, organiser la collaboration, l’entre-aide entre les villes, les régions. Le CE/CPN doivent pouvoir organiser des meetings à Paris mais aussi s'y intéresser pour les autres régions, impulser des initiatives publiques dans les autres villes, dans les petites villes, dans les zones rurales. Le parti doit se construire partout et dans tous les milieux. Le CE souffre en plus d'être trop "parisien". Tout s'y concentre, les initiatives centrales comme les tensions.

La "crise" que nous vivons n'est pas seulement une crise de direction. On a la direction qu'on mérite". C'est peut être vache de le dire comme ça mais c'est ainsi. En tout cas, c''est forcément tout le parti qui trinque tant que nous n'arriverons pas à nous sortir de ces problèmes de fonctionnement. L'ensemble des militants, pas seulement ceux de la direction (CE et CPN) ont un rôle à jouer. Maintenant, avant le congrès et après.

Philippe », 6 octobre 2014

Le comité de rédaction :

Francis Charpentier, Daniel Petri, Wladimir Susanj, Pedro Carrasquedo, Isabelle Foucher, Jérome Lefaure, Julie Charmoillaux, Zde Ekzlazadil, Pierre-Yves Chiron, Mustafa Diakité, Jean-Baptiste Carrier, Paul Dumas, Garledji Makélélé

9 octobre 2014

Modifié le vendredi 10 octobre 2014
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