Re-décomposition et lutte de classes

Re-décomposition et lutte de classes

L’élection de Macron relève d’un coup de force sans force. Il est la dernière créature produite par un régime en perdition dont tous les traits antidémocratiques sont devenus visibles à l’œil nu. Après avoir joué à cache-cache pendant des mois de campagne, en se bombardant « issu de la gauche mais ni de gauche, ni de droite », se faisant passer pour un « centriste » de l’extrême-centre, il a opté aussitôt pour un ministre de droite, ombre portée de Juppé. Macron, roi sans couronne, s’apprête à tenir la place qui, en Grande-Bretagne, est dévolue à la reine. Président d’apparat et d’opérette, paradant avec son épouse pour donner un tour royaliste à sa prestation. Dès à présent, les partis sont sommés de disparaître pour laisser place à des réseaux et des mouvances faisant allégeance à leur chef, où la « base » est réduite au rang de piétaille. Ils appellent tous cela : la recomposition. Mais, ici, la recomposition est la forme que prend la décomposition du pouvoir et des points d’appui politiques du « système » de la Ve République.

Macron est en réalité minoritaire et, à plus d’un titre, illégitime. Ce qui frappe le plus les classes dirigeantes et leurs « médiatiseurs » est ce dont on parle le moins : l’ampleur de la « grève du vote » (37% d’abstentions, blancs et nuls) et son contenu social, à savoir le rejet des « réformes » et du régime politique qui les produit, la volonté d’en finir avec la loi El Khomri et de mettre à bas les ordonnances qui se trament. Face à ce refus, Mailly et Martinez se terrent. Mailly bafouille comme un bourgeois de Calais prêt à donner les clés du Code du travail, pourvu que les syndicats soient des « interlocuteurs » : « Il est élu, légitimement, avec même un beau score. Je ne fais pas de procès d’intention. On a dit ce qu’on avait à dire sur les points qui nous inquiètent mais qui sont encore imprécis, comme sur la question de l’inversion de la hiérarchie des normes. On a besoin de précisions, à la fois sur la forme et sur la méthode. Nous n’instruisons donc pas un procès a priori. Nous attendons de rencontrer le président de la République et, demain, son gouvernement pour voir exactement ce qu’ils veulent faire . » « Si le thème et le contenu des ordonnances sont de nature consensuelle, il n’y a pas de problème. Sauf que là, ce que je crains, a priori, c’est que ce ne soit pas obligatoirement consensuel si les ordonnances sont aussi un moyen d’aller vite et d’éviter le débat. (…) On va voir si l’habit fait le moine, si, dans le costume de président de la République, il peut modifier certains points de son programme. Une des questions que je lui poserai, c’est quelle est sa conception du dialogue social . … ». En résumé : ne me retenez pas car je ne vais pas faire un malheur. Martinez, lui, se tient coi. Tout se passe d’ailleurs comme s’il y avait deux CGT, celle d’en haut et celle d’en bas . En bas, nous voyons par exemple L’UD CGT des Bouches du Rhône placarder : « contre l’exploitation, le chômage et la précarité : abrogation totale des lois Macron et Travail ». De son côté, l’UD Hauts-de-Seine (92) manifeste le premier mai sous une banderole pour « l’abrogation totale de la loi El Khomri ». Pour sa part, le syndicat CGT des Archives de France lance une pétition nationale pour l’« Abrogation totale de la loi El Khomri – A bas les ordonnances Macron – Pas touche au Code du Travail ». Seuls les hauts dirigeants FO et CGT légitiment Macron. Mélenchon s’y emploie tout autant : en faisant miroiter une cohabitation, il adoube Macron, il le légitime à son tour. Rappelons-le : dans le cadre d’une cohabitation, le chef de l’État a toujours le dernier mot. Si le chef de gouvernement ne lui fait pas des concessions sans limites, le président dissout le Parlement ou ne promulgue pas certaines lois. Le chef du gouvernement, pris dans un carcan prend sur lui toutes les mesures impopulaires. Ainsi Jospin, cohabitant avec Chirac privatisa à tour de bras, imposa l’annualisation du temps de travail, pratiqua la « non-intervention » face aux plans de licenciements. Nous connaissons la suite… En 2002, il s’effondra. Chirac fut réélu. Nous ne spéculons pas sur le résultat des législatives. L’heure est à l’unité des travailleurs et des organisations pour « Ni loi El Khomri 1, ni loi –ordonnance El Khomri 2, Abrogation totale ».



19 mai 2017

Modifié le mardi 23 mai 2017
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