Le virus OPA
EditorialCela ressemble à une cacophonie. Cela ressemble à une mesure prise dans l'urgence. Mais ce n'en est pas une. Comme le souligne Le Canard Enchaîné, " la fusion GDF-Suez " vient de loin. Selon le journal satirique, les PDG des deux entreprises négociaient en douce, avec l'aval du ministre Breton. Mais là n'est pas l'essentiel. Les salariés ont compris ce qu'il fallait comprendre : cette fusion parachève la privatisation de GDF, engagée avec l'ouverture au capital d'EDF-GDF.Patriotisme économique : le cocorico de Villepin, du patronat français ...
Le patriotisme économique affiché par Villepin, avec ses relents d'Appel de Cochin Référence au discours prononcé par Chirac, à l'hôpital Cochin, le 30 novembre 1978 contre " le parti de l'étranger ". riant haro sur une OPA étrangère pourrait prêter à sourire. Mais cet aspect-là de l'affaire mérite néanmoins qu'on s'y arrête. Voilà qui montre la vanité de la " construction européenne " au nom de laquelle, ensemble, dirigeants du PS et de l'UMP, flanqués de l'UDF, appelaient à voter oui à une Constitution européenne dirigée contre les services publics, les droits, garanties et conquêtes sociales des travailleurs dans toute l'Europe. Il devait en sortir un patriotisme européen pour faire bloc face aux USA. Rien n'y fait : les grands groupes capitalistes financiers reposent sur des bases nationales, sur des États nationaux, instruments politiques et régaliens de leur domination et de leur expansion au-delà des frontières. Ajoutons à cela l'adaptation des directions syndicales à l'État national, à " la France " et son coq gaulois menacé par la grippe aviaire, version italienne.
... des dirigeants syndicaux ...
Il en est ainsi du secrétaire général de la CGT-Énergie, cité dans la NVO (Nouvelle Vie Ouvrière, l'hebdo de la CGT) qui prône d'autres solutions contre le virus des OPA étrangères, en faisant " monter la participation [...] de la Caisse des Dépôts " dans le capital de Suez.
... du PCF qui défend les intérêts du pays ...
Le PCF n'est pas en reste, qui proclame, le 26 février, qu'il " défendra les intérêts du pays " et se fait le champion de " la défense de nos fleurons industriels, dont le groupe Suez, contre les OPA ". Mais, une fois encore, la palme du chauvinisme est remportée par Chevènement, qui juge que la fusion GDF-Suez est la " solution la moins mauvaise " face à l'OPA italienne. Bien entendu, du côté de ces directions officielles du mouvement ouvrier, pas question d'envisager un seul instant la nationalisation sans indemnités ni rachat de tout le secteur de l'Énergie et de l'Eau.
... et du coq gaulois du PS
De son côté, le PS parle d'assigner à EDF et GDF des objectifs industriels. C'est d'ailleurs au nom des " projets industriels " qu'EDF a fait des OPA sur des compagnies étrangères privatisées. Mais ceux qui s'insurgent, à droite et gauche, contre les OPA étrangères se félicitent des OPA réalisés par des " fleurons industriels de la France ". Le vrai virus, le pire qui soit, c'est le chauvinisme. C'est l'un des obstacles à la défense, plus que jamais nécessaire, des services publics, en France et en Europe.
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