Règlements de comptes à OK Corral

EditorialTout s'accélère. Première conséquence du 29 mai : la Constitution européenne, de l'aveu de tous, est enterrée, après le coup de grâce des Hollandais. De Profondis.
Chirac, qui bat le record d'impopularité de toute l'histoire de la Ve République, avec 24 % d'opinions favorables, vient de constituer son gouvernement, garde prétorienne autour de sa personne, mais avec un loup dans la bergerie, Sarkozy. Chirac est un " mort politique ", comme le dit un quotidien anglais.
Il a constitué son équipe comme le camp retranché, le bunker d'un Régime aux abois. Qui ne comprend en effet que le " Mai 68 électoral " du 29 mai aura tôt ou tard son prolongement dans la lutte de classe directe ?
Villepin, chargé par Chirac de " la bataille pour l'emploi ", risque de ne plus avoir trop le temps pour ses aimables poésies dignes d'un pubertaire boutonneux.
La nouvelle promue, Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, a vite fait de montrer qu'elle a compris le message. À la question du journaliste d'Europe 1 lui demandant s'il fallait réformer le droit du travail, elle a répondu : " Absolument. Le droit social, compliqué, lourd, assez peu flexible, constitue souvent un frein à l'embauche ".
Son excès de franchise lui a déjà valu un rappel à l'ordre de Villepin.
Et il y a les déçus, les aigris, les licenciés sans préavis. Fillon a craché : " Quand on fera le bilan de Chirac, on ne se souviendra de rien. Sauf de mes réformes " ! Pas content, le fossoyeur des retraites et de l'école. Et pas gêné de cracher dans la soupe. Quant à Patrick Devedjian, homme de Sarkozy, ex-ministre de l'Industrie, il a refusé le lot de consolation du ministère de l'aménagement du territoire : " J'ai toujours pensé que c'était un ministère inutile et donc je ne voulais pas être en contradiction avec moi-même ". Son remplaçant, Christian Estosi, appréciera.
Il n' y pas qu'à droite que le non massif a provoqué débandade et règlements de comptes. Il fallait s' y attendre, le PS lui aussi, plutôt que de reconnaître sa défaite et de s'incliner devant le désa­veu infligé par sa base électorale, a décidé de normaliser, comme au bon vieux temps des méthodes staliniennes. Première victime, Fabius, exclu de la direction du PS par la majorité du Conseil national, le 4 juin. Bartolone, lui aussi évincé avec huit autres fabiusiens, précise que le prochain congrès du PS, avancé de six mois et prévu désormais pour novembre 2005, sera " celui des petits arrangements entre amis ". Et tout cela lui " donne la nausée " (Le journal du Dimanche, 5 juin 2005). Mélenchon, Emmanuelli et Marc Dolez ont du mouron à se faire. La direction du PS, qui a jeté toutes ses forces dans la bataille pour le oui à une Europe capitaliste sans entraves, n'est pas décidée à baisser pavillon, quitte à causer l'implosion du parti. Hollande et Strauss-Kahn n'obéissent pas à leur base électorale ; leurs maîtres sont ailleurs, dans les cercles dirigeants du patronat français et européen. Le " socialisme bourgeois " dont parlaient déjà Marx et Engels obéira servilement : la direction du PS elle aussi va construire son bunker, et tant pis pour les dégâts. Et les dirigeants syndicaux, tels Thibault et Le Duigou, de la CGT, acoquinés avec les partisans du oui, désavoués par la majorité du CCN ne seront pas épargnés.
Force restera à ceux qui, le 29 mai, ont voté contre le chômage, les bas salaires, la précarité et la liquidation des services publics. Et les gesticulations dans l'arrière boutique des partis faillis et des couloirs ministériels n'y changeront rien. l'Histoire est en marche.
Modifié le vendredi 17 juin 2005
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