30 années d'attaques contre les immigrés. France, terre d'exclusion (1<sup>ère</sup> partie 1972/1984)

terre d'exclusion (1ère partie 1972/1984) | Chronique n°20 du 18 au 25 janvier 2010supplément à

journal en langue française de militants du NPA
membres du courant international Mouvement Socialiste des Travailleurs-International-(IVèmeInternationale)


n°20 du 18 au 25 janvier 2010.

"La lutte de classe est nationale dans sa forme, internationale dans son contenu" (Karl Marx)


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SOMMAIRE:
30 années d'attaques contre les immigrés

France, terre d'exclusion







Nos liens :

Venezuela:www.aporrea.org
www.mareasocialista.com

Argentine : www. mst.org.ar

France : www.npa2009.org


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30 années d'attaques contre les immigrés



France, terre d'exclusion



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Première partie : 1972-1984




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29 000, c'est le nombre d'immigrés expulsés du territoire, en 2009, sous la férule du ministre de l'immigration et de l'identité nationale, Eric Besson qui a été au-delà de l'objectif que Sarkozy lui avait fixé. Ces expulsions, inhumaines par essence, s'opèrent sur un fond idéologique fangeux de campagnes sur " l'identité nationale " et sur " l'interdiction du port du la burqa ". Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que le sinistre Le Pen relève la tête et se remette à aboyer en réclamant un référendum sur l'immigration. Du côté du PS, s'élèvent de bien curieuses protestations, comme celle-ci : " Depuis 2002, la droite a modifié à plusieurs reprises la loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers votée en 1998 : elle a supprimé la clause de régularisation après 10 ans de présence sur le territoire national. Ce processus permanent et progressif qui évitait les régularisations massives et qu'avait instauré le gouvernement Jospin devra être rétabli. 1". La droite ; il est vrai, n'a pas le monopole des lois, décrets et circulaires anti-immigrés et des " reconduites à la frontière " de travailleurs immigrés. La lutte, tantôt ouverte, tantôt masquée contre l'immigration a maintenant une longue histoire. 30 années d'attaques successives contre les immigrés et leurs familles, dans lesquelles le PC et le PS ont salement trempé. 30 années qui éclairent la situation présente que subissent des centaines de milliers de citoyens sans droits, livrés à la surexploitation patronale, à l'arbitraire policier, exposés à la répression. A quelques mois de élections régionales, alors que la droite comme la gauche institutionnelle agitent chaque jour le chiffon rouge de l'immigration et font entre elles de la surenchère pour stigmatiser les immigrés et leurs familles, singulièrement les musulmans. il n'est pas inutile de faire ici quelques rappels salutaires sur 30 années de lois et décrets contre l'immigration




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1 Communiqué du Bureau national du Parti Socialiste, du 27 novembre 2009 http://www.alfortville-socialiste.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=132&Itemid=1




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Le 21 juin 1973, le groupuscule fasciste Ordre nouveau (composante du Front national qui vient de naître et dont sont issus des hommes politiques aussi " respectables " que Patrick Devedjian, Alain Madelin et Gérard Longuet) tient un meeting à la Mutualité sur le thème " halte à l'immigration sauvage ", sous la protection des CRS qui font face à une contre- manifestation menée par la Ligue communiste. Il s'ensuit de violents affrontements qui entraîneront la dissolution de la Ligue communiste (et, pour faire bonne figure, de Ordre nouveau) accompagnée de la détention préventive d'Alain Krivine et Pierre Rousset. Des affiches racistes apparaissent alors sur les murs " Mohamed Ben Zobi, il peut tuer, violer...". Il est à noter que le programme commun de la gauche, établi, un an auparavant, entre le PC, le PS et les radicaux dits " de gauche " ne dit pas un mot sur le sort des travailleurs immigrés et la défense de leurs droits.

Un an plus tard, Giscard d'Estaing est élu président de la République. Il s'était prononcé pour l'arrêt de l'immigration et au cours de sa campagne, il a fait appel au Service d'ordre du Parti des forces nouvelles (petit groupuscule fasciste issu d'Ordre Nouveau et dissident du FN) pour la sécurité de ses grands meetings.

Depuis la Libération, les conditions de séjour des étrangers étaient régies par l'Ordonnance du 2 novembre 1945 qui avait, en outre, mis fin à la législation de 1938 permettant l'internement des étrangers en vue de leur expulsion dans des camps ( Les Milles, près de Marseille ; Rivesaltes ; Gurs... qui ont ensuite facilité la " livraison " par Pétain de réfugiés espagnols, allemands antinazis et juifs aux autorités hitlériennes d'occupation et , chemin faisant, la déportation de milliers d'hommes, femmes et enfants dans les camps de concentration nazis)
Les premières tentatives officielles en vue de " réformer " cette Ordonnance s'amorcent en 1972.

On le voit, les campagnes d'une extrême droite aussi hystérique que marginale aiguillonnent la politique anti-immigrés des gouvernements qui vont se succéder.



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1972:


- 24 janvier : Les circulaires Marcellin-Fontanet, (portant le nom du ministre de l'Intérieur et du Travail) subordonnent la délivrance d'une carte de séjour à l'obtention d'un contrat de travail et d'un " logement décent ". Ces textes mettent fin aux procédures de régularisation et constituent l'amorce des premiers contrôles du " flux migratoire ". Ils provoquent les premières mobilisations de " sans-papiers " et notamment des grèves de la faim.



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1973 :


- 13 juin : Sous la pression des grèves, le gouvernement assouplit sa position et permet aux travailleurs entrés en France avant le 1er juin 1973 et pouvant présenter une promesse d'embauche, d'obtenir un titre de séjour et de travail.



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1974 :


- 3 juillet : Le conseil des ministres, présidé par Jacques Chirac, annonce la suspension de l'introduction de travailleurs immigrés
- 5 juillet : Circulaire Dijoud (du nom du secrétaire d'Etat chargé des travailleurs immigrés auprès du ministre du Travail) annulée par le Conseil d'Etat le 24 novembre 1978- . Circulaire dite de " limitation des flux migratoires " par laquelle au nom de la crise économique, il est décidé de mettre un terme à l'immigration. Cette circulaire, même abrogée, inspire jusqu'à présent toute la politique contre les immigrés
- 27 septembre : annonce de la suspension de l'immigration familiale. Le Conseil d'Etat annule ces dispositions quelques mois plus tard.
En 1975, des journalistes et des juristes révèlent au grand jour le scandale de la Prison clandestine d'Arenc qui " retient " de force et dans des conditions épouvantables des algériens cherchant à s'établir en France. Cette prison de fait trouve pour seul vernis juridique un règlement de police de sinistre mémoire datant de 1938. Le PS se prononce alors pour la fermeture de cette prison de la honte qui existe dans l'ombre depuis 1964. Ce sont les oubliettes de la V è république et du gaullisme.



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1975 :


- 21 novembre : parution d'un décret instaurant l'obligation pour l'administration de vérifier, avant la délivrance d'une autorisation de travail, " la situation de l'emploi, présente et à venir, dans la profession demandée et dans la région ".



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1976 :


- 29 avril : pour la première fois, un décret fixe les conditions du regroupement familial (conditions de ressources et de logement notamment)



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1977 :


- 10 novembre : un décret restreint l'immigration familiale. l'admission au titre du regroupement familial est suspendue pendant 3 ans sauf pour les membres de famille qui ne demandent pas à accéder au marché de l'emploi. Ce décret est annulé par un arrêt du Conseil d'Etat du 8 décembre 1978 suite aux recours déposés par le GISTI, la CFDT et la CGT. l'arrêt du Conseil d'Etat réaffirme le principe du droit au regroupement familial comme résultant des principes généraux du droit.



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1980 :


- 10 janvier (Loi 80 - 9 du 10 janvier 1980) : La loi " Bonnet " (du nom du Ministre de l'Intérieur) apporte des modifications importantes à l'ordonnance du 2 novembre 1945. l'entrée ou le séjour irréguliers deviennent des motifs d'expulsion au même titre que la menace pour l'ordre public ; l'étranger qui ne vient en France ni pour travailler, ni dans le cadre du regroupement familial doit désormais fournir des garanties de rapatriement ; l'étranger refoulé à la frontière qui n'est pas en mesure de quitter immédiatement le territoire français peut être maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pendant le temps nécessaire à son départ 2.

En 1980, la Direction du PCF monte en première ligne ... contre l'immigration. C'est la suite logique du tour chauvin qu'elle a donné à sa campagne lors des premières élections européennes de 1979, sur l'axe " Non à l'Europe allemande ". Ce n'était alors qu'un avant-goût nauséabond de la campagne que Marchais et les siens allaient orchestrer contre les immigrés et les étrangers, sur fond de " Produisons et achetons Français ".-

Le 24 décembre 1980, la municipalité de Vitry attaque au bulldozer un foyer devant abriter 300 travailleurs maliens. 3 Le maire Paul Mercieca est soutenu par Georges Marchais puis par une résolution du Comité Central du Parti. Le retentissement de cette affaire en fera un des événements révélateurs d'une crise de l'immigration en France et marque son entrée dans le débat politique.

Le 8 février 1981, Robert Hue, Maire de Montigny-lès-Cormeilles ( 95) fera brièvement parler de lui à l'échelle nationale en menant un coup d'éclat contre une famille d'immigrés qu'il dénonce à la vindicte populaire comme trafiquants de drogue, sans autre preuve que la lettre de dénonciation d'une voisine de la famille en question. 4
Cette affaire intervient quelques jours avant un meeting de Georges Marchais à Montigny-lès-Cormeilles. Le père de famille, accusé par l'édile, est un ouvrier menant une existence paisible. La Police elle-même est stupéfaite !

Candidat aux élections présidentielles de 1981, Georges Marchais alors secrétaire général du PCF, mène campagne pour l'Arrêt de l'Immigration. Lors d'un Meeting dans le XIIIème arrondissement de Paris, il s'ébroue : " Le XIIIème ne doit pas devenir un nouveau Chinatown ". La Direction PCF réclame alors à cor et cris des quotas d'immigrés par Ville.
Nul doute que ce discours fera les choux gras d'un certain Le Pen qui, pour l'heure, est totalement marginal sur la scène politique, le FN plafonnant sous la barre des 1% aux élections et Le Pen ne parvenant pas à réunir le nombre de signatures de maires requises pour pouvoir se présenter aux présidentielles . Mais Marchais ne voit pas si loin. Dans l'immédiat, le tapage du PCF sur l'immigration sert d'abord à alimenter une politique de division acharnée des rangs ouvriers qui ne profite qu'au pouvoir en place et dont le PCF paiera le prix fort au premier tour des présidentielles de 1981.

Le 10 mai 1981, la droite est chassée du pouvoir. Pour des millions d'immigrés et des centaines de milliers de " sans-papiers ", un immense espoir se lève.

Cette espérance semble devoir se concrétiser. En effet, en octobre 1981, 120 000 sans-papiers sont régularisés, via l'obtention d'un titre de séjour provisoire.



MAIS:



-il s'agit d'une procédure de régularisation exceptionnelle

-il s'agit d'une régularisation sur critères : il faut prouver que l'on a un travail et être entré en France avant le 1er janvier 1981.

- 200 000 immigrés restent en situation irrégulière car leur employeur refuse de leur délivrer un certificat de travail (travail au noir)

C'est dans ce contexte que va être adoptée, dans la foulée, la loi Defferre qui met en place LES CAMPS DE LA HONTE.

2 Sources : CIMADE

Pour revoir les reportages télévisés édifiants sur ce sujet

3 http://www.ina.fr/economie-et-societe/vie-sociale/video/CAB8001679301/immigres-vitry.fr.html

4 http://www.ina.fr/economie-et-societe/vie-sociale/video/CAB8100275201/affaire-du-marocain-de-montigny-les-cormeilles.fr.html ;

http://www.ina.fr/economie-et-societe/vie-sociale/video/CAA8100381301/extrait-marchais.fr.html


1981 :



Loi 81-973 du 29 octobre 1981, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France :

Cette loi, dite Loi Deferre (du nom du ministre de l'intérieur Gaston Deferre), abroge la loi Bonnet du 10 janvier 1980. Désormais, les étrangers en situation irrégulière ne peuvent plus être expulsés par la voie administrative. Seul, un juge peut en décider.



MAIS :





-- Le principe selon lequel le comportement délictueux peut entraîner l'expulsion demeure. Certes, l'application de ce principe est limitée par un " seuil minimum " de condamnation à un an de prison ferme... " sauf en cas d'urgence absolue et de nécessité impérieuse pour l'ordre public ou la sûreté de l'Etat " sans définir l'une ou l'autre de ces notions, ce qui laisse une large part à l'arbitraire

-- De fait, la loi Deferre continue en l'amplifiant la même politique que la loi Bonnet concernant les contrôles aux frontières et fixe des critères d'admission sur le territoire français qui sont encore plus restrictif que les critères de la loi Bonnet

-- Cette loi aggrave les peines encourues pour l'entrée et le séjour " irréguliers "

-- La suspension des expulsions de jeunes fut d'abord décidée par le ministre de l'intérieur Christian Bonnet suite à une grève de la faim de Christian Delorme ( curé des Minguettes) ; la loi du 29 octobre 1981 sur l'entrée et le séjour des étrangers introduisit, parmi les catégories d'étrangers non-expulsables, les mineurs de moins de dix-huit ans et les étrangers nés en France ou arrivés avant l'âge de dix ans, sauf en cas de menace grave à l'ordre public, notion mal définie laissant, là encore une large part à l'arbitraire..

La loi Deferre maintient en vigueur deux dispositions essentielles de la loi Bonnet :

La faculté d'exercer par la force les décisions " d'éloignement du territoire "

La possibilité de maintenir les étrangers en instance de départ forcé dans des locaux spéciaux sous surveillance jusqu'au départ définitif (expulsion)

Cette loi introduit ainsi l'article 35 bis dans l'Ordonnance du 2 novembre 1945.

Autrement dit, elle institue les camps de rétention que Giscard -Bonnet n'avaient pas pu mettre en place suite à la mobilisation d'avocats, de juristes, de journalistes - soutenus alors par le PS - pour la fermeture de la prison clandestine d'Arenc qui est devenue, ironie de l'histoire, un centre légalisé de " rétention administrative " grâce à cette loi du gouvernement Mitterrand-Mauroy-Deferre-Fiterman-Le Pors-Ralite...33 centres de " rétention administrative " seront créés grâce à cette loi.



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1982 :


Décret n°82-442 du 27 mai 1982 PRIS POUR l'APPLICATION DE l'ART. 5 DE l'ORDONNANCE DU 02-11-1945 RELATIVE AUX CONDITIONS D'ENTREE ET DE SEJOUR DES ETRANGERS EN FRANCE
.

Nouveau renforcement de la législation.

Les étrangers venant en France en visite privée sont obligés de présenter un certificat d'hébergement visé par le maire de la commune d'accueil, ainsi que la preuve de moyens d'existence suffisants pour le séjour. Plus tard, Pasqua, ministre de l'Intérieur de Chirac, n'aura plus qu'à reprendre ces dispositions jamais abrogées, et y ajouter l'obligation des visas (30 Juillet1987)

CIRCULAIRE DU 15 NOVEMBRE 1982

Instructions données aux parquets par la Chancellerie demandant de requérir systématiquement la peine de reconduite à la frontière devant les tribunaux et de faire appel des jugements qui ne l'auraient pas prononcée,

CIRCULAIRE DU 31 AOUT 1982

Supprime le bénéfice automatique du délai d'un jour franc aux étrangers auxquels est refusée l'entrée sur le territoire (ils pouvaient ainsi éventuellement se défendre). Cette Circulaire sera annulée par le Conseil d'Etat trois ans plus tard

Comme on le voit, en ce début des années 80, l'étau se resserre sur les travailleurs immigrés et leurs familles. Il ne reste alors qu'à lâcher les chiens. Mais, en ce début d'année, le FN obtient à grand peine 0,2% des voix aux élections cantonales, un score équivalent à celui recueilli aux législatives de juin 1981.

" Conséquence : aucune chaîne de télévision n'a pris la peine de se déplacer pour le congrès du FN qui vient de s'achever en cette fête de Jeanne d'Arc. Jean-Marie Le Pen n'apprécie pas cette absence. Et il le fait savoir en écrivant à l'Elysée [...] En quelques mots, dans sa lettre du 26 mai 1982, le dirigeant d'extrême-droite enjoint François Mitterrand d'intervenir en sa faveur auprès des directions de chaînes. [...]Sur les conseils de Michel Charasse, François Mitterrand signe, le 22 juin, une réponse écrite à Jean-Marie Le Pen : " il est regrettable que le congrès d'un parti soit ignoré par la Radio-Télévision [...] Elle ne saurait méconnaître l'obligation de pluralisme qui lui incombe [...] "Au cours d'un point de presse organisé peu après, Michel Collinot (bras droit de JM Le Pen. NDLR) salue, au nom du Front National, la " courtoisie du chef de l'Etat qui a bien voulu répondre à la missive de Jean-Marie Le Pen. Contrairement, précise t-il, aux lettres restées sans réponse sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing. La presse se fera l'écho discret de cette correspondance épistolaire. La courtoisie présidentielle se double d'une grande efficacité. Dès le lendemain, l'invité du journal du soir de TF1 est Jean-Marie Le Pen ". Voilà ce que rétablissent trois journalistes de RTL, Europe 1 et RF1 dans un ouvrage paru aux éditions du seuil en 1991, sous le titre " LA MAIN DROITE DE DIEU / Enquête sur François Mitterrand et l'extrême-droite ". Ce livre, adossé sur des témoignages précis et des faits, démontre, preuves en main, que Mitterrand a propulsé Le Pen sur la scène médiatique avant ses tout premiers (et encore timides) succès électoraux, un an plus tard 5. Commentaire des auteurs : " A l'autre bout de l'échiquier politique, la Ligue communiste révolutionnaire d'Alain Krivine et Lutte ouvrière d'Arlette Laguiller n'auront pas la divine surprise d'être propulsés sous les projecteurs au nom du " pluralisme des opinions " 6

On connaît la suite. Des années durant, Le Pen va occuper le terrain de façon hideuse, en prédicateur du racisme et de la xénophobie, paraphrasant les nazis. 7

Pour la plupart des commentateurs, même proches de Mitterrand (tels Serge July qui s'offusquera plus tard de " la manipulation sadique de l'effet Le Pen " par Mitterrand), l'Elysée propulse Le Pen aux seules fins de diviser la droite. Ce n'est qu'un des aspects de la manoeuvre bonapartiste de Mitterrand. l'autre aspect, et non le moindre, c'est de mettre un pistolet sur la tempe des immigrés en leur indiquant que les lois anti-immigrés de la gauche au pouvoir sont un moindre mal par comparaison au pire que représente pour eux Le Pen et ses affidés. Ce qui vaut pour les immigrés vaut autant pour l'ensemble de la classe ouvrière appelée à renoncer à ses revendications propres et à ses conquêtes sociales pour s'en remettre à un " Front républicain " pour " faire barrage à Le Pen ", lequel " Front républicain " se matérialisera ... derrière Chirac, en 2002 !

Or, en matière d'immigration, Le Pen ne fait que dire tout haut ce que la plupart des hommes politiques " institutionnels " pensent tout bas. On vient encore d'en avoir tout dernièrement confirmation au travers des propos du maire UMP de Marseille, Gaudin, stigmatisant " le déferlement des musulmans ". Mais, contrairement à ce qu'allèguent les média, cela ne relève pas du " dérapage ". C'est un sentiment partagé par des politiciens de droite... comme de gauche.

Ainsi, dès cette époque, les déclarations anti-immigrés fusent, de tout bord : " il faut renvoyer les clandestins car la France risque d'y perdre son équilibre " lâche François Mitterrand (La croix 01/09/1983). Dans le quotidien Le Matin du 11/10/1984, Laurent Fabius laisse tomber : " l'extrême-droite pose de vraies questions ". Pour ne pas être en reste, Chirac déclare, le 30/10/1984 (Libération) : " " S'il y avait moins d'immigrés, il y'aurait moins de chômage, moins de tension dans certaines villes et certains quartiers, un moindre coût social ". S'agissant de Le Pen, Chirac confie au journaliste François Olivier Giesberg, le 22/10/1985 : " Il répète certaines choses que nous pensons, un peu plus fort et un peu mieux que nous, en termes plus populaires. ".

Dans le même temps, l'arsenal juridique anti-immigré se durcit encore.

5 Aux municipales de 1983, le FN obtient 11,3% dans le XX è arrondissement de Paris, 9,6% à Roubaix et 5,9% à Marseille. Cette percée est encore localisée mais est amplifiée par l'écho médiatique qu'elle recueille. En septembre 1983, à la faveur d'un accord avec le RPR, le FN entre dans la municipalité de Dreux après une élection municipale partielle. Un an plus tard, aux élections européennes, le FN dépasse les 10% des suffrages exprimés.

6 Emmanuel Faux/ Thomas Le grand/ Gilles Perez. LA MAIN DROITE DE DIEU. SEUIL ; Pages 20 à 25 ;

7 Ainsi, le slogan des affiches du FN " 3 millions de chômeurs = trois millions d'immigrés en trop " est directement inspiré d'une affiche du parti nazis de la fin des années 20 qui martelait " 700 000 chômeurs = 700 000 juifs en trop ".



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1984 :



10 juin : loi légalisant les contrôles d'identité et donnant la possibilité de comparution immédiate. Donne au juge le pouvoir de prononcer la peine de reconduite à la frontière dite peine de " substitution" (et non comme peine complémentaire à une peine de prison). Cette peine est alors immédiatement exécutoire même si le prévenu fait appel.



Loi n°84-622 du 17 juillet 1984 dite loi Joxe (du nom du ministre de l'Intérieur de l'époque) :

Cette loi modifie à nouveau l'Ordonnance du 2 novembre 1945, ainsi que le Code du travail. Elle institue le titre unique de séjour. Ainsi, la carte de travail séparée de la carte de séjour est supprimée, ce qui permet de lier le titre de séjour à l'autorisation de travail. En clair : pas de travail, pas de carte de séjour. Cette loi oppose à l'immigré la situation de l'emploi. Il reçoit ainsi des lettres lui refusant un titre de séjour au prétexte que dans sa profession, il y a plus de demandes que d'offres d'emploi.

A cette occasion, la loi Deferre du 29 octobre 1981 est modifiée dans un sens encore plus défavorable, aux fins de faciliter l'expulsion des " délinquants d'habitude ". En effet, dans sa rédaction initiale (voir plus haut) l'expulsion n'était possible que pour une condamnation d'un an de prison ferme minimum. Désormais, plusieurs condamnations qui, au total, atteignent un an ferme, permettent l'expulsion.



Circulaire Massot du 8 octobre 1984 :

Cette circulaire s'applique aux étudiants étrangers et concerne leurs autorisations de travail

-- Elle interdit aux étudiants étrangers de travailler plus de 20 heures par semaines sous peine d'expulsion
-- Elle les oblige à prouver qu'ils ont des ressources suffisantes et de montrer un relevé bancaire avec au moins 16000 francs en début d'année scolaire (au moins 10 fois le SMIC de l'époque)



Décret du 4 décembre 1984 (dit décret Dufoix, du nom de la Secrétaire d'État à la Famille, à la Population et aux Travailleurs immigrés ).

Ce décret d'application institue le titre unique de séjour.

Désormais, deux types de cartes de séjour

- de dix ans, dite : de résident

- de un an, dite : de séjour temporaire,


Il faut savoir que le système précédent était le suivant :
Un étranger recevait une carte de six mois (carte orange), puis une carte verte (trois ans) puis une carte de dix ans, (carte bleue, dite de " résident privilégié " à laquelle tous les immigrés aspiraient), il y avait une passerelle entre chacune de ces cartes, l'étranger pouvait faire les demandes successives à chacune de ces cartes. La carte de dix ans était en général accordée aux étrangers et leurs familles dès lors qu'ils séjournaient en France au minimum depuis trois ans (carte verte déjà obtenue).

Désormais, en instituant deux types de cartes de séjour bien distinctes :
-est supprimée toute passerelle entre la carte de un an et celle de dix ans, l'étranger qui n'est pas en France depuis au moins trois ans, qui ne remplit pas une série de conditions (ressources suffisantes, etc), voit seulement le renouvellement de sa carte temporaire de un an. C'est à l'expiration de la carte temporaire que cette catégorie devient " en situation irrégulière" et constitue le gros des " clandestins"

A noter que tout le monde a salué ces dispositions en affirmant: " Dufoix et la gauche ont donné la carte de dix ans aux immigrés".

C'est un mensonge éhonté.



En effet, ceux qui ont effectivement bénéficié de la carte de dix ans et de son renouvellement automatique sont ceux qui l'avaient déjà ou qui, de toute façon, l'auraient eue dans le système précédent, puisque déjà bénéficiaires de la carte de trois ans, dite carte verte.

Par contre, ce sont des dizaines de milliers d'immigrés qui sont désormais exclus de cette carte de dix ans puisqu'il n'y a plus de passerelle possible,
A noter, d'ailleurs, que, même les possesseurs de la carte de dix ans ne seront pas à l'abri LORS DE SON EXPIRATION du refus de renouvellement compte tenu des conditions imposées (situation de l'emploi, chômage, ressources insuffisantes, etc,). C'est donc en réalité, la plus grande escroquerie réalisée contre les immigrés à ce jour avec l'accord de tous les partis.



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1985 :


Circulaire Dufoix du 5 janvier concernant le regroupement familial


AVANT:

La mère de famille qui voulait rejoindre son mari avec ses enfants pouvait le faire et demander sa régularisation Sur place, en France, une fois installée avec le père de famille et avec ses enfants.

DESORMAIS:

La demande de regroupement familial doit se faire DANS LE PAYS D'ORIGINE

Cette demande est conditionnée à une série d'impératifs

- de logement.

- de ressources,

- de santé, etc

Le regroupement familial est refusé par exemple pour cause de logement trop petit du père de famille, au nom bien sur de la dignité humaine et de la lutte contre l'habitat Insalubre,

" Il est exclu d'accepter même à titre provisoire des conditions d'habitat gravement insuffisante, voire dangereuses (installation sans autorisation dans des immeubles en péril, baraquements de type bidonvilles ou dans des logements Insalubres ou surpeuplés "

Même refus pour des raisons de santé, ainsi que pour ressources insuffisantes

Avec toutes ces conditions, le regroupement familial devient une course d'obstacle et est pratiquement impossible.

Comme on le voit, cet arsenal juridique qui se construit, loi après loi, circulaire après circulaire, décret après décret, dans " l'alternance " et la " cohabitation ", est une machine à fabriquer des clandestins, des parias mais tout autant ce mécanisme sert aussi à brider toutes les libertés individuelles et démocratiques de toute la population, confère l'obligation de se soumettre aux contrôles d'identité qui est une " exception française " ( de même que les garde-à-vue), tout comme il sert à mettre à disposition du patronat une main d'oeuvre taillable, corvéable et " expulsable " à volonté, cette menace permanente de l'expulsion devant bien entendu servir à assurer la docilité des travailleurs immigrés.

Fin de la première partie - A suivre - Deuxième partie (de 1985 à nos jours) dans la prochaine Chronique

Pedro Carrasquedo et Daniel Petri. 17/01/09














Modifié le dimanche 14 février 2010
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