Le fond de l'air

Le fond de l'air

À quelques jours du premier tour de « l’élection suprême » (Dupont-Aignan dixit), c’est l’incertitude totale. Les cercles dirigeants du capital sont eux-mêmes désorientés. Toutes leurs « cartes » semblent griller les unes après les autres. Juppé, puis Fillon et, maintenant, Macron ? Soudain, surgit Jean-Luc Mélenchon, dont les meetings diffusent l’air du temps. Nouvel épouvantail ou nouvelle « carte » ? Difficile de le savoir. Les deux à la fois, qui sait ?

Le mécanisme des élections est complètement déréglé. Seul Mélenchon semble y survivre. L’insoumis se fait raisonnable et raisonné. Il jure à présent qu’il ne veut pas sortir de l’ UE. Pour qui en douterait, la clémente Autain nous édifie : « Nous souhaitons rester dans le cadre européen. On peut rester dans l'euro » 1 . Mélenchon qui disait que pour renégocier en position de force, il fallait commencer par dire « L’Europe, on l’aime ou on la quitte » avec des bouffées de germanophobie contre « l’Europe de Merkel », change de ton et assure que « l’Allemagne est notre partenaire » (lors du débat des 11 candidats). Pendant que Mélenchon enchante, Fillon et Macron menacent.« Ordonnances pour réformer le Marché du travail », « traitement de choc » contre les salariés, leurs droits, leurs familles, leur santé et leur vie. Loin d’apaiser les esprits, les élections ajoutent encore de l’électricité dans l’air. Il est question des « centaines de milliers de travailleurs » qui se mobiliseraient, paraît-il, derrière la FI. Des centaines de milliers de travailleurs qui ont fait grève ces deux derniers mois pour leurs effectifs, leur statut, leurs salaires, en comptant sur leurs propres forces, il en est beaucoup moins question.

Les événements qui secouent la Guyane semblent alors, dans l’air du temps qui est diffusé, appartenir à un autre monde, un autre temps. Les travailleurs et la population de Guyane cherchent à arracher de l’État les moyens de vivre : l’eau, l’électricité, les soins. Dans la grève générale unie, ils exigent le réengagement financier de L’État et les milliards qu’il leur doit. Là est le fond de l’air : dans les grèves en « métropole » et « outre-mer », dans le processus engagé au printemps 2016. En réalité ce combat n’a souffert aucune interruption, en dépit des efforts des hautes-bureaucraties syndicales pour cloisonner, disperser et morceler la résistance incompressible des salariés, tout en cherchant à noyer les revendications vitales dans les « propositions » les plus fumeuses. Ces élections folles sont, au fond, une veillée d’arme. La population ne veut plus vivre comme avant, ne veut plus supporter plus longtemps le travail précaire, les salaires réduits à des portions de misères, le temps de travail flexible, les sacrifices pour payer le loyer, le management infernal, la désorganisation des transports urbains, la mise en pièces des hôpitaux, la liquidation des services publics de proximité, la désertification de régions entières.

Dans cette situation, tendue à refus, la moindre étincelle risque de déclencher une explosion révolutionnaire dans tout le pays, c’est-à-dire l’irruption soudaine et spontanée de la population travailleuse et pauvre autour de ses revendications vitales, pour porter un coup d’arrêt à tous les « traitements de choc » capitalistes et à toutes les entourloupes. Les choses sont déjà allées trop loin sous ce quinquennat répulsif, aux yeux d’une large majorité de salariés et de jeunes. Aucun remaniement du « personnel politique » à la tête de L’État n’aura raison des aspirations simples du peuple des exploités et des opprimés de ce pays. La magie du verbe et les « bons mots », les « buzz » synthétiques ou ludiques sonnent bien à l’oreille dans l’atmosphère « électorale » et offrent parfois un exutoire passager ou folklorique et même « écologique ». Dans la vraie vie, c’est un front du refus qui se dresse contre le vieux régime, contre les « réformes » et les « sacrifices ». Dans ce front du refus, peut naître un nouveau parti, un parti de classe, c’est-à-dire, un parti de lutte de classes et non de « lutte des places ».



13 avril 2017



1.  http://www.lepoint.fr/presidentielle/manque-rubrique-autain-met-en-garde-contre-les-amalgames-entre-le-pen-et-melenchon-13-04-2017-2119480_3121.php

Modifié le vendredi 14 avril 2017
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